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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

3 participants

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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Castel Ven 27 Mar - 4:55

Pour les 224 ans de sa naissance, ayons une pensée pour l'enfant martyr du temple.
Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Wpd20e40c6_0f
Le Dauphin en prison, par Jean Baptiste Meunier.

Lire le poème de V.Hugo


Louis XVII

Capet, éveille-toi.

En ce temps-là, du ciel les portes d’or s’ouvrirent,
Du Saint des Saints ému les feux se découvrirent :
Tous les cieux un moment brillèrent dévoilés ;
Et les élus voyaient, lumineuses phalanges,
Venir une jeune âme entre de jeunes anges
Sous les portiques étoilés.

C’était un bel enfant qui fuyait de la terre ; –
Son oeil bleu du malheur portait le signe austère ;
Ses blonds cheveux flottaient sur ses traits pâlissants ;
Et les vierges du ciel, avec des chants de fête,
Aux palmes du martyre unissaient sur sa tête
La couronne des innocents.


II

On entendit des voix qui disaient dans la nue :
« Jeune ange, Dieu sourit à ta gloire ingénue ;
Viens, rentre dans ses bras pour ne plus en sortir ;
Et vous, qui du Très-Haut racontez les louanges,
Séraphins, prophètes, archanges,
Courbez-vous, c’est un roi ; chantez, c’est un martyr ! »

« Où donc ai-je régné ? demandait la jeune ombre,
Je suis un prisonnier, je ne suis point un roi,
Hier, je m’endormis au fond d’une tour sombre,
Où donc ai-je régné ? Seigneur, dites-le-moi.
Hélas ! mon père est mort d’une mort bien amère ;
Ses bourreaux, ô mon Dieu ! m’ont abreuvé de fiel ;
Je suis un orphelin : je viens chercher ma mère,
Qu’en mes rêves j’ai vue au ciel. »

Les anges répondaient : « Ton Sauveur te réclame.
Ton Dieu d’un monde impie a rappelé ton âme.
Fuis la terre insensée où l’on brise la croix,
Où jusque dans la mort descend le régicide,
Où le meurtre, d’horreurs avide,
Fouille dans les tombeaux pour y chercher des rois ! »

« Quoi ! de ma longue vie, ai-je achevé le reste ?
Disait-il ; tous mes maux, les ai-je enfin soufferts ?
Est-il vrai qu’un geôlier, de ce rêve céleste,
Ne viendra pas demain m’éveiller dans mes fers ?
Captif de mes tourments cherchant la fin prochaine,
J’ai prié : Dieu veut-il enfin me secourir ?
Ou n’est-ce pas un songe ? A-t-il brisé ma chaîne ?
Ai-je eu le bonheur de mourir ?

« Car vous ne savez point quelle était ma misère !
Chaque jour dans ma vie amenait des malheurs ;
Et, lorsque je pleurais, je n’avais pas de mère
Pour chanter à mes cris, pour sourire à mes pleurs.
D’un châtiment sans fin languissante victime,
De ma tige arraché un tendre arbrisseau,
J’étais proscrit bien jeune, et j’ignorais quel crime
J’avais commis dans mon berceau.

« Et pourtant, écoutez, bien loin dans ma mémoire,
J’ai d’heureux souvenirs avant ces temps d’effroi ;
J’entendais en dormant des bruits confus de gloire,
Et des peuples joyeux veillaient autour de moi.
Un jour tout disparut dans un sombre mystère ;
Je vis fuir l’avenir à mes destins promis ;
Je n’étais qu’un enfant, faible et seul sur la terre,
Hélas ! et j’eus des ennemis !

« Ils m’ont jeté vivant sous des murs funéraires ;
Mes yeux voués aux pleurs n’ont plus vu le soleil ;
Mais vous que je retrouve, anges du ciel, mes frères,
Vous m’avez visité souvent dans mon sommeil.
Mes jours se sont flétris dans leurs mains meurtrières,
Seigneur, mais les méchants sont toujours malheureux ;
Oh ! ne soyez pas sourd comme eux à mes prières,
Car je viens vous prier pour eux. »

Et les anges chantaient : « L’arche à toi se dévoile,
Suis-nous ; sur ton beau front nous mettrons une étoile.
Prends les ailes d’azur des chérubins vermeils,
Tu viendras avec nous bercer l’enfant qui pleure,
Ou dans leur brûlante demeure,
D’un souffle lumineux rajeunir les soleils ! »


III

Soudain le choeur cessa, les élus écoutèrent ;
Il baissa son regard par les larmes terni ;
Au fond des cieux muets les mondes s’arrêtèrent :
Et l’éternelle voix parla dans l’infini :

« Ô roi ! je t’ai gardé loin des grandeurs humaines ;
Tu t’es réfugié du trône dans les chaînes :
Va, mon fils, bénis tes revers ;
Tu n’as point su des rois l’esclavage suprême.
Ton front du moins n’est pas meurtri du diadème,
Si tes bras sont meurtris de fers ;

« Enfant, tu t’es courbé sous le poids de la vie ;
Et la terre, pourtant, d’espérance et d’envie
Avait entouré ton berceau !
Viens, ton Seigneur lui-même eut ses douleurs divines,
Et mon fils, comme toi, roi couronné d’épines,
Porta le sceptre de roseau ! »

Victor HUGO.

http://www.biblisem.net/narratio/hugoloui.htm
Castel
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Message par Castel Lun 8 Juin - 7:28

Aujourd'hui, 214 ans après sa "disparition", que le souvenir des horreurs que les républicains firent vivre au petit Roi comme à notre Patrie rendent plus ardentes nos prières pour le retour du Royaume du Christ en la personne du prochain Roi de France.
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Message par Castel Sam 27 Mar - 5:33

Oui, hommage à notre petit Roi au jour de son 225è anniversaire ! Que Dieu aie pitié de ses bourreaux et de leurs héritiers, qu'ils s'amendent de leur républicânerie et se convertissent, qu'ils retrouvent le chemin du Royaume de Dieu sur la terre comme au Ciel. Et nous, pauvre petit troupeau clairsemé, faisons en sorte de rester fidèles afin que le souvenir soit une espérance.
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Message par Castel Ven 11 Juin - 10:44

215 ans plus tard, nous voici, petit troupeau décimé, devant la tombe de notre petit roi pour saluer sa mémoire, méditer son agonie et prier. Que Dieu ait pitié des infâmes qui l'ont séquestré et martyrisé. Qu'il nous accorde le retour glorieux de nos rois et le triomphe sur terre de son céleste royaume. Qu'il bénisse tous ceux qui participent où qu'ils soient à cet avènement.
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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par beatnik Ven 11 Juin - 16:33

nous sommes les petites Lumieres qui veillent dans l'attente du Retour de JESUS CHRIST ROY SAUVEUR,

CELUI qui donnera a la France, fille ainee de l'Eglise, CELUI qu'elle meritera.

Union de Prieres dans les COEURS UNIS de JESUS et de MARIE

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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Her Ven 8 Avr - 10:04

http://louisxviiroimartyr.free.fr/index.html

Louis XVII - Roi, enfant et martyr

Loisirs et éducation d’un jeune prince


De son prénom entier Louis-Charles, le jeune prince naquit le 27 mars 1785. Second fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, il reçut dès sa naissance le titre de duc de Normandie. Le 4 juin 1789, il devint Dauphin de France lorsque son frère aîné, Louis-Joseph, mourut de tuberculose osseuse à l’âge de sept ans.
Malgré les alertes et les chocs de la Révolution, l’enfance du jeune prince à Versailles puis aux Tuileries se déroula avec une certaine joie, le garçonnet récupérant bien de ses chocs successifs et sachant communiquer sa joie spontanée à ses parents minés par les problèmes politiques.


Enfant débordant d’énergie, Louis-Charles est vif, enjoué, mais aussi nerveux et colérique. Très sensible, il a grand coeur et aime rendre visite aux enfants orphelins ou miséreux pour leur faire des dons, se gardant à cet effet une réserve de pièces d’or.

Un jour, Louis XVI surprit son fils qui comptait des pièces d’or et les enfermait dans un coffre. « Comment, mon fils, s’écria le roi, vous thésaurisez comme les avares ?
- Oui, mon père, répondit l’enfant avec un gentil sourire. Je thésaurise comme les avares, mais c’est pour donner aux enfants perdus! Les pauvres! Ils méritent vraiment ce nom! »
Heureux de sa méprise, Louis XVI embrassa son enfant et ajouta lui-même des pièces d’or au petit trésor -qui était alimenté par Madame Elisabeth, la soeur du roi.

Un autre jour, une mère de famille vraiment misérable vint le voir dans son jardin des Tuileries et lui demanda s’il pourrait intercéder en sa faveur auprès de la reine. Lorsque la pauvre mère revint voir Louis-Charles le lendemain, celui-ci eut la joie de lui donner une pièce d’or. « Voici de la part de ma mère, dit-il, et voici de ma part ! » Et de tendre un magnifique bouquet de fleurs à la brave femme. « Oh, merci, s’écria-t-elle, je suis vraiment heureuse comme une reine, maintenant! »
Mais cette parole, de joyeux qu’il était, rendit soudain Louis-Charles mélancolique. « Heureuse comme une reine ? Répéta-t-il l’air malheureux. Moi, j’en connais une qui pleure tous les jours ! »
Et il se tut, contemplatif, songeant à sa mère que les attaques des factions avaient plongée dans la dépression nerveuse.

Si ses manières révèlent son haut rang, le Dauphin est dénué de morgue et a la chance, contrairement aux autres enfants de l’aristocratie du XVIIIème siècle, d’avoir des parents toujours près de lui et impliqués dans son éducation. Sa gouvernante la marquise de Tourzel et son précepteur l’abbé d’Avaux comptent aussi beaucoup pour lui.

Avant que l’abbé d’Avaux ne se présente à la Cour, Louis XVI lui avait fait parvenir une lettre dans laquelle le roi donnait ses instructions pour l’édification morale de l’héritier du trône :

« Exaltez à ses yeux les vertus qui font les bons rois, et que vos leçons soient proportionnées à son intelligence. Hélas! Il ne sera que trop tenté d'imiter un jour ceux de ses ancêtres qui ne furent recommandables que par des exploits guerriers. La gloire militaire tourne la tête. Eh ! quelle gloire, que celle qui fait répandre des flots de sang humain, et ravage l'univers ! Apprenez-lui avec Fénelon, que les principes pacifiques sont les seuls dont les peuples conservent un religieux souvenir. Le premier devoir d'un prince est de rendre son peuple heureux : s'il sait être roi, il saura toujours bien défendre le peuple et sa couronne. [...]Ce n'est point des exploits d'Alexandre ni de Charles XII, dont il faut entretenir votre élève : ces princes sont des météores qui ont dévasté la terre. Parlez-lui, et de bonne heure, des princes qui ont protégé le commerce, agrandi la sphère des arts, enfin des rois tels qu'il les faut aux peuple, et non tels que l'Histoire se plaît à les louer. »

Elève brillant, le Dauphin montre dans ses études une vive curiosité, de l’application et beaucoup d’esprit. Il se passionne pour l’Histoire, apprend par coeur les fables de La Fontaine, traduit le latin et demande à apprendre l’italien. Sa culture générale étonne souvent son entourage.
Un jour, l’abbé d’Avaux arrivant pour la leçon de grammaire et trouvant son élève bien dissipé, voulut commencer par un récapitulatif de la leçon de la veille. « Je suis sûr que vous ne vous souvenez plus de la leçon d’hier sur les trois degrés de comparaison : positif, comparatif et superlatif.
- Vous vous trompez, répondit le jeune garçon; et pour preuve, je vous donne les trois : le positif, c’est quand je dis « mon abbé est un bon abbé. » Le comparatif, quand je dis « mon abbé est meilleur qu’un autre abbé. »
Alors l’enfant s’interrompt, se tourne vers sa mère qui assiste à toutes ses leçons, puis lui dit avec le plus charmant des respects : « Et le superlatif, c’est quand je dis que « Maman est la plus aimable et la plus aimée de toutes les mamans. »

Aimant se dépenser au grand air, son occupation favorite à Versailles puis aux Tuileries consiste à entretenir un jardinet dont il cueille, chaque matin, un beau bouquet de fleurs qu’il dépose sur la toilette de sa mère pour qu’elle le découvre à son lever. S’il s’investit dans son jardin, refusant toute aide pour faire pousser les fleurs qu’il destine à sa mère mais aussi aux gens qui lui rendent visite, Louis-Charles a aussi une passion pour tout ce qui concerne l’armée. Lors de ses apparitions publiques, il aime revêtir un uniforme de colonel de la Garde Nationale, et veut être là lorsque les soldats font tirer le canon. Propriétaire d’une belle épée qui nous a été conservée, il apprend l’escrime, l’équitation et le tir ; il défile et manoeuvre souvent à la tête du Royal Dauphin, un curieux régiment d’enfants et d’adolescents, créé par un abbé un peu trop enthousiasmé par la Révolution, et dans lequel la bourgeoisie victorieuse de 1789 aime inscrire ses fils. Le jeune garçon possède aussi une armure complète avec casque, bouclier et lance.


Le Dauphin dans la tourmente révolutionnaire

Menant une existence protégée à Versailles, entouré de l’amour des siens et de l’attention de la Cour, l’enfant royal vit dans l’insouciance -et sans doute dans l’ignorance -le fatidique été 1789. Il ne prend sans doute conscience de la violence révolutionnaire que lorsque celle-ci vient frapper à la porte du château les 5 et 6 octobre 1789. Au cours de ces journées, des femmes parmi lesquelles des hommes déguisés forcent les portes du château et emmènent de force la famille royale à Paris, derrière les têtes coupées de quelques gardes, promenées en tête de cortège. Premier traumatisme pour le tout jeune Dauphin.
Le lendemain matin, effrayé d’entendre à nouveau des manifestants devant le nouveau château, le jeune garçon se jette dans les bras de sa mère : « Maman ! Est-ce qu’aujourd’hui est encore hier ? » demande-t-il, terrorisé à l’idée de revivre ce cauchemar.

Le second traumatisme d’importance a lieu au retour du fameux voyage de Varennes, le 22 juin 1791, lorsqu’une foule de révolutionnaires déchaînés escorte la voiture du roi jusqu’à Paris, au cours d’un périple de trois jours sous une chaleur accablante, et pendant lequel un noble puis un prêtre furent sauvagement massacrés sous les yeux du couple royal et de ses enfants.

Pendant ce terrible voyage de retour, Louis-Charles s’attristait davantage de l’affliction de ses parents que de son propre sort. Il fut ainsi fort peiné d’entendre son père décrire ainsi la situation en la comparant à la glorieuse visite qu’il avait faite en 1786 au port militaire de Cherbourg, et pendant laquelle tout son peuple l’avait acclamé, alors qu’il descendait dans les auberges et se mêlait à lui, prenant des bains de foule et faisant la charité à tous : « C’est, Monsieur, un bien triste voyage pour mes enfants. Quelle différence avec Cherbourg ! La calomnie à cette époque n’avait point encore égaré l’opinion. Comme les esprits sont prévenus ! Comme les têtes sont montées ! On peut me méconnaître, mais on ne me changera pas, moi; l’amour de mon peuple demeurera le premier besoin de mon coeur, comme il est le premier de mes devoirs. »
Ainsi parlait le roi. Quand Louis-Charles entendit ces paroles édifiantes, une grosse larme roula sur sa joue. Alors cet enfant, avec tendresse et dignité, prit la grosse main de son père dans les siennes, minuscules, et y déposa un baiser. Et, ignorant son propre chagrin, sa propre peur et les symptômes dus à l’insolation et au manque d’air, il entreprit de consoler son père avec une touchante abnégation, luttant pour produire un sourire réconfortant à travers ses larmes. « Ne vous attristez point, mon père, une autre fois nous irons à Cherbourg. »

Le 21 juin 1792 eut lieu la troisième grande journée traumatisante que connut cette si jeune existence. Levés par les factions, les sans-culottes des faubourgs envahirent le château royal des Tuileries. Ce jour-là, pendant quatre heures d’affilée, une foule hurlante de haine et brandissant des trophées macabres défila devant la famille royale acculée au fond d’une pièce. Louis-Charles avait le malheur d’être l’héritier du trône, et en tant que tel attirait tous les regards de la foule. On força le jeune Prince à enfiler le bonnet phrygien. Ne sachant pas ce que ce geste signifiait, Louis-Charles se laissa faire avec un pauvre petit sourire. Mais ce bonnet, tricoté pour un solide sans-culotte, recouvrit totalement la tête d’enfant de sept ans du petit prince. Louis-Charles étouffait. C’était une accablante journée d’été, comme celle de leur voyage à Varennes un an plus tôt, et le chaud bonnet de laine rouge qu’on lui interdisait d’enlever lui ravissait le peu d’air qui restait dans la pièce envahie de monde. Coincé derrière cette table avec ce couvre-chef étouffant sur le crâne, l’enfant arrivait de moins en moins à respirer, et sentait la tête lui tourner. Dans un instant il s’évanouirait devant cette foule en furie.

Puis soudain ce fut la délivrance La lumière l’éblouit et un air moite empesté par les odeurs de transpiration lui rentra dans les narines tandis qu’une main puissante ôtait le bonnet de la petite tête aux cheveux châtains roux collés par la sueur.
Le quatrième épisode traumatisant serait la prise des Tuileries et la chute de la monarchie, le 10 août de la même année.


La Famille Royale en prison

Toute la vie de Louis-Charles s’écroule le 10 août 1792, lorsque les gardes fédérés et les sans-culottes levés par les factions investissent les Tuileries et perpétuent un abominable massacre sur la garde suisse qui s’était rendue sur l’ordre du roi. Louis-Charles n’assiste pas à cette scène, car il est prisonnier avec sa famille dans la loge du logographe à l’Assemblée Nationale. A partir de cet instant, il ne connaîtra plus jamais la liberté. Violemment perturbé par l’irruption dans la salle des délibérations de soudards couverts de sang qui menacent de mort son père, Louis-Charles est transféré avec les siens dans la forteresse du Temple le 13 août. Il n’en ressortira jamais plus.
Au début, la famille royale est réunie. L’enfant partage sa captivité avec ses parents, sa soeur aînée Marie-Thérèse, sa tante Madame Elisabeth et deux fidèles serviteurs nommés Hue et Cléry. De nombreux livres sont accessibles dans les archives de la forteresse, ce qui permet aux adultes de poursuivre l’instruction et l’éducation des enfants, le tout au milieu des brimades quotidiennes de gardiens fanatisés. Louis-Charles, pourtant, ne se départ pas de sa joie de vivre, heureux de passer du temps avec son père, et trouvant toujours à s’occuper entre ses leçons, ses jouets et ses promenades dans la cour -même si ces dernières sont l’occasion d’un redoublement de vexations de la part des gardes.
Séparé une première fois de sa mère, le garçon vit un mois en compagnie de son père, puis est remis aux femmes pendant toute la durée du procès de Louis XVI. Il ne reverra son père que la veille de son exécution. La scène est déchirante. Louis XVI fait promettre à son fils de pardonner à ses bourreaux, et de ne jamais chercher à venger sa mort. Louis-Charles n’oubliera jamais cette recommandation et s’efforcera jusqu’à la fin de sa courte vie à chasser toute haine de son coeur. Le lendemain matin, 21 janvier 1793, son père est guillotiné. Tandis qu’on emmenait son père, l’enfant se jetait aux pieds des gardes en leur suppliant de le laisser descendre pour parler aux révolutionnaires et leur implorer d’épargner son père. Mais en vain : à dix heures vingt ce jour-là, Louis-Charles devient Louis XVII. Il avait bientôt huit ans.

Sa mère fait venir des vêtements de deuil pour elle et ses enfants. Vêtu d’un costume noir, Louis-Charles continue à étudier avec sa mère et sa tante Madame Elisabeth. Les jours où les gardiens en faction se montrent compatissants, elle lui apprennent des chansons.
En mai, Louis-Charles tombe gravement malade. Il est alité et a une très forte fièvre. Les conditions de vie insalubres qu’on lui inflige depuis neuf mois l’ont rendu tuberculeux. Pendant deux ans, il luttera avec une robustesse étonnante contre cette maladie qui finira par avoir raison de lui... ainsi que les mauvais traitements qui vont dès lors devenir insoutenables.


La cruelle tutelle de Simon

Le 3 juillet 1793, le petit garçon tuberculeux est arraché sans ménagement à l’amour de sa mère et de sa famille. Marie-Antoinette s’agenouille à la hauteur de son enfant et le prend dans ses bras. Comme le petit garçon est suffoqué par les sanglots, elle fixe son attention en le regardant bien en face et en lui parlant d’une voix douce, les mains sur ses épaules étroites agitées de soubresauts. « Mon enfant, nous allons nous quitter. Souvenez-vous de vos devoirs quand je ne serai plus auprès de vous pour vous les rappeler. N’oubliez jamais le bon Dieu qui vous met à l’épreuve, ni votre mère qui vous aime. Soyez sage, patient et honnête, et votre père vous bénira du haut du ciel. »
Puis elle fait un dernier câlin au petit. Après cela, elle confie l’enfant en larmes aux commissaires. Louis-Charles commence par faire un pas vers la porte, mais cet horrible pressentiment qu’il ne reverra plus jamais sa mère est toujours là, et au moment de franchir le seuil il échappe à ses geôliers et court se réfugier dans les bras de Marie-Antoinette. Fou de chagrin, il enfouit son visage dans la robe de sa mère. « Allons, il faut obéir, il le faut », dit la Reine en s’évertuant de paraître forte et digne, mais déjà sa voix s’éteint dans les sanglots, et on sent tout l’effort que lui coûte cette simple phrase.

Désormais, Louis-Charles devra vivre au second étage de la tour, sous la tutelle du cordonnier Antoine Simon, un révolutionnaire fanatique que la Convention a chargé « d’éduquer » le jeune roi. Ne pouvant sacrifier un tel otage, les révolutionnaires ont trouvé une solution intermédiaire pour éliminer cette incarnation de la royauté qu’est Louis-Charles : en faire un parfait sans-culotte.
Tous les jours, le petit garçon subit rosseries et humiliations. Alors qu’il ne cesse de pleurer l’absence de sa mère à laquelle on l’a arraché pour le livrer à Simon, il est sommé de jurer fidélité à la République, et d’apprendre par coeur des chants révolutionnaires et paillards. Il résista noblement au début, exigeant même qu’on lui montrât le décret ayant ordonné tant de souffrances puis, brisé, il dut se soumettre à toutes les exigences de son maître.
Simon prenait un rare plaisir à humilier cet enfant de sang royal. Il aimait, pour ce faire, l’obliger à le servir à table ou à nettoyer ses bottes. Un jour qu’il était complètement ivre, il le força à lui laver les pieds. Le jeune Roi alla faire chauffer des serviettes, puis les rapporta dans la pièce. Hélas, dans sa terreur de mécontenter son maître il mit trop de précipitation dans ses gestes et fit tomber l’une des serviettes brûlantes sur les pieds de Simon. Hurlant de douleur, cet indigne tuteur tenta de frapper le jeune prince, mais sans succès car le petit garçon s’était sauvé à temps. Un peu plus tard, croyant son bourreau calmé, Louis-Charles revint non sans méfiance pour lui essuyer les pieds. Simon le laissa terminer puis, traîtreusement, il décocha un formidable coup de pied dans les côtes du petit roi humblement agenouillé. La terreur de voir la correction recommencer fut plus forte que la douleur, et l’enfant se releva sans un mot quand Simon lui en aboya l’ordre...

Pour Louis-Charles les humiliations étaient pires encore quand Simon amenait avec lui dans la tour ses amis de beuverie, devant lesquels il aimait se vanter, démonstration à l’appui, de mater le jeune Roi de France. Le 6 août, la ville de Montbrison s’étant soulevée au cri de « vive le Roi Louis XVII ! », Simon présenta le petit prince à la cantonade en déclamant : « Voici le Roi de Montbrison. Je m’en vais l’oindre, l’encenser et le couronner! »
Et, joignant le geste à la parole, il l’oignit en lui renversant son verre sur la tête et en lui frottant douloureusement les cheveux, l’encensa en lui soufflant des bouffées de sa pipe à la figure et le couronna en le coiffant du bonnet phrygien. Devant la petite figure rouge de colère et de honte de Louis-Charles, Simon demanda alors : « Que me ferais-tu, Capet, si tes amis te délivraient et si tu devenais Roi de France pour de vrai ? »
Et alors cet enfant imposa le silence et le respect à tout le monde en répondant : « je vous pardonnerais ».

En octobre, le journaliste Hébert, le procureur Chaumette et le maire Pache conçoivent un plan répugnant (et parfaitement inutile) pour charger le dossier d’accusation de Marie-Antoinette dont le procès va s’ouvrir. Simon sera leur instrument. A force de coups, de jeûnes forcés, de boisson et de menaces de guillotine -


L’emmurement (de Louis XVII) et l’agonie (de l'enfant du Temple).

Malgré tout ce que Louis-Charles avait déjà subi, le pire n’arriva que le 19 janvier 1794, quand la Convention décida qu’elle avait assez perdu de temps avec le petit roi. Commence alors la période de l’emmurement, qui durera six mois. Le jeune roi, qui va sur ses neuf ans, est jeté au fond de sa chambre, dont on condamne la porte. Pendant six mois sans interruption, il vivra dans cette pièce minuscule, où n’entre pas même la lumière du jour puisque la fenêtre, comme la porte, est condamnée. La nourriture lui est passée à travers un guichet. Aucun accès au cabinet d’aisance : l’enfant, qui est déjà malade, va vivre pendant six mois au milieu de ses déjections. Il n’a ni visite, ni lumière, ni livre, ni jouet pour se distraire. Terrorisé, malade, rejeté de tous, écrasé par le chagrin, il est sur le point de mourir d’inanition lorsque Robespierre est renversé le 28 juillet 1794 (9 thermidor). Le soir même, Barras, nouvel homme fort du régime, se rend à la prison du Temple et fait sortir l’enfant de son isolement. Louis-Charles est dans un état qui dépasse l’imagination. Sa seule parole, lorsque ses nouveaux geôliers ouvrent enfin la porte de sa cellule après six mois d’isolement, est pour leur dire qu’il voudrait mourir.

Il faudra pourtant attendre encore un mois pour que ses gardiens le lavent, le soignent, lui coupent les cheveux et les ongles, l’habillent de linge frais et nettoient sa chambre de fond en comble. Trois gardiens se succèderont d’ici la mort de l’enfant : Christophe Laurent, Jean-Baptiste Gomin et Etienne Lasne. Ces hommes se montrèrent humains et firent de leur mieux, dans la mesure de leurs maigres moyens, pour adoucir le sort de l’enfant royal et le distraire un peu. Mais Louis-Charles est au-delà de cela désormais : en état de catalepsie, tuberculeux au dernier degré, il n’a plus aucune force et ne parle presque jamais, sauf pour donner des réponses très brèves que ses gardiens doivent lui soutirer avec insistance. Il ne gémit même pas de douleur, alors que ses poignets et ses genoux sont noués par une arthrose tuberculeuse qui le fait terriblement souffrir. Il a bien trop peur des hommes désormais pour leur faire confiance, et seules les cajoleries d’une mère pourraient peut-être l’aider à sortir de son silence.

Et justement, toutes les pensées de l’enfant vont vers sa mère. Il ignore que Marie-Antoinette a été guillotinée le 16 octobre 1793, et pense qu’elle est toujours enfermée au troisième étage de la tour... (Mystère divin !...)

Un jour, rassemblant ses dernières forces et ses dernières volontés, l’enfant moribond (de la substitution), qui ne parle presque jamais, demande à Gomin de le laisser revoir sa mère une dernière fois avant de mourir (ou un roman dramatique pour servir la cause orléaniste). Une requête que le gardien ne peut évidemment accorder.

Une semaine plus tard, le garçon entre dans le dernier tournant de son agonie. Il ne lui reste plus que deux jours à vivre, et c’est alors, et seulement alors, que le médecin décide de le tirer de son cachot pour l’allonger dans une belle chambre bleue, illuminée par le soleil, à l’autre bout du bâtiment. Louis-Charles a l’air de s’y remettre, mais au matin du dernier jour, son mal a tant empiré qu’il en devient intransportable. Veillé par Gomin et Lasne, le petit garçon souffre terriblement. Sa maladie a en effet dégénéré en péritonite tuberculeuse. Délirant de fièvre, il croit entendre sa mère chanter. Retrouvant un ultime éclair de joie, il se redresse, tire sur le bras de son gardien, se penche pour lui faire une confidence... et meurt dans ses bras (encore du roman pour servir la cause Orléaniste). En ce 8 juin 1795, le petit martyr s’en est allé. Il avait dix ans, deux mois et douze jours.

(Mais pendant ce temps !... Le véritable Louis XVII, confiè à un jeune homme du nom de La Valette, courrait la campagne française, en recherche d'un lieu de paix !...)
Her
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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Her Ven 8 Avr - 10:22

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Avant-propos

Laure de La Chapelle proteste contre l'amalgame entre le Cercle d'Etudes Historiques sur la Question Louis XVII, qu'elle préside, et les divers organismes de promotion dynastique présentés dans l'émission. Cette regrettable confusion étant dénoncée, malgré plusieurs lacunes et absurdités manifestement dictées par la mauvaise foi, elle reconnaît le caractère globalement positif de cette enquête. En premier lieu :

L'existence de deux cœurs enfin reconnue !

* Les révélations du baron X. Extraits :
J'ai bien connu la comtesse Wurmbrand (née princesse Massimo, décédée à Frohsdorf en 1999, et soeur de la princesse Nieves qui donna un cœur à St Denis en 1975). Je la voyais chez des amis très fréquemment. La comtesse Wurmbrand disait...qu'il y avait eu deux cœurs à Frohsdorf (Autriche).
Elle a vu le réceptacle où était le premier cœur ; et le deuxième, qu'elle avait si je puis dire, touché de ses mains, se trouvait chez ses parents Massimo.
Question de Georges Albert Salvan (ancien journaliste au Vatican) : Ces deux cœurs, où étaient-t-ils l'un et l'autre ?
Réponse : Le cœur de l'aîné (le premier Dauphin Louis Joseph) dans la chapelle.
Q : Et le cœur du cadet qui était Louis XVII ?
R : Il était également à Frohsdorf, je crois (En fait, le baron pense que le duc de Madrid l'a récupéré)
G-A S : Mais alors, qu'est-ce qu'il y a actuellement à Saint Denis ?
C'est bien là toute la question, en effet !

* L'urne fabriquée à Vienne
Interrogée par les journalistes dans sa propriété de Frohsdorf (près de l'ancien château), la comtesse Wurmbrand actuelle (belle-fille de la princesse Wurmbrand précédente) fit de la meilleure grâce du monde des révélations sur l'arrivée d'un premier coeur en Autriche.
Elle tenait de la princesse Béatrice Massimo, mère des quatre soeurs Massimo, que des royalistes français avaient apporté secrètement un cœur enveloppé dans un mouchoir à la duchesse d'Angoulême, qui tenait sa cour à Frohsdorf.
Ce cœur était passé ensuite au comte de Chambord par héritage. Et une urne avait été faite à Vienne. Tout près d'ici, note-t-elle.
Laure de La Chapelle rectifie : On sait, par la lettre du père Bole - montrée dans l'émission - que le cœur avait été reçu par le comte de Chambord lui-même, et non à l'époque de la duchesse d'Angoulême. Toutefois, il n'est pas impossible qu'avant sa mort à Bruxelles en 1845, Pierre Pelletan ait pris contact avec la famille royale réfugiée en Autriche, et qu'il ait réussi à intéresser la Duchesse au sort du cœur qu'il détenait.
Encore faut-il rappeler qu'il avait trouvé ce cœur dans le bureau de Mgr de Quelen en 1830, mais dans une boîte en plomb, dépourvue de son reliquaire en vermeil et de son étiquette en cuivre.
A l'arrivée du second cœur (celui de Gabriel Pelletan) à Frohsdorf en 1895, cœur reçu par don Carlos, duc de Madrid , et qui, lui, était contenu dans une urne de cristal, on décida de faire une seconde urne, réplique de celle de Gabriel. Et la comtesse Wurmbrand nous apprend que cette urne fut fabriquée à Vienne.

* Le cimetière Sainte Marguerite
M. Alexandre Gady nous a donné l'opportunité de nous interroger sur la pertinence des "spécialistes du vieux Paris" ;
Il prétend en effet que le cimetière Ste Marguerite contenait surtout des déchets d'hôpitaux et des quantités de crânes sciés (comme celui autopsié par le docteur Philippe Jean Pelletan et enterré dans la tombe officielle).
Retour à la Commission du Vieux Paris, où Madame Françoise Lagarde, archéologue de la Commission, révèle n'avoir pas trouvé un seul crâne scié ! Elle précise qu'il y avait peu de jeunes et surtout beaucoup de bébés arrivés par sacs entiers des hôpitaux ...
M. François Loyer, lui, conservateur du Patrimoine, sort un petit papier de sa poche, sur lequel il a noté des chiffres macabres à souhait : 140.000 morts enterrés dans ce malheureux cimetière, répartis dans 34 fosses communes de 8 mètres de côté, renouvelées sur cinq générations.
Mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin, s'il avait élargi son calcul à toute la région parisienne depuis le début du peuplement, il aurait obtenu des chiffres encore plus apocalyptiques... Il omet évidemment un fait qu'il connaît sans doute aussi bien que le reste : c'est que la fosse en service le 23 prairial de l'an III est parfaitement définie, fosse qui fut refermée par le fossoyeur Bertrancourt peu de jours après l'inhumation de l'enfant du Temple.
Laure de La Chapelle observe avec une charité méritoire : Je peux même en indiquer l'emplacement exact à M. Loyer si, par un triste hasard, il était victime de pertes de mémoire.

* Les recettes de cuisine de Philippe Delorme

Nous avons eu quelques occasions supplémentaires de nous réjouir en entendant l'exposé de M. Delorme. Lequel, à son habitude, entend démontrer que le cœur du premier Dauphin - dont il ne nie plus l'existence - a été traité selon la méthode suivante :
Vous prenez un coeur, vous le lavez, vous l'ouvrez (vous le coupez en deux si vous préférez) et vous le bourrez de benjoin, de cannelle, et autre plantes odoriférantes : comme un rôti farci, déclare-t-il sans sourciller.
Outre que le coeur est un muscle qu'on ne peut vider à la petite cuillère, et que ce n'est ni un rôti, ni un sandwich, cette curieuse recette n'a pas réussi à ébranler un médecin légiste qui précise : - qu'embaumement signifie conservation - que les plantes n'ont qu'un pouvoir antiseptique (et ne peuvent donc servir à la conservation)
Et elle affirme : Il est excessivement difficile de conclure à une différence entre les deux coeurs.
Le dernier argument de M. Delorme s'effondre donc devant les objections d'une spécialiste, expert auprès des tribunaux.
Mais qu'importe, ce gastronome inventif continuera encore longtemps à nous resservir son plat préféré comme il le fait déjà depuis plusieurs années !

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http://www.museelouisxvii.com/s.bern3.html

SECRETS d’ HISTOIRE en berne sur FR2 le 2 décembre 2007
ou l'Ecole de la désinformation

D'entrée de jeu, le présentateur, M. S. Bern annonce la couleur :
« Louis XVII meurt le 8 juin 1795 à la Tour du Temple. »
Dès l'annonce officielle, des rumeurs se propagent. Attention, danger !
Mme Chandernagor, romancière à la mode, rectifie avec promptitude :
« On va inventer qu'il n'est pas mort.» Tout est dit, c'est de l'invention ! Pourquoi s'attarder ?
Suivent en vrac des prétendus portraits de Louis Charles :
ceux du 1er dauphin par Kucharski ou l'étrange tableau de Vien.

Entrons maintenant dans le domaine de l'erreur lourde :
Une voix off cite Mme Elisabeth, princesse de Lamballe ». Confusion des personnes.
Le cimetière Ste Marguerite n'est pas situé rue Ste Marguerite mais rue St Bernard. Peut-être pour égarer l'amateur de tourisme historique ?
Au Temple, on observait une politesse de service. En début 1793, après le départ de Cléry ? Alors, vive les carmagnols avec leurs bouffardes et leurs obscénités...

Voici un tir groupé de Mme Chandernagor :
« La mère Simon dit n'importe quoi, elle est vieille, elle est à l'hospice, elle parle sous Louis XVIII » (qui a dû être enchanté de ses révélations sur l'existence de son neveu).
On sait que les policiers l'ayant interrogée en 1816 et 1817 ont témoigné officiellement du fait qu'elle était tout à fait crédible.
« Robespierre est venu au Temple le lendemain de l'éxécution de Mme Elisabeth (exact) Qu'il en ait profité pour exfiltrer Louis XVII, c'est impossible.» Bien sûr ! Pas ce jour là, évidemment. Pour qui nous prend-on ?
« Le témoignage sur l'empoisonnement du Dr Desault est un faux. » La preuve, SVP ?
Et en bonne ménagère : « Laurent, à son arrivée, a fait désinfecter les rideaux. »

De Mme Kaltenbach, qui n'entend pas demeurer en reste :
« Mme Royale n'a pas su pendant trois ans et demi la mort de sa mère. » (un an et huit mois exactement) -------------------------------------------------De M. S. Bern : « Camille Pelletan, le chirurgien qui a pris le cœur » (Philippe Jean Pelletan aurait-il changé de prénom ? ) --------------------------Et Mme Kaltenbach, bonne menagère également : « Il l'a mis dans un sac en toile cirée. » (Non, dans du son et dans un mouchoir !)
Pour finir, après la fable de la découverte d'un cœur sur un tas de sable, plusieurs jours après le sac de l'archevêché, on perd la trace de tout viscère au 19ème siècle. De la famille Pelletan (sans prénoms, par prudence) on passe directement à l'arrivée en 1975 d'une relique à St Denis, par le truchement des princesses Massimo.

La santé de Louis XVII

Ah, qu'en termes galants... Chandernagor : il se masturbait. Kaltenbach : il se tripotait.
Peut-on, Mesdames, vous rappeler que ce pauvre enfant s'était blessé en chevauchant un bâton en mai 1793, et qu'il a dû porter des suspensoirs très gênants jusqu'en octobre 1793 ? Le Dr Thillaud, quant à lui, met la charrue avant les bœufs : il a suivi le fil d'Ariane , mais à l'envers : puisque l'enfant du Temple est mort tuberculeux, c'est que Louis XVII l'était depuis 1792. Quod erat demonstrandum... Et la décharge donnée aux Simon le 19 janvier 1794 reconnaissant la bonne santé de l'enfant ? Et le témoignage du Dr Pipelet qui, sommé de dire que Louis XVII « avait un vice dans le sang » a témoigné « qu'il était parfaitement sain » ?

Suivons ensuite le mort du Temple au cimetière Ste Marguerite

Dr Thillaud : « Les ossements qu'on m'a confiés » Pourquoi, Docteur, n'avez-vous pas demandé une analyse ADN du squelette de Ste Marguerite ? Il est toujours temps d'essayer de convaincre les membres de la commission du Vieux Paris. Bonne chance !

M. Delorme, toujours égal à lui-même, ne rate pas une affirmation gratuite :
« Le crâne de l'Enfant de Ste Marguerite n'est pas un crâne d'adulte »

Quid du rapport du Dr Récamier en 1846 ? :
“ La tête et les os du tronc, les cheveux et les sutures des os du crâne semblent appartenir à un sujet moins avancé (que les membres et les dents) de douze ans environ, car le diamètre antéro-postérieur de la tête, n'étant que de six pouces, ne peut être celui de la tête d'un adulte”

Passons du cimetière aux recettes extraordinaires de conservation des cœurs
qui nous sont fournies par un jeune et talentueux paléo-pathologiste :
« Il y a une différence entre les cœurs embaumés au 18ème siècle, comme celui de Louis XIII (ce ne serait pas plutôt le 17ème siècle ?) et les cœurs desséchés. »

Soit on ouvre les deux ventricules, puis les deux oreillettes et on y met des aromates. Fin de la première recette. (si on s'arrête là, tout est pourri au bout de huit jours !)
soit, si jamais vous ne voulez pas ouvrir le cœur pour des raisons pratiques (Lesquelles ?) dans ce cas là, vous mettez des aromates tout autour et vous délayez (Quoi, le cœur ?) dans différentes solutions qui le déshydratent.

Ensuite on l'entoure de bandages qui laissent des traces (Non, sac en toile pour le cœur de Louis XIII) mais passons plutôt à la conservation des viscères sous la Révolution ? Fermez le ban.

Je voudrais dire un mot du cher Alain Decaux qui, surveillé de près par son auditoire, n'a pu que nous confier ses erreurs de jeunesse. Et pourtant, nous aurions aimé l'entendre parler d'une carrière bien remplie à la rechercche de Louis XVII.

Nous n'avons rien entendu d'autre, d'ailleurs, et surtout pas les opinions dissidentes. Ou plutôt, on a abrégé, et même mutilé leurs interventions. Parlez de tout ce que vous voulez à condition d'admettre la mort officielle du petit Roi du Temple. C'était pourtant le sujet en forme de point d'interrogation de cette émission racoleuse mais un sujet ô combien risqué pour les zélateurs de l'histoire officielle qui se recrutèrent et se recruteront toujours sous tous les régimes politiques.

NB : tous les sujets survolés ci-dessus ont déjà été traités in-extenso dans des articles de Laure de La Chapelle figurant sur ce site.

[NDLR Notre seule question au cher Alain Decaux aurait été : Qu'alliez-vous faire dans cette galère ? ... A moins que notre cher Alain Decaux y soit parfaitement à l'aise en toute connaissance de cause. Dans une émission typique de désinformation dont tous les invités sont de la même écurie et dont les dissidents ne sont cités que pour donner une apparente objectivité à l'ensemble et étayer une conclusion qui est donnée dans les toute premières minutes de l'émission, ont-ils au moins réellement profité de leur maigre temps de parole. Même pas et encore heureux s'ils n'apportent pas de l'eau au moulin des interrogateurs. D'ailleurs, comment être sûr de l'utilisation qui sera faite de votre séquence dans pareille démonstration de force ? Morale : point de participation hors du direct et encore, assortie de garanties. Mais trêve d'aigreur, M. S. Bern qui languissait dans cette attente, sera heureux d'apprendre que les résultats de la dernière analyse génétique sont annoncés pour mars 2008].


Dernière édition par Hercule le Ven 8 Avr - 11:03, édité 1 fois
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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Her Ven 8 Avr - 10:23

LES DEUX COEURS DE LOUIS XVII
Etude historique
par Laure de La Chapelle
Vice Présidente du Cercle d’Etudes Historiques Sur la Question Louis XVII

En préliminaire, afin de vous faciliter la compréhension de ce qui suit, l'auteur vous engage vivement à
consulter la page du même site "LA PREUVE" : http://www.museelouisxvii.com/preuve.htm.

AVANT-PROPOS
Peuple, reçois sans murmurer la nouvelle : en l’an 2000, la voix empressée des médiats, et accessoirement une nouvelle avancée de la science, ont enterré solennellement le mythe.
On s’assied sur le cercueil, on a enfin trouvé le cadavre, les successeurs peuvent respirer :

Le petit Capet est mort au Temple, c’est son coeur qu’on a tronçonné et analysé, l’erreur est impossible, toute autre expérimentation est superflue, il est même déconseillé de réfléchir davantage.
Nous autres, chercheurs besogneux d’une histoire souvent manipulée, avons pourtant contre vents et marées, repris notre bâton de pèlerin, en abandonnant les patientes découvertes qui levaient peu à peu les épais mystères de la Tour du Temple.
Car, à qui fera-t-on croire que le petit garçon rondouillard, charmeur et insupportable avait pu devenir en quelques mois cet efflanqué galeux, aux dents cariées et à la voix inaudible, dans la chambre duquel soupirent à l’envi Mademoiselle de Bourbon Parme et Madame Chandernagor ?

Il fallait donc quitter la Tour, ce monde où même la facture de l’artisan recelait des pièges, où la peur, le non-dit, et le mensonge étaient de règle, et suivre le destin d’un coeur vagabond.
Mais avions-nous vraiment changé d’univers ? Le mensonge et la manipulation étaient-ils restés aux portes du Temple ? Depuis l’analyse A.D.N. tout s’était-il miraculeusement éclairci ?
Partis avec une âme « fraîche et joyeuse » dans cette quête de la vérité avec, comme seule boussole, la phrase du professeur Cassiman « Il s’agit du coeur d’un parent de Marie-Antoinette, mais c’est aux historiens de démontrer que c’est Louis XVII », nous avons vu les évidences s’effriter, les vérités s’obscurcir, et une fois de plus, comme aurait soupiré Lenôtre, l’histoire de Louis XVII se retourner comme une peau d’anguille.

C’est cette enquête irritante que nous allons vous faire partager, et ce sont des conclusions inattendues que nous allons vous dévoiler. Nous suivrez-vous sur ce chemin ardu ? Ou resterez-vous sur la voie aisée du consensus médiatique, qui a décidé en avril 2000 que « la science avait parlé » ? Peu importe ce qu’elle disait du reste, ou ce qu’on lui faisait dire. Seul comptait l’effet d’annonce et ses retombées sur les promoteurs de cette affaire de coeur, qui ont sans doute cru faire avancer l’Histoire.
CHAPITRE 1

Il n’y a plus d’énigme Louis XVII
Ce fut l’étonnement, assez inégalement partagé d’ailleurs, puisque les radios avaient déjà vendu la mèche et qu’un prince des plus charmants débarquait de la péninsule ibérique pour honorer de sa présence la cérémonie.
Sous les lambris respectables du Musée de l’Histoire de la Médecine, on enterra donc une fois de plus, mais pour l’occasion, avec faste et caméras, le roi Louis XVII. La démonstration scientifique fut bien un peu rapide et les projections sur boiseries complètement déformées. Mais quoi, pour les amateurs peu éclairés que nous étions, cela devait suffire.
Et si le professeur Lucotte, seul auditeur présent spécialiste de biologie moléculaire s’était dit réservé sur ces résultats, dépourvus, selon lui, d’un certain nombre de paramètres mathématiques ; si même la revue Natural Genetics ne pouvait, d’après le professeur Cassiman lui-même, admettre cette expertise, peu importait : nous devions tout croire, puisque la presse avait la foi et nous invitait militairement à la partager.

La science confirme le verdict de l’histoire. Il n’y a plus d’énigme Louis XVII
(Philippe Delorme, 19 avril 2000)
Oui, mais? une pensée impertinente me revint à l’esprit presque aussitôt. Un de mes amis m’avait, par le plus grand des hasards, envoyé peu de temps auparavant un exemplaire de la Revue Rétrospective de 1894, publication dirigée par Paul Cottin.
Et à la première page de ce document, figurait un fac simile photographique du coeur remis en 1895 à don Carlos, duc de Madrid, et représentant l’organe prélevé à l’autopsie du petit Capet par le chirurgien Pelletan : ce coeur précisément dont les magazines nous montrèrent bientôt de superbes reproductions en couleurs et grand format.
Avant même de laisser la parole aux spécialistes, plusieurs différences s’imposaient à première vue :
L’urne contenant le coeur en 2000 avait été ouverte : le viscère était suspendu en partie basse par un mince fil de fer, alors qu’en 1895, le coeur frôlait le couvercle, et que la suspension était constituée d’un petit cylindre en cuivre.
Les quinze morceaux de cristal, restes de la première urne Pelletan, avaient disparu.
Le coeur analysé était plus petit que celui de 1895.
Et enfin, les deux ventricules, sensiblement égaux en 2000, présentaient cent ans plus tôt des différences radicales : à cette époque, le ventricule gauche était très développé, et le droit aplati et déformé.
Bientôt, l’analyse des témoignages médicaux aux deux époques considérées précisa ces premières constatations :
Le 15 décembre 1999, le docteur Pfeiffer, pratiquant une analyse anatomique au laboratoire d’analyses médicales Thierry Coté, 245 rue Lecourbe à Paris, constatait :
Que l’échantillon ressemblait à un coeur humain de petite taille, pouvant correspondre au coeur d’un enfant de 5 à 12 ans. Il mesure 6 x 3 x 2 cm et les tissus sont desséchés, contractés et de consistance pétrifiée. La couleur globale est marron .
La partie pendante de l’aorte fait 2 cm
La paroi du ventricule droit mesure 1mm d’épaisseur, alors que celle du ventricule gauche est de 2mm. Le lumen de chaque ventricule est large et dilaté.
On ne peut faire aucune observation sur les valvules, car celles-ci ne sont pas visibles.
Voilà qui est clair et précis.
Revenons en 1895, époque de la remise par M. Edouard Dumont, détenteur du coeur, au comte Urbain de Maillé, représentant en France les intérêts de Don Carlos de Bourbon. Quatre médecins furent convoqués pour examiner le coeur « Pelletan ». Il n’est pas inutile de remarquer que le docteur Jouin, avait été appelé le 22 juin 1895 en qualité de médecin de la famille de Maillé. Que le docteur Chevassus avait répondu à la demande de M. le Comte de Maillé et que le docteur Siredey avait vu le viscère chez M. le comte de Maillé, 24 rue de l’Université, le 29 juin (La Chronique Médicale, 1er novembre 1895).
Venons-en au docteur Martellière qui, lui, ne précise pas son mandant ; par contre, dans son article de la Chronique Médicale, il affirme la vérité de ce qui suit :
Ce coeur est à l’état de dessication absolue, par suite de l’évaporation de l’alcool dans lequel il a été plongé pendant de longues années et qui a assuré sa conservation.
Il mesure environ 8 centimètres de longueur sur 3 de largeur. Le ventricule gauche, dont on suit parfaitement la direction des fibres musculaires, forme un bourrelet de vingt-cinq millimètres d’épaisseur qui constitue la masse principale de l’organe, à laquelle est accolé le ventricule droit aplati et de moindre épaisseur.
L’aorte, coupée à deux centimètres de son origine, présente une section ovalaire de quinze millimètres sur sept.
A raison de l’exiguïté du volume des ventricules et de la dimension réduite de l’aorte, j’estime qu’il n’est pas permis d’attribuer ce coeur à un enfant âgé de plus de dix ans.
Il est superflu de faire remarquer que ce coeur, pourtant complètement desséché, a perdu le tiers de sa hauteur en cent ans, et que les ventricules sont redevenus semblables !
Le docteur Jouin rive le clou :

Dans l’enfance, et à dix ans particulièrement, le coeur gauche est beaucoup plus développé que le coeur droit quant au système musculaire . Or, cette disposition caractéristique est absolument évidente sur l’organe examiné.

De fait, si le ventricule gauche mesurait deux centimètres et demi, le ventricule droit n’avait plus qu’un demi centimètre de large.
Que penser des ventricules identiques observés en l’an 2000 ?
Last, but not least, le docteur Jouin ajoute : Les valvules sigmoïdes également sont les valvules d’un enfant.
Il faut supposer qu’à notre époque, le docteur Pfeiffer avait oublié ses lunettes, puisqu’elle précisait (voir plus haut) qu’on ne peut faire aucune observation sur les valvules, car elles ne sont pas visibles.

Au reste, les médecins convoqués par le comte de Maillé assurèrent avec un parfait ensemble que le coeur examiné par eux était bien celui d’un enfant, de 9 à 11 ans pour le docteur Martellière, 8 à 11 ans pour le docteur Jouin, d’une dizaine d’années pour le docteur Chevassus et, de 8 à 12 ans pour le docteur Siredey.
Mais déjà cette belle unanimité était battue en brèche dès la publication des certificats des quatre médecins.
La Chronique médicale de novembre 1895 posait immédiatement le problème sous le titre :
Le coeur de Louis XVII ( ? ) est-il le coeur d’un enfant ?

Et introduisait l’expertise d’autres spécialistes par la remarque suivante :

Quelle que fût l’assurance des termes de ces certificats, un doute nous est venu : est-il vraiment si commode, est-il même possible d’arriver à une telle certitude de déductions, quand on n’a à sa disposition qu’une pièce desséchée, racornie, tour à tour exposée à l’air libre et plongée dans l’alcool, et qui, de plus, a subi toutes les vicissitudes que l’on sait ?
Ces doutes , nous les avons soumis à des maîtres anatomistes dont nul ne songera, nous l’espérons, à récuser l’autorité, et tous, bien qu’interrogés séparément, nous ont fait la même réponse : il est impossible de déterminer l’âge d’un coeur qui a perdu tout caractère, toute conformation comme celui dont il s’agit, même en pratiquant des coupes ;
Il est donc permis de conclure que nos confrères, MM. les Drs Chevassus, Siredey, Jouin, Martellière, ont été tout au moins imprudents dans leurs téméraires affirmations, leur bonne foi et leur loyauté demeurant hors de conteste.
A notre demande, M. Marc Sée, membre de l’Académie de Médecine, très versé dans les questions qui ont trait à l’anatomie, répond en ces termes dépourvus d’ambiguïté.
Je ne crois pas qu’il soit possible, dans les conditions énoncées, de se prononcer sur l’âge d’un coeur.
Il doit y avoir une différence, à ce point de vue, entre le coeur d’un enfant et celui d’un vieillard. Mais cette différence est moindre quand on compare des sujets dont l’âge ne varie que d’une dizaine d’années.
Le professeur Tillaux, lui, pense que la question est insoluble.
Un autre membre éminent du corps médical - désirant garder l’anonymat - mais dont le chroniqueur dit qu’il a enseigné l’anatomie à des générations d’élèves et qu’il laissera derrière lui une monumentale oeuvre scientifique, s’exprime en ces termes :
Au début de ma carrière, on se servait encore d’un mélange à parties égales d’alcool et d’eau qui rétractait considérablement les tissus. Vraisemblablement, c’est le liquide qu’aura employé Pelletan. Frappé de cet inconvénient, j’ai substitué au mélange hydro-alcoolique une solution saturée d’acide arsénieux, additionnée de 1/10 d’alcool. Cette solution est avantageuse, parce qu’elle rétracte à peine les tissus, pour ainsi dire pas du tout .
En tout cas, il me paraît impossible de dire qu’un coeur qui a été plongé tour à tour dans l’alcool et laissé à l’air libre est un coeur d’enfant ou d’adulte.

Voilà ce que disait un éminent anatomiste du traitement de conservation de l’époque révolutionnaire, procédé qu’il avait connu et perfectionné. Il faudra s’en souvenir, car d’aucuns ont pensé et écrit qu’on avait pu « embaumer » les coeurs en 1795 comme au 17ème siècle !
Le coeur de l’Enfant du Temple, ou d’autres coeurs comme, par exemple, celui du premier Dauphin peu de temps auparavant, ont donc subi, selon la consultation que nous venons de citer, un traitement à parties égales d’alcool et d’eau.
C’est s’aventurer beaucoup que d’affirmer, même à notre époque, que le viscère dont on a analysé l’A.D.N. était celui d’un sujet très jeune.
Et pourtant, le docteur Pfeiffer n’a pas hésité à dire que ce coeur était celui d’un enfant de 5 à 12 ans. Sans mettre en doute ses connaissances sur le procédé de conservation d’un viscère il y a deux cents ans, il me semble que la question reste posée.
CHAPITRE 2
Pelletan : sa personnalité, son histoire

La controverse qui s’éleva en 1895 sur le coeur prélevé par le docteur Philippe Jean Pelletan nous ramène inévitablement à celui qui fut à l’origine de toute l’affaire.
Qui était donc ce médecin, désigné à la mort de l’Enfant du Temple pour pratiquer l’autopsie, conjointement avec ses confrères Dumangin, Lassus et Jeanroy ?
Philippe Jean Pelletan naquit à Paris et fut baptisé en l’église St Jacques de la Boucherie le 5 mai 1747. Il était fils de Jean Pelletan, maître chirurgien, membre du Collège et de l’Académie Royale de Chirurgie, et de Anne Jeanne Davau, et avait un frère et une soeur, Henri Augustin et Anne Elisabeth, tous deux témoins à son premier mariage en 1777.
Le premier février de l’an 1777, Philippe Jean Pelletan épousait donc en l’église St Séverin à Paris Elisabeth Julie DUBUS ; le contrat de mariage avait été reçu par Me Caiez, le 25 janvier précédent.
Il faut remarquer parmi les témoins au contrat la présence d’Aignan Joseph SIGAUD, sans doute proche parent de Bernard Prosper SIGAUD, également médecin, et qui aurait avoué à Fabre d’Olivet après la Révolution avoir empoisonné l’Enfant du Temple en 1795.
De ce mariage avec Elisabeth Dubus, naquit le 6 janvier 1782, un fils, Pierre Pelletan.
A cette époque, Philippe Jean Pelletan demeurait à Paris, 10 rue St Christophe , actuellement Parvis Notre Dame : c’est une adresse essentielle à noter, car cette maison reviendra après sa mort à son héritier légitime et successeur, son premier fils, Pierre, qui y déposera un coeur après le sac de l’Archevêché en 1830.
Elisabeth Julie DUBUS étant décédée le 6 janvier 1787, Philippe Jean Pelletan se remaria en l’an III avec Denise Françoise VERCUREUR, (Contrat reçu par Me Petit le 28 pluviôse an III), non sans avoir eu entre temps un enfant naturel Gabriel Pelletan, né le 10 janvier 1792, lequel jouera, à part égale avec son demi-frère Pierre, un grand rôle dans cette histoire.
De sa seconde épouse, il eut une fille, Elisabeth Françoise, née le 22 juin 1797, restée célibataire et qui vécut avec son père ; elle habitait avec lui rue St André des Arts et après sa mort qui survint le 22 février 1868, elle fut enterrée également dans la tombe paternelle, au cimetière de Bourg-la-Reine.
Elisabeth Françoise Pelletan fit son testament le 28 janvier 1864, (Déposé chez Me Corrard , notaire à Paris, le 22-02-1868), instituant son demi-frère Gabriel légataire universel de ses biens, dont une maison héritée de sa mère rue de Grenelle Saint Honoré, n° 44.
Par ces dispositions singulières, elle déshéritait donc son demi-frère légitime, Pierre Pelletan, avantageant ainsi Gabriel Pelletan, l’enfant naturel de son père.
Philippe Jean Pelletan, domicilié sous la Restauration 41 rue St André des Arts, avait acheté une résidence secondaire à Bourg-la-Reine, où il mourra le 26 septembre 1829 (Scellés après décès du 27 septembre 1829, inventaire dressé par Me Lambert de Sainte Croix les 7 et 8 octobre 1829). Après ces quelques mentions sur sa biographie personnelle, voyons quel fut « l’homme public » Philippe Jean Pelletan, Professeur à la Faculté de Médecine de Paris, Chirurgien en chef de l’Hôtel-Dieu , Membre de l’Institut et de l’Académie de Médecine.
Philippe Delorme, dans son livre Louis XVII, la Vérité nous le décrit comme un médecin consciencieux, dévoué, laborieux, honnête, une victime de la vie, en quelque sorte, ni heureux, ni riche, tout ceci d’après une notice biographique d’Isidore Bourdon, célèbre inconnu de 1863.
Les contemporains en eurent une toute autre idée.
En 1786, il postule pour le poste de professeur de l’Ecole de Santé. Desault est nommé à sa place. Pelletan est très déçu, car c’est un ambitieux. Egalement arriviste, il entend supplanter tous ses collègues et aura de nombreux démêlés avec les uns et les autres, particulièrement avec Dumangin et Dupuytren.
En 1789, il s’enflamme pour les idées de la Révolution, est élu chirurgien-major de la Garde Nationale la même année ; dans l’enthousiasme révolutionnaire, il fait don à l’Assemblée Nationale de sa première année de traitement (in La Dynastie Médicale des Pelletan, Archives du Musée d’Histoire de la Médecine). Par la suite, il sera nommé au grand Hospice de l’Humanité (Hôtel-Dieu). C’est lui qui sera requis pour constater la mort de Marat.
Mallet du Pan, le publiciste suisse bien connu, écrit de lui en 1795 :
C’est un révolutionnaire féroce, qui servait d’espion au Comité de Sûreté Générale. Il formait dans la prison Saint Lazare des listes de victimes à guillotiner.
Autres temps, autre discours sous Bonaparte, Pelletan s’enflamme, mais cette fois pour le héros qui nous gouverne :
- Puis-je oublier l’honneur insigne d’avoir siégé auprès de ce grand homme ? Je l’admirais en silence : aujourd’hui, l’univers célèbre sa gloire et l’humanité entière jouit de ses bienfaits. Puisse son heureuse postérité égaler en nombre les étoiles du firmament ? (Préface de la Clinique Chirurgicale. Delorme, op. cit, p.126).
Sous l’Empire, il devient chevalier par lettres patentes du 16 décembre 1810 et chirurgien consultant de l’Empereur ; il est professeur à la Faculté de Médecine, membre de l’Institut et de l’Académie des Sciences, et concourt même à faire nommer Bonaparte membre de cette dernière institution.
Vae Victis ! le vent de l’histoire tourne et Pelletan ne manque pas de le suivre :
Après les Cent Jours, cette inconcevable catastrophe, Napoléon n’est plus qu’un usurpateur extravagant (in La Revue Rétrospective pp. 156 sqq. et 179).
En 1814, les essais de justification de son attitude pendant la période révolutionnaire (Préliminaire de son Mémoire) ne sont guère convaincants, même s’il essaye de se créer à posteriori un personnage de médecin de la nature, préférant toujours les plus malades ou les plus nécessiteux.
A la première Restauration, des erreurs de diagnostic relevées par Dupuytren entravèrent sa carrière : il échoua dans l’opération d’un ostéosarcome le 21 octobre 1814. Plus grave, se présenta en 1815 à l’Hôtel-Dieu un officier russe, assez proche du tsar Alexandre par ses fonctions ; il avait reçu un coup de fourche dans le haut de la cuisse ; Pelletan l’examine, trouve un foyer au-dessus de l’arcade crurale, et prompt à décider, l’ouvre d’un large coup de bistouri. Un large flot de sang inonde et aveugle le chirurgien. Pelletan croyait avoir affaire à l’artère iliaque et nous n’étions pas familiarisés alors en France avec la ligature des grandes artères (Récit de Lisfranc). Pelletan ne put arriver à arrêter l’hémorragie.
Il avait perdu la tête ; il entassa dans la plaie charpie sur charpie, la poussant jusque dans l’abdomen. Le malade mourut quelques heures après.
Dupuytren raconta l’aventure à sir James Wylie, médecin du tsar Alexandre. On fit une enquête et le 6 septembre 1815, par décision du Conseil Général des Hospices, Pelletan cessait d’être en activité de service à l’Hôtel-Dieu.
Retour à la Tour du Temple
Revenons avec le corps médical à la Tour du Temple. En mai 1793, le petit Louis Charles était tombé malade, et l’on nous dit que le docteur Thierry de Bussy prescrit un traitement anti-scrofuleux, (Delorme, op. cit. p.12). Voilà qui augure mal de l’avenir du malade et permet de préparer le lecteur à une mort par tuberculose. Malheureusement, ce n’est pas le sens qu’il faut donner aux prescriptions du Dr Thierry, et c’est un médecin actuel, le Dr Descamps, qui va nous interpréter les factures de l’apothicaire Robert pour mai et juin.

(Docteur Jacques Descamps, L’Enigme du Temple, 1975).
Le petit lait clarifié fait fonction de laxatif très léger et de vaccinothérapie intestinale. Le miel à haute dose (une livre) a un pouvoir laxatif puissant ; la médecine composée (séné, coriandre, sel de Glauber) est un laxatif à actions multiples. Les baies de genièvre sont des diurétiques. Le bouillon médicinal avec terre foliée minérale (acétate de soude) est à même visée thérapeutique.

Depuis quand les laxatifs soignent-ils la tuberculose ?
Le petit roi est atteint de constipation, ce qu’explique le manque d’exercice. Bien au contraire l’enfant du Temple souffrira d’une extrême faiblesse due à une diarrhée chronique.
C’est du moins ce que déclarera le docteur Pelletan à M. Pasquier, garde des sceaux, en 1817. Après avoir affirmé faussement au chancelier qu’il a soigné l’enfant pendant la maladie de Desault, alors qu’il est nommé seulement le 17 prairial de l’an II, (5 juin 1794) soit 5 jours après la mort de Desault et trois jours seulement avant la mort de l’Enfant du Temple, il ne met aucun empressement à se rendre à la Tour et écrit aux gardiens :

Citoïens, L’état du malade ne peut être rendu très inquiétant par les circonstances que vous me détaillez ? Quoique je sois extrêmement fatigué de mes travaux du jour, et qu’il soit onze heures du soir, je me transporterais sur le champ auprès de l’enfant, si je sçavois lui être de la moindre utilité.

C’est ce médecin perspicace qui sera chargé de l’ouverture du corps le 21 prairial de l’an II avec trois collègues : Dumangin, Lassus et Jeanroy.
L’autopsie officielle a-t-elle un caractère plus véridique ?
On peut en douter lorsqu’on lit dans le Mémoire écrit par Pelletan et publié en 1894 par la Revue Rétrospective :
Il fallut attribuer les engorgements du ventre et autres à un vice scrofuleux, ainsi que quelques autres dispositions physiques qu'il fallut taire.
En 1817, il affirmait au contraire à M. Jacquinot de Pampelune : Ce procès-verbal décrivit d’une manière exacte les engorgements du ventre et les tumeurs extérieures auxquels la mort a été justement attribuée et qui tenaient à un état scrofuleux.
Quand donc Pelletan dit-il la vérité ?
Au moins est-on sûr qu’il a bien prélevé le coeur, comme il l’affirme dans une déclaration entièrement écrite de sa main :

Nous nous réunîmes (lui et ses trois collègues) le lendemain 9 juin pour procéder à l’ouverture, et le procès-verbal fut dressé, contenant la vérité la plus exacte et portée jusqu‘au scrupule (sic) .
Etant particulièrement chargé de l’opération de l’ouverture et de la dissection, l’on m’abandonna de même le soin de restaurer le corps et de l’ensevelir. Mes confrères et le commissaire de la municipalité (le sieur Damont) ainsi que le concierge de la maison (le citoyen Lasne) qui avaient été présents à l’ouverture, s’éloignant de la table et causant entre eux, je me hasardai à m’emparer du coeur de l’enfant ; je l’entourai de son, l’enveloppai d’un linge et le mis dans ma poche, sans être aperçu. J’espérais bien qu’on ne s’aviserait pas de me fouiller en sortant de la maison. (Musée de la Préfecture de Police, Paris)

Sous la Restauration, cette déclaration sera agrémentée d’un lot de détails supplémentaires (Déposition à Jacquinot de Pampelune en 1817) qui suscitèrent de vives protestations chez les témoins présents à l’autopsie.
Dumangin, l’autre chirurgien nommé la veille de la mort de l’enfant, intervint énergiquement :

Si j’eusse été présent lors de la rédaction que j’ai sous les yeux, vous auriez eu grand embarras à détailler vos reproches aux gardiens, vos discours et le baiser que je ne vous ai pas vu poser sur la main du roi mourant ?
Vous avez cru, Monsieur, pouvoir accuser sans inconvénient de distraction, moi et MM. Jeanroy et Lassus au moment où vous dites avoir soustrait une partie précieuse du jeune roi. Qu’aviez-vous donc à redouter de ma part et de celle de nos confrères ? Rien.
Ce qui aurait pu vous déterminer, n’était-il pas plutôt l’oeil des gardiens, retirés dans un coin de la chambre ?
Votre conduite vous rend coupable, j’ose le dire, de la faute grave d’avoir négligé des témoignages qui laissent subsister un doute sur un point de fait de cette importance. (A. de Saint Gervais, Preuves authentiques ?).

Bon prince, Dumangin déclarera qu’il a vu Pelletan mettre quelque chose dans sa poche, sans pouvoir préciser ce que cela pouvait être.
Le gardien Etienne Lasne, dont on ne sait s’il était dans une embrasure de fenêtre ou dans un coin de la chambre, protesta tout aussi vigoureusement. Beauchesne en témoigne :

Le coeur ne fut pas déposé à Saint Denis. Les premiers doutes revinrent et prévalurent, confirmés surtout par les énergiques déclarations de Lasne, qui avait assisté à l’autopsie et qui n’avait pas, disait-il, quitté un seul instant des yeux l’opérateur.
la vivacité d’un honnête homme qui a bien vu ce qu’il a vu , et qui se sent le droit de rectifier une assertion erronée.

Le commissaire Damont n’en vit pas davantage. Et pourtant, il bénéficia d’un autre prélèvement de Pelletan :

Le sieur Damont, officier municipal, qui assistait à l’ouverture du corps, me pria de lui donner une poignée de cheveux ; ce que je fis avec les précautions nécessaires en pareil cas, et à la condition de m’en rendre la moitié : je ne réclamai pas cette moitié, ayant le coeur en ma possession. (Mémoire de Pelletan)

Il ne faut pas, une fois encore, être dupe de Pelletan, puisque Lafont d’Aussonne, historien de Marie Antoinette, rapporte en 1836 (Mémoires secrets et universels des malheurs et de la mort de la Reine de France) :

Le docteur Pelletan, qui avait présidé à l’autopsie, possédait et m’a montré le coeur du jeune roi Louis XVII et sa jolie chevelure blonde. Pelletan fils possède ces tristes dépouilles en sa maison, près de la cathédrale de Paris.

On comprend, après toutes ces palinodies, que la famille royale et le gouvernement aient fortement douté des affirmations de Pelletan et de l’authenticité du coeur.
Premières péripéties du coeur

Quelle que fût l’origine de ce coeur, Pelletan affirma qu’il avait été dérobé dans le tiroir de son bureau, où il l’avait rangé après l’avoir traité jusqu’à dessication complète et où il voisinait avec d’autres échantillons anatomiques. Il accusa du vol un de ses élèves, M. Jean Henry Tillos.
Dérobé, est-ce bien exact ?
Encore une fois, Pelletan déforme la vérité. En fait, il semble que, sous l’Empire, ne sachant trop que faire de ce viscère, si tant est qu’il l’ait prélevé, il l’ait confié à son élève qui venait de se marier ( le 29 janvier 1810 ) en précisant que c’était le coeur de Louis XVII.
Le malheureux Tillos mourra de phtisie pulmonaire deux ans plus tard (le 15 septembre 1812) mais apparemment, sans rien recommander à sa femme. Pourquoi l’aurait-il fait d’ailleurs ? L’élève craignait son maître et n’était sans doute entré en possession du coeur qu’avec son accord.
Deux ans plus tard encore, sous la Restauration, c’est une autre chanson !
Pelletan vit aussitôt le parti à tirer du coeur et exigea de la famille Tillos qu’il lui soit rendu ;
Le beau-père de Tillos, M. Guidon, s’exécuta, mais en demandant au chirurgien une décharge par écrit : il aurait été parfaitement capable, en effet, de poursuivre la famille de son élève pour vol. Voici le texte de cet acte de complaisance (ce sont les propres termes de Pelletan) :

Je reconnais avoir reçu des mains de Madame la veuve Tillos le coeur du dauphin dernier, mort dans les Tours du Temple, ayant donné des soins à ce précieux enfant pendant les vingt derniers jours de sa vie ( sic ) et ayant été chargé de faire l’ouverture de son corps, j’en avais extrait le coeur, soit comme l’objet de mes respects, soit dans l’espérance de le représenter un jour et M. Tillos étant alors mon élève intérieur, s’est trouvé chargé de surveiller la conservation de cet objet précieux.

La version d’un vol du coeur proclamée plus tard par Pelletan, ne résiste pas à l’examen des dates !
Que ce soit par l’intermédiaire du vicomte de Montmorency ou de M. de Chateaubriand, les offres de cet objet précieux à la famille royale furent constamment éludées ou repoussées ; le médecin commença par se plaindre :

On doit s’occuper de l’exhumation des restes de l’illustre enfant, et je ne suis pas même un des commissaires désignés, quoique personne ne soit plus capable que moi de reconnaître ces précieux restes.

Et là, on ne peut que donner raison à Pelletan ! Mais ses griefs ne s’arrêtèrent pas en si bon chemin :

J’ai la certitude que sa Majesté a connaissance du fait principal qui nous occupe et je reste dans l’embarras de savoir que faire des précieux dépôts qui sont entre mes mains.
Il n’y a qu’une intrigue obscure qui puisse éloigner le résultat de mes démarches. Je m’abstiens de la dénoncer ouvertement et me contenterai du mépris qu’elle doit inspirer, dans l’espérance qu’enfin la vérité parviendra à se faire connaître. (Signé : le chevalier Pelletan, le 13 juin 1816).

Deux ans plus tard, le médecin, devenu agressif, n’hésita plus à dénoncer :
Dans des Notes écrites pour Madame la marquise de Talaru le 30 novembre 1818 (publiées par la Gazette Hebdomadaire de Médecine et de Chirurgie le 15 juin 1877), Pelletan accusa Dupuytren d’avoir contrefait son écriture dans une lettre adressée au duc de Duras et contenant des injures contre le père Elisée, chirurgien du Roi, qui lui aurait voué en conséquence une haine complète.
Décidément atteint de la manie de la persécution, Pelletan ajoute que deux billets anonymes et injurieux, adressés au doyen de notre Faculté, présentent encore la contrefaçon de mon écriture…
Et ne s’arrêtant pas en si bon chemin, il se livra à des insinuations malveillantes sur l’attitude de Louis XVIII :

Enfin, on ne craint pas de dire que Sa Majesté se prononce ouvertement pour exiger l’oubli des malheurs dont nous avons été moins cause que victime.
Qui ne reconnaît dans cette volonté l’indulgence et l’amour de la paix qui caractérisent le coeur de Sa Majesté ? n’est-ce pas le comble de la malveillance et de la mauvaise foi que d’étendre cette volonté bienfaisante de Sa Majesté à l’oubli des devoirs les plus sacrés à rendre à son illustre et infortuné prédécesseur ?
Tandis que les méchants calomnient ainsi les sentiments de Sa Majesté, ils ne laissent pas que de faire remarquer dans le public que l’on néglige un précieux dépôt qui constaterait seul la mort de Louis XVII, et nous mettrait à l’abri des prétentions criminelles et absurdes du premier intrigant qui voudrait se faire reconnaître pour la jeune victime du Temple.
Eh ! ne m’accuserait-on pas moi-même d’être un de ces intrigants, en ne reconnaissant pas l’authenticité du dépôt que je présente ?

A la vérité, Pelletan prononçait là des paroles prémonitoires ?
Apparition d’un deuxième coeur

En 1817, pourtant, le Ministère de l’Intérieur s’occupait de rassembler pièces et documents pouvant constater l’authenticité du coeur Pelletan.
Une première liste, établie par Chanoine-Davranches d’après la déposition du médecin de mars 1817 devant Etienne Denis Pasquier, Garde des Sceaux, comprend :
1° L’arrêté du Comité de Sûreté Générale du 17 prairial an III par lequel ledit sieur Pelletan a été nommé pour donner des soins à S.M. Louis XVII.
2° La lettre du même jour écrite par le Secrétaire Général de ce Comité et portant envoi de l’arrêté cy-dessus au sieur Pelletan.
3° La lettre du même Comité en date du 20 prairial, portant l’autorisation de placer une garde-malade près du roi.
4° La lettre par laquelle le Secrétaire Général a fait, le même jour, envoi de la précédente pièce au sieur Pelletan.
5° L’ordre donné par le Comité de Sûreté Générale le même jour 20 prairial , pour autoriser l’ouverture du corps.
6° Le procès-verbal dressé le lendemain 21 prairial, à l’effet de constater cette ouverture et signé Dumangin, Ph-J. Pelletan, Lassus et H. Jean Roy.

La liste définitive, en provenance du Ministère de l’Intérieur, porte l’en-tête suivant :

Etat des pièces constatant que le coeur de S.M. Louis XVII a été réellement conservé et existe encore aujourd’hui.

Cet état comporte deux pièces supplémentaires :

7° Procès-verbal de l’audition des témoins, d’où il résulte que le coeur conservé chez le sieur Pelletan est effectivement le coeur de S.M. Louis XVII.
8° Certificat du sieur Pelletan, où il reconnaît avoir reçu de la dame veuve Tillos le coeur par lui conservé de ce jeune Prince.

Ces huit pièces ont été envoyées au marquis de Dreux-Brézé, grand maître des cérémonies, par le Ministre secrétaire d’Etat de l’Intérieur.
La lettre du ministre est datée du 3 septembre 1817. Ce même jour, le même ministre confirmait dans une lettre au Garde des Sceaux, que le coeur de S.A.R. le Dauphin, fils aîné du Roi Louis XVI, se trouvait dans les mains du maire du 12éme arrondissement (5éme arrondissement actuel).

Cette découverte était stupéfiante !
En effet, tous les coeurs royaux déposés au Val de Grâce furent profanés en 1793 par la tourbe révolutionnaire ; comment le coeur du fils aîné du Roi Louis XVI et de la Reine Marie Antoinette avait-il pu en réchapper ?

Le 4 juin 1789, mourait au château de Meudon Louis Joseph Xavier François de France, Premier Dauphin, âgé de 7 ans, 3 mois et 12 jours.
Le procès-verbal d’autopsie (01 /1052) révélait une tuberculose osseuse très étendue ; mais les neuf éminents praticiens qui signèrent le document : Lemonnier, Vicq d’Azyr, Brunier, Petit, Lassonne, Andouillé, Loustaunau, Blanquier et Chavignat, notèrent que le coeur était sain, ce qui est d’une importance certaine pour la suite de cette étonnante histoire.
Que devint ce coeur , qui avait été transporté nuitamment au Val de Grâce le 12 juin 1789, par les mains du Cardinal de Montmorency et du duc de Chartres (futur Louis Philippe) ? C’est ce que nous apprend un rapport du Ministre de l’Intérieur en 1817.
RAPPORT AU ROI
Sire ,

Il vient d’être fait remise au Maire du 12ème arrondissement de Paris, par un sieur Thévenin, qui en était dépositaire, du coeur de S.A.R Mgr le Dauphin, fils aîné de S.M. Louis XVI.
M. le Préfet de la Seine en me donnant cet avis, me transmet les renseignements qu’il assure avoir été recueillis avec le plus grand soin par M. le Maire.
En brumaire de l’an 2 (octobre 1793), lors de la spoliation des tombeaux de la famille des Bourbons, au Val de Grâce, un sieur Legoy, Secrétaire du Comité de l’Observatoire assistant à cet enlèvement, recueillit un coeur, qui, suivant l’indication gravée sur la double enveloppe de plomb et de vermeil dont il était recouvert, était celui de S.A.R. Mgr le Dauphin, Louis, Joseph, Xavier, François, fils aîné de S.M. Louis XVI, né à Versailles le 22 octobre 1781 et mort à Meudon le 4 juin 1789.
Dans la crainte d’être inquiété à raison de ce dépôt, comme fonctionnaire public, le sieur Legoy le remit à son père.
Au décès de ce dernier, arrivé le 1er avril 1811, ce dépôt resta entre les mains de sa veuve.
Enfin, d’après l’intention plusieurs fois manifestée et jamais réalisée de la part de la dame Legoy de confier ce dépôt au sieur Guichard son voisin, la femme Malèvre, femme de confiance de cette dame et parente du sieur Thévenin détermina sa maîtresse, peu de temps avant son décès à le remettre au sieur Thévenin dernier détenteur.
Ces faits paraissent ne devoir laisser aucun doute sur l’origine et la sincérité de ce dépôt.
J’ai l’honneur de prier S.M. de vouloir bien me donner ses ordres à ce sujet .

Le sieur Legoy était bien secrétaire-greffier du commissaire de police de la section de l’Observatoire. (A. Soboul. Répertoire du personnel sectionnaire parisien de l’an II )
Quant au coeur de Louis Joseph, il était contenu dans une boîte de plomb en forme de coeur, comme le montre l’étiquette en cuivre arrondie qui la recouvrait et qui est conservée au Musée Crozatier, au Puy-en-Velay. Le tout protégé par un reliquaire en vermeil (argent doré) ainsi que le précise ce rapport.
En dépit de ces débuts d’enquête administrative, aucune décision ne suivit et le silence retomba sur les deux reliques.
CHAPITRE 3
Les coeurs à l’Archevêché

Malgré toutes ses démarches et les assurances successives qu’il crut obtenir, Pelletan n’aboutit à rien. Et pourtant ?
En 1817, le ministre secrétaire d’Etat à l’Intérieur écrivait au Garde des sceaux :

L’intention du Roi était que le coeur de ce prince ( Louis XVII ) et celui de S.A.R. le Dauphin, fils aîné du Roi Louis XVI, qui se trouve dans les mains du maire du 12ème arrondissement, soient transportés à Saint Denis sans pompe et néanmoins avec les cérémonies convenables...

Plus tard, c’est l’archevêque de Paris, Mgr de Quelen, qui assure à Pelletan :

Qu’on devait très incessamment rendre au culte l’église du Val de Grâce et y faire la bénédiction ; que le projet était d’y placer le coeur du frère aîné de Louis XVII, qu’un avocat qu’il me nomma avait heureusement conservé (le sieur Thévenin ?) et que son intention et celle de M. de Clermont Tonnerre (ministre de la Guerre) étaient d’y faire placer en même temps le coeur de Louis XVII.

La cérémonie au Val de Grâce eut lieu, en avril 1826, mais aucun coeur n’y fut placé, comme le constata amèrement Pelletan qui avait été invité.
(Le caveau des Bourbons de cette église ne renferme toujours aujourd’hui que deux coeurs, celui du chirurgien Larrey et celui d’une Anglaise, miss Damby.)
Il faut remarquer que dans tous les projets de cérémonies funéraires, les sorts des coeurs des deux frères royaux étaient toujours liés ;
Nous allons pouvoir constater qu’ils le restèrent.

Désespéré de ne pas aboutir, Pelletan finit par obtenir de l’archevêque de Paris, Mgr de Quelen, qu’il accepte le dépôt de son coeur à l’archevêché , accompagné d’un Mémoire justificatif.
La décharge qu’en donna Hyacinthe de Quelen à Madame Pelletan le 23 mai 1828 est un document important :

Je, soussigné, reconnais avoir reçu comme un dépôt sacré, un vase de cristal rempli d’esprit de vin, renfermant un coeur desséché, que M. Pelletan assure par serment être celui du jeune roi Louis XVII, lequel coeur avait été soustrait et conservé par lui, ainsi qu’il en a tracé l’histoire dans un Mémoire qu’il m’a aussi remis.
Ce vase est composé de deux parties : la partie inférieure, semblable à un verre à pied, est garnie, au pied, d’un cercle de vermeil élaboré. Sur les deux côtés du vase, sont gravés, d’un côté, le chiffre de Louis XVII, surmonté d’une couronne royale ; de l’autre, un coeur entouré de rayons. La partie supérieure se compose d’un couvercle, aussi de cristal, surmonté d’un cercle formant couronne, sur laquelle sont gravées dix-sept étoiles , et d’un bouchon orné d’une fleur de lys de vermeil ;
Ces deux parties sont réunies par un cercle de vermeil dentelé en la partie supérieure, qui semble sceller l’endroit où les deux parties se rapprochent . L’une et l’autre partie sont enfin réunies par un ruban blanc de soie, scellé du cachet de M. Pelletan, qui empêche d’ouvrir le bocal.
M . Pelletan se trouvant indisposé, et ayant d’ailleurs épuisé tous les moyens qui étaient en son pouvoir pour remettre ce dépôt à la famille royale, m’a prié de le recevoir, mais je ne le reçois qu’à condition que je pourrai moi-même le rendre au roi, et je promets, si je ne puis réussir, de remettre ce dépôt à M. Pelletan ou à sa famille.

En mai 1829, peu de temps avant la mort de Pelletan, Mgr de Quelen , embarrassé par ce dépôt, demanda au roi Charles X de bien vouloir ordonner une enquête (La confiance ne régnait toujours pas au sujet du médecin) et de faire déposer le coeur soit à Notre-Dame, soit à Sainte Geneviève, soit à Saint Louis. Notez qu’il n’est pas question de Saint Denis ou du Val de Grâce, qui accueillaient les dépouilles royales.
Il n’y eut aucune décision de la Cour. Que devint le coeur du Premier Dauphin ?
Il avait très probablement précédé le coeur Pelletan à l’Archevêché.

Entrée en scène du petit neveu de Monseigneur de La Fare
.
C’est ce que nous apprend un certain Maurice Pascal dans un article publié dans un supplément du Littoral de la Somme du 16 novembre 1895 :

Il est inutile de faire remarquer, qu’au moment de la Restauration, après une longue et minutieuse enquête ; sur les désirs de Charles X et de la duchesse d’Angoulême, le Coeur fut déposé entre les mains de monseigneur de Quelen, archevêque de Paris ;
or, en cela le Coeur Royal ne faisait que suivre la même filière que suivait le Coeur de son frère, le Dauphin, premier fils de Louis XVI, décédé le 4 juin 1789.
Dans la bibliothèque de l’Archevêché, le Coeur de Louis XVII y rencontra le coeur de son frère aîné ; et si tous deux furent déposés en cette bibliothèque, et non en la chapelle de l’Archevêché, c’est qu’ils s’y trouvaient en plus grande sûreté et en plus grande discrétion, en attendant que la Décision Royale leur assignât à chacun, avec les cérémonies, honneurs et prérogatives qui leur étaient dus, un lieu de repos distinct, suivant le rang plus ou moins élevé que l’histoire leur avait attribué ; car si l’un des deux frères n’avait été qu’héritier, l’autre avait régné ?

Discrétion, voilà le maître mot de cette affaire de coeurs : et le souci continuel de ne rien révéler entraînera une cascade de conséquences imprévisibles, jusque, et y compris, à l’époque actuelle.
Revenons à Maurice Pascal, qui, lui, entr’ouvrit - très légèrement, il est vrai - ce rideau de discrétion.
Il était le fils de Louis Marie Pascal, notaire à Paris (Etude XCIV) de 1866 à 1875, ancien collègue et ami de Maître Barre, lequel prendra une place prépondérante dans l’histoire du coeur Pelletan dans la seconde moitié du 19ème siècle. Mais une autre parenté apparaît plus significative :
M. de Reiset, dans un article du Gaulois de 1906, nous en apprend en effet davantage sur la personne de Pascal :

Enfin, quand on a invoqué le nom du Cardinal de La Fare pour prétendre que la duchesse d’Angoulême lui avait avoué à sa dernière heure, que son frère n’était pas mort au Temple et qu’il s’était évadé, on a commis une nouvelle et grave inexactitude . Le cardinal est mort longtemps avant sa royale pénitente, ce qui suffit à couper court à toute discussion. Mais en outre, le petit neveu de Mgr de La Fare, M. Maurice Pascal, qui est en possession de tous les papiers de son grand-oncle, m’a affirmé de la façon la plus formelle que le cardinal n’avait jamais rien dit ni écrit qui pût faire supposer qu’à aucune époque il eût reçu de la duchesse d’Angoulême pareille confidence, ni qu’il eût ajouté foi à l’authenticité d’aucun des nombreux faux dauphins.

Petit neveu et héritier du confesseur de la duchesse d’Angoulême, Maurice Pascal était certainement très bien placé pour savoir comment la belle-fille de Charles X avait décidé, de concert avec le roi, de disposer du coeur du premier Dauphin.
Et tant pis si le petit neveu ignorait les confidences faites par son grand oncle, sous la Restauration , au général d’ Andigné, qui les révéla dans ses Mémoires (publiés, très tard, il est vrai, en 1901 chez Plon) :

Sous la Restauration, j’en parlai au cardinal de La Fare, archevêque de Sens ; il me répondit que madame la Dauphine était persuadée que son malheureux frère n’était pas mort au Temple, et qu’ainsi nous ne pourrions que renouveler ses douleurs sans la convaincre.


La route des deux coeurs se sépare : le sac de l’Archevêché de Paris en 1830

Le 29 juillet 1830, une tourbe de plus de deux mille émeutiers investissait les bâtiments de l’Archevêché, situé à l’emplacement actuel du square Notre-Dame. Persuadés d’y trouver des Jésuites et des fusils, ils enfoncèrent les portes des caves, pénétrèrent dans les appartements , forcèrent les meubles, s’emparèrent de l’argent, du linge, des vêtements, et commencèrent à briser glaces, cheminées, poêles, boiseries, portes et fenêtres.
Les livres des bibliothèques et les archives, plus ou moins déchirés, furent précipités dans la cour et les pillards allumèrent un feu sur le quai.
Laissons la parole à Limouzin-Lamothe (Vie de Mgr de Quelen) :

Pendant la dévastation, M. Desportes, administrateur de l’Hötel-Dieu, (dont les bâtiments étaient contigus à ceux de l’évêché) envoya deux de ses employés pour lui rendre compte de ce qui se passait. Ils essayèrent , mais en vain, de faire entendre raison aux émeutiers et signalèrent surtout que le feu, allumé sur le quai par les pillards et entretenu constamment par les objets que l’on y jetait, risquait d’incendier les bâtiments et la cathédrale elle-même.
M. Desportes, accompagné du docteur Bréchet, second médecin de l’hôpital, vint alors et fut assez heureux pour persuader les émeutiers de faire la chaîne afin d’éteindre le feu qu’ils avaient eux-mêmes allumé.
Cependant le pillage n’était pas terminé...

Après la salle capitulaire et la sacristie, le sac de la cathédrale fut évité de justesse.

La foule continuait cependant son travail de destruction à l’archevêché . Elle mettait le feu aux appartements, lorsque les docteurs Caillard et Bréchet vinrent le faire éteindre, en montrant le danger qui en résulterait pour les blessés de l’Hôtel-Dieu.
Vers quatre heures de l’après midi, M. Desportes, accompagné de quelques internes, arriva à son tour. Il déclara aux émeutiers que l’Hôtel-Dieu ne pouvait plus contenir les blessés (de la révolution de Juillet) et qu’il fallait installer pour eux de nouvelles salles dans l’archevêché. Il put ainsi les persuader de se retirer, et secondé par des gardes nationaux , fit évacuer tous les bâtiments.
Les gardes nationaux purent alors récupérer un certain nombre d’objets précieux que des pillards emportaient en se retirant.

L’action énergique, tant des médecins que des gardes nationaux, explique parfaitement la suite des événements, tels qu’on peut les reconstituer pour les coeurs déposés dans le bureau de Mgr de Quelen.
Quel fut leur sort et peut-on savoir ce qu’ils devinrent par la suite ?
Disons-le tout de suite : à cet instant précis, leur histoire se sépare, et nous devrons, pour chacun d’eux suivre une filière différente.


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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Her Ven 8 Avr - 10:24

LES DEUX COEURS DE LOUIS XVII (Suite 1)
Etude historique
par Laure de La Chapelle
Vice Présidente du Cercle d’Etudes Historiques Sur la Question Louis XVII

CHAPITRE 4
La filière officielle : Gabriel Pelletan

Qui était donc Gabriel Pelletan, qui assura avoir miraculeusement retrouvé le coeur prélevé par son père sur un tas de sable, à l’Archevêché, quelques jours après la fin de l’émeute ?

Rappelons qu’il était fils naturel de Philippe Jean Pelletan.
Le nom de sa mère était peut-être DELATOUR. Nous lisons en effet dans l’attestation du docteur Martellière, publiée dans la Chronique Médicale de 1895 :

A l’occasion des fouilles opérées dans le cimetière Sainte Marguerite, qui firent découvrir les ossements d’un jeune homme de 16 ans environ, sachant que le coeur de Louis XVII légué par le docteur Gabriel Delatour à Monsieur et madame Prosper Deschamps, actuellement possédé par monsieur Edouard Dumont, était à Neuilly, rue Perronet, j’eus la curiosité de demander à voir ce coeur?

Né le 10 janvier 1792, dans une maison rue de Touraine (actuelle rue Dupuytren), il ne fut reconnu par Pelletan père qu’à l’âge de quinze ans, rue d’Hauteville, le 27 mars 1807.
Il demeura ensuite à Paris rue Saint Christophe, puis 41 rue St André des Arts, domiciles successifs de Philippe Jean Pelletan.
Sous l’Empire, il fut reçu docteur en Médecine et s’occupa principalement de chimie, mais acquit une réputation de praticien. Ses activités scientifiques, en particulier un Mémoire sur la spécialité des nerfs des sens, lui valurent la Légion d’Honneur.(in la Dynastie médicale des Pelletan, de Sonolet et Poulet).
Il participa à la campagne de Russie et fut décoré à 23 ans par le chirurgien militaire Larrey sur le champ de bataille de Waterloo (Delorme, op. cit. p.147).
Il épousa Anne Victoire LANTENOIS le 27 novembre 1827. A l’époque de son mariage, il était âgé de plus de 38 ans et habitait toujours 41 rue St André des Arts, dernier domicile de son père à Paris. Le contrat fut reçu le 26 novembre par Me Bourlier, prédécesseur de Me Barre.
Anne Victoire Lantenois était la fille unique d’Etienne Lantenois, avoué près le tribunal de la Seine, décédé à Paris le 6 janvier 1852, et d’Anne Françoise Louault, décédée à Paris-Passy le 26 novembre 1862 (Inventaires Lantenois des 26-03-1852 et 11-10-1862 ; leur tombe est au Cimetière du Nord).
Après leur mariage, Gabriel Pelletan et sa femme s’installèrent rue d’Hauteville, maison achetée par les beaux parents du médecin le 23 janvier 1828 à Mme Vve Chassagne, à qui Fanny Pelletan fit un legs testamentaire.
Anne Victoire Lantenois mourut à Paris le 2 août 1866. Gabriel Pelletan avait eu de son mariage deux filles :

Anne Gabrielle, née le 31 décembre 1828, décédée en 1841 sans alliance.
Fanny, née le 25 juin 1830, décédée sans alliance le 1er août 1876, avant son père, qui fut son légataire universel.
Gabriel Pelletan mourut à Paris le 11 octobre 1879, au 73 rue de Longchamp, sa résidence de campagne (achetée le 21 mars 1845. Acte reçu par Me Bourlier).
Son inventaire après décès révèle qu’il était propriétaire de cinq immeubles à Paris, et que son domicile rue d’Hauteville regorgeait de meubles, d’argenterie, de bijoux et de porcelaines précieuses. Mais le plus intéressant dans ce véritable bric à brac de montres, de tabatières en or, de châles et de dentelles provenant de la succession de sa fille, ce sont les médaillons représentant Napoléon et les miniatures du Roi de Rome.
Ainsi donc, Gabriel Pelletan était bonapartiste, et contrairement à son père qui avait retourné sa veste aussi vite que se succédaient les régimes politiques, il campait sur ses premières fidélités.
En effet, pas un portrait des Bourbons, pas une miniature de Louis XVII.

Et c’est cet homme qui, selon la Revue Rétrospective, bénéficiaire d’un renseignement inattendu, s’employa avec zèle à remuer des tas de débris dans la cour de l ‘Archevêché pour retrouver intégralement les morceaux de l’urne de cristal et son contenu !
Voyons cela de plus près.
Ce n’est que le 12 février 1854 que Gabriel Pelletan se décida à raconter l’histoire de sa découverte, soit vingt quatre ans après les faits.
Comment s’étonner alors qu’il se trompe de date (1831 au lieu de 1830), et qu’il ne retrouve pas le document permettant d’authentifier ses dires ?
Je fis signer la véracité de ses recherches et l’exactitude de notre heureux résultat par les personnes présentes. Plus tard, j’ai rédigé une note accompagnant ce certificat, mais je l’ai si bien cachée que je ne puis remettre la main dessus.

Voilà qui est extrêmement fâcheux !
D’autant que le récit est parfaitement invraisemblable ; nous allons l’examiner.
Un certain Lescroart, ouvrier imprimeur écrivit à Gabriel Pelletan pour lui signaler un hasard singulier qui aurait fait tomber entre ses mains pendant le pillage du palais épiscopal des pièces relatives aux restes du roi Louis XVII.
Pourquoi s’adressa-t-il à Gabriel et non à Pierre, le fils aîné et légitime de Philippe Jean ?
Pour cette première difficulté, la réponse est simple. Maurice Pascal, toujours lui, raconta que Lescroart avait jadis été bien soigné - le cas n’était pas si fréquent - par Pelletan père.
Le nom du chirurgien apparaissant à toutes les pages du Mémoire, il est en tout cas certain que Lescroart adressa son billet à la dernière adresse parisienne de Philippe Jean.
Ce dernier étant mort l’année précédente, la lettre parvint à sa fille, Elisabeth Françoise , qui habitait encore rue St André des Arts. Brouillée avec son frère Pierre, elle s’empressa de faire bénéficier du renseignement son demi-frère Gabriel (rappelons qu’il sera son héritier, au détriment de l’aîné) Gabriel, en effet, avait quitté le domicile qu’il partageait avec sa soeur et habitait depuis son mariage en 1827 rue d’Hauteville. Pour autant, faut-il croire Gabriel quand il nous raconte qu’aidé de Lescroart, et des personnes de garde au poste d’entrée de l’Archevêché, il retrouva une certaine quantité des débris de l’urne en un tas isolé , près de l’église et dans un amas de sable entre la porte attenant à la grille et l’église , le coeur entièrement intact. Voilà qui est déjà extraordinaire.
Mais relisons le récit de Gabriel :
On trouva que les livres (de la bibliothèque de Mgr de Quelen) cachaient derrière eux un étui en bois et un rouleau de papier ; Lescroart s’en saisit , et dévissa l’étui…
Cet étui, qu’est-il devenu ?
Qu’on ne nous dise pas qu’il n’a pas été retrouvé ! Dans la décharge donnée à Edouard Dumont par le duc de Madrid le 22 juin 1895, Me Paul Tollu note soigneusement la remise :

1° D’une boîte cylindrique en bois dur, jaune et verni, ayant dix centimètres de hauteur, non compris un centimètre en retrait, avec pas de vis. Cette boîte, fendue en deux endroits, de bas en haut, est retenue d’un côté par une bordure de papier blanc collée au bois et deux fils de laiton en cuivre serrant latéralement en bas et en haut ladite boîte ; laquelle est garnie intérieurement de velours grenat ;
2° Enfin de cinq morceaux du même bois jaune et verni paraissant être la partie supérieure du cylindre de la boîte ci-dessus ; sur l’un de ces morceaux, non garnis de velours, on lit, en caractères d’une écriture difficile et à la main Boîte brisée du coeur de L.
Ces débris sont accompagnés d’un fil de laiton de cuivre semblable à ceux ci-dessus décrits, et d’un autre fil de coton avec une petite bande de soie sur laquelle est un petit cachet en cire noire aux initiales G.P.

A qui fera-t-on croire que, non content d’avoir miraculeusement retrouvé un coeur dans du sable, et quinze morceaux ( dénombrés par Me Tollu ) d’urne en cristal, Gabriel Pelletan avait découvert en même temps un étui fendu en deux endroits et cinq morceaux formant le couvercle , sans doute en un tas isolé pour faciliter les recherches ! Les émeutiers mettaient-ils l’évêché à sac ou préparaient-ils un rallye ?

Il est impossible de suivre Gabriel Pelletan dans sa version des faits. Il est plus probable que Lescroart, poursuivi et frappé par un garde national, récupéra sur les lieux mêmes ou dans une rue adjacente tous les morceaux que lui disputait le soldat et les négocia avec Gabriel Pelletan.
Mais quelqu’un vit l’intérêt qu’il n’y ait aucune solution de continuité entre l’urne et le Mémoire cachés dans la bibliothèque de Mgr de Quelen et leur découverte par un successeur immédiat du chirurgien Pelletan. Et ce quelqu’un, ce fut Maître Barre.
Les contre-vérités de l’estimable Maître Barre

C’est dès l’arrivée de Maître Barre à la tête de l’étude LXVI, boulevard des Capucines, que le coeur de l’Enfant du Temple refit surface dans l’actualité.
En effet, Gabriel Pelletan , sans doute à cause de ses opinions politiques, ne se soucia nullement pendant vingt quatre ans de proposer le coeur aux Bourbons en exil.
Craignant peut-être que son frère Pierre ne le lui réclame - n’oublions pas qu’il avait renoncé à la succession de leur père - il le confia à sa mère jusqu’en 1853.
Mais l’année 1853 est précisément celle de l’arrivée aux affaires de son nouveau notaire, Maître Félix Edouard Barre.
Lequel était un ardent légitimiste et s’intéressa aussitôt à la relique royale que détenait son client.
Il y avait une condition pour prouver l’authenticité du viscère : que son propriétaire soit aussi le découvreur de « l’objet précieux ».
C’est ainsi que se monta le pittoresque récit de la découverte du coeur sur un tas de sable. Mais il est rare, lors d’un montage de ce genre, aussi soigneusement pesé soit-il , que l’on n’oublie pas un petit détail : le détail qui révèle l’imposture, c’est ici, l’oubli d’un étui en bois.
Qui suggéra cette fable à Gabriel Pelletan qui, lui, ne se souciait guère de sa « découverte » ? Son conseiller, Maître Barre, qui va dorénavant prendre la direction des opérations.
Et pour commencer, après le récit suggéré à son client, il va mettre en sûreté le coeur que Gabriel Pelletan réclama à sa mère en 1853 : ce coeur restera dans le coffre de l’étude jusqu’à sa remise par M. Edouard Dumont à l’envoyé de Don Carlos en 1895.

Maître Barre ne s’arrêta pas en aussi bon chemin.

Le testament mystique de Gabriel Pelletan

Avant de commencer les démarches auprès de la famille royale, démarches que son client n’aurait peut-être que médiocrement appréciées, Maître Barre devait prendre légalement la direction des opérations. Ce qui se fit en deux étapes successives :
Le 25 juin 1875, il fut désigné comme exécuteur testamentaire par la fille de Gabriel, Fanny Pelletan, qui devait mourir le 1er août 1876.
Dix jours après la mort de sa fille, Gabriel Pelletan prenait la même disposition :
Ma chère fille a nommé Me Edouard Barre , notaire, son exécuteur testamentaire, je veux qu’il soit aussi le mien . Je lui donne en conséquence la saisine et je le charge spécialement de réaliser au mieux des intérêts que je lui confie, la vente des immeubles que j’ai recueillis dans la succession de ma fille et au besoin ceux qui m’appartiennent personnellement afin d’acquitter les legs , frais et charges contenus en mon présent testament.
Dans ce but, je lui confère les pouvoirs les plus étendus, et pour le rémunérer de ses soins, je lui donne un diamant de vingt mille francs.

Pourvu d’une large fortune, Gabriel Pelletan fit en effet bon nombre de legs et désigna comme héritier un cousin de sa femme, Jacques Marie Prosper Deschamps. Celui-ci ne devait guère gêner l’action de Me Barre, puisqu’il mourait octogénaire deux ans plus tard.
Mais la disposition la plus importante, et pour nous, la plus inattendue, ce fut la tâche désignée par ce testament à Me Barre :

Ma chère fille étant morte avant d’avoir achevé l’oeuvre de Glück (célèbre compositeur allemand d’opéras au 18ème siècle), entreprise par elle, je veux, selon le désir qu’elle a exprimé, que le crédit dont elle parle dans son testament du vingt cinq juin mil huit cent soixante quinze, à ouvrir à Me Barre, son exécuteur testamentaire, sans en déterminer le chiffre, soit de cent mille francs ; cette somme sera prélevée par Me Barre son exécuteur testamentaire qui est aussi le mien ; il en aura la libre et entière disposition afin de pourvoir, non seulement aux frais matériels de cette publication, mais encore à tout ce qui peut s’y rattacher, et notamment afin de rémunérer largement les soins et le concours qui seront donnés à cette oeuvre.

La somme mise à la disposition du notaire était considérable.
Et notre étonnement non moins grand de constater que le testateur et sa fille ne disaient mot du coeur Pelletan.
Nanti d’une pareille somme, Me Edouard Barre se mit aussitôt à la tâche : c’est-à-dire dès l’année 1876, date du décès de Fanny Pelletan puis, plus activement en 1879, après le décès de Gabriel.
Je ne sais s’il s’attela à l’oeuvre de Glück, mais ce qui est certain, c’est qu’il commença aussitôt les recherches sur l’authenticité du coeur détenu dans son coffre. Et devant la curiosité qu’il soulevait à l’Académie ou à la Faculté de Médecine, il n’hésita pas, là encore, à faire preuve d’un bel esprit d’invention. Voici le témoignage du bibliothécaire de l’Académie de Médecine, le docteur Alexis Emmanuel Dureau, dont il mit les compétences à contribution :

Enfin, Gabriel Pelletan, que nous avons tous connu, est mort en 1879,
laissant à ses héritiers, avec une belle fortune, le soin de poursuivre les négociations entamées (avec la famille royale) soin qui était une sorte de condition du legs.
(Or, aucune clause concernant le coeur n’existait dans le testament de Gabriel !)
J’ai eu l’occasion, à cette époque, de voir le notaire chargé de continuer la restitution du dossier réclamé par la famille du comte de Chambord et il a copié, à l’Académie, les divers documents du temps que je lui ai mis sous les yeux ; il paraissait satisfait de ses recherches, mais la mort du comte de Chambord est survenue sur ces entrefaites. Le coeur de l’infortuné Louis XVII est peut-être encore relégué dans quelque vieux carton d’étude de notaire ! ( La Gazette Médicale de Paris, janvier 1891).

Le docteur Dureau n’avait rien à craindre, Me Barre n’allait pas laisser s’endormir l’affaire !
Il est superflu de noter que c’est de sa propre autorité - et avec l’accord du légataire universel, M. Prosper Deschamps - que le notaire commença après 1879, les négociations avec l’administrateur des biens du comte de Chambord, le sieur Barrande.

Me Barre offrit de restituer le coeur au Prince en ayant soin d’ajouter que l’offre était entièrement désintéressée pour l’avenir aussi bien que pour le présent, et faite dans le seul but de remplir un pieux devoir.
Par une lettre de Maurice Pascal à Paul Cottin du 15 août 1895 ( Bibliothèque de l’Arsenal
Ms 14029 ), nous apprenons que le comte de Chambord fut stupéfait de savoir le coeur sauvé du sac de l’Archevêché et qu’il demanda une enquête.
Son étonnement avait peut-être un autre motif, que nous découvrirons plus tard.

Me Barre dut rédiger une notice biographique sur les Pelletan père et fils, notice qu’il mit longtemps à mettre au point, puisque ce n’est que le 5 juin 1883 qu’il l’envoya à M. Barrande à Prague, en même temps que l’ancien Mémoire du docteur Pelletan père.
M. Barrande accusa réception de la notice et du Mémoire le 11 juin 1883, en ajoutant :

Par l’exposition des faits et des correspondances que vous avez clairement coordonnées, vous avez rendu facile l’appréciation des témoignages du docteur Pelletan.
Ces témoignages sont bien indispensables pour contrebalancer les impressions fâcheuses causées par les incidents extraordinaires qui ont troublé la continuité de leur précieux dépôt.
Je vais transmettre votre lettre et vos deux documents à Monseigneur le comte de Chambord, en le priant de vouloir bien les examiner à loisir. Nous attendons avec confiance le résultat de cet examen d’en haut ; j’espère qu’il sera conforme à vos voeux et qu’un lieu convenable et final de repos sera assigné à ce coeur plusieurs fois préservé de la destruction.
J’aurai l’honneur de vous transmettre les résolutions de Monseigneur, dès qu’elles me seront connues.
Les péripéties du coeur étaient décidément peu crédibles !
Au reste, elles ne purent convaincre personne puisque, très malade en juin 1883, le comte de Chambord mourut le 25 août de la même année ; M. Barrande décéda très rapidement après lui. Apparemment, il n’eut pas l’occasion de transmettre avant sa mort les documents au prince, car ils passèrent directement à l’un des exécuteurs testamentaires du comte de Chambord, M. Huet du Pavillon, comme le prouve une correspondance de ce dernier adressée en 1886 à Me Barre :

Ne voulant pas vous priver plus longtemps des deux documents qui m’ont été confiés après le décès du vénérable M . Barrande, je me décide à vous les restituer.

C’est donc dans la succession de Barrande qu’on les avait retrouvés.
Mais Me Barre n’était pas au bout de ses peines, et Huet du Pavillon ne lui laissa aucun espoir :

Si j’ai tardé aussi longtemps à vous adresser la réponse que ma lettre du 25 novembre 1884 vous faisait espérer, c’est que, jusqu’ici, je n’ai pu obtenir une décision de la part des princes héritiers de Mgr le comte de Chambord concernant la demande que vous m’avez formulée comme exécuteur testamentaire de M. Gabriel Pelletan.

Lequel aurait sans doute été bien étonné de savoir que ledit exécuteur testamentaire s’occupait avec beaucoup plus de zèle du coeur « Louis XVII » que de l’oeuvre de Glück !
Ce serait bien mal connaître Me Barre, que de croire qu’il en resterait là.
Où l’on voit Maître Barre toucher au but

L’héritier du comte de Chambord, don Carlos, duc de Madrid, ne s’était nullement empressé de recueillir « l’objet précieux » proposé par le notaire, coeur qui, d’ailleurs, depuis la mort de Gabriel Pelletan, avait déjà changé trois fois de mains.
Après M. Prosper Deschamps, décédé octogénaire en 1881, il passa à sa veuve, Mme Deschamps née Eugénie Brémard.
Laquelle mourut en 1887, en laissant le coeur à son fils unique, issu d’un précédent mariage, M. Edouard Dumont.
Malgré tous ces changements de propriétaire, Me Barre, devenu notaire honoraire, était toujours chargé de la relique et ne renonçait nullement à la donner aux Bourbons.
Mais cette fois, avec l’aide de Me Louis Marie Pascal , son ami et ancien collègue et du fils de ce dernier, Maurice Pascal, licencié en droit, passionné par les nécropoles royales, Me Barre réussit à s’entourer d’un groupe de fidèles légitimistes, ardents défenseurs de la cause du prétendant espagnol à la Couronne de France, don Carlos, duc de Madrid.
Ce prince était en effet, depuis la mort de son père, don Juan , en 1887, reconnu comme Charles XI par ses partisans, ce qui ne lui faisait qu’un plaisir mitigé, car il s’intéressait uniquement au trône d’Espagne, ce que prouve amplement une lettre adressée au prince de Valori le 14 septembre 1888, où il précise sa position sur les traités d’Utrecht signés par Louis XIV (qui renonçait pour son petit-fils Philippe V devenu roi d’Espagne à tout droit sur le trône de France) :
Plus respectueux des traités que l’Europe qui les a vingt fois violés, j’appartiens à l’Espagne. Je ne réclame pas une double et légitime couronne.
Je suis en Espagne le Roi de toutes les libertés nationales, mais je ne serai jamais en France le Roi de la Révolution.

Voilà qui augurait mal des nouvelles démarches de Me Barre. Mais ce dernier, qui n’ignorait pas sans doute que les prétendants n’aiment guère décevoir leurs partisans, sous peine de rester seuls avec leurs déclarations de principe, s’arma de courage et selon une expression familière, sut faire « monter la pression ».
C’est ainsi que le 2 juillet 1895, M. Maurice Pascal, toujours lui, remettait solennellement le coeur au duc de Madrid en son palais vénitien, après que décharge eût été donnée par don Carlos à M. Edouard Dumont, dernier détenteur de la relique.
Il n’est pas indifférent de noter les nombreux témoins qui signèrent à l’acte de décharge le 22 juin 1895
En tête, naturellement, le « deus ex machina » de toute l’affaire, Me Félix Edouard Barre en personne, grand triomphateur de la journée.
Et son alter ego, Maurice Pascal,
Sans oublier le publiciste de l’histoire du coeur, M. Paul Cottin, directeur de la Revue Rétrospective.
Suivis en bon ordre par une honorable cohorte de « Blancs d’Espagne », comme on les nommait alors :

En foule et dans le désordre, les Maillé, Cathelineau, Castelbajac, Cibeins, Laurentie, Damas, d’Anglade, Kermel, côtoyant l’ancienne grande Maîtresse du Palais de la comtesse de Chambord, la comtesse de Cibeins et l’épouse de Miguel de Marichalar, ancienne grande maîtresse du palais de la Duchesse de Madrid .On ne saurait les nommer tous.
En tout, une quarantaine de chauds partisans du duc de Madrid, qui considéraient qu’il était de l’intérêt bien compris de leur prétendant d’accepter le coeur offert par les héritiers de Pelletan.
Pour eux, la question était simple :
Louis XVII était mort au Temple le 8 juin 1795.
- C’est son coeur qu’avait prélevé le chirurgien Philippe Jean Pelletan.
- Toute discussion sur l’un de ces points était inconvenante.
- Ce coeur représentait une preuve indiscutable du bon droit de l’aîné des Bourbons à régner sur la France.
- Puisque les prétentions des descendants de Philippe Egalité n’étaient plus moralement acceptables :
Hérite-t-on, Seigneur, de ceux qu’on assassine ?
Le coeur détenu par Gabriel Pelletan et ses héritiers rejoignit donc, après le palais Lorédan à Venise, la chapelle du château de Froshdorf. Il avait été fidèlement reproduit, en fac simile photographique, dans la publication de Paul Cottin, la Revue Rétrospective, avant sa remise au comte de Maillé à Paris.
C’est le seul document qui reproduise ce coeur au 19ème siècle, et malgré la petite taille du fac simile, il est suffisamment précis pour qu’on puisse juger des caractéristiques de l’organe .

Où l’on voit un coeur refaire surface

Pendant près d’un siècle, l’existence du coeur offert au duc de Madrid demeura dans la brume épaisse qui recouvrit pour le public l’existence des propriétaires de Froshdorf.
De don Carlos, usufruitier du domaine, le château revint après sa mort en 1909 à son fils, don Jaime, à qui la comtesse de Chambord en avait fait don en nue-propriété. Il mourut en 1931 sans alliance.
Plus tard, une de ses soeurs, Béatrice, princesse Massimo en hérita, et après elle, ses quatre filles.
L’une d’entre elles, donna Maria de las Nieves - Madame Percy - emmena le coeur à Rome
après la vente de Froshdorf à l’Etat autrichien, et entreprit des démarches pour le rendre à la France ; M. Georges Albert Salvan nous en parle :

Je veux rendre cette relique à la France, lui déclara, au début de 1975, la princesse. Je suggérai alors de la remettre à M. Giscard d’Estaing, président de la République française, dont je connaissais les soeurs. La République ? Jamais ! répliqua-t-elle.
Avec son accord, je demandais alors conseil au secrétaire d’Etat à la Culture, M. Michel Guy, qui suggéra l’offrande du coeur au Mémorial de Saint Denis, présidé par le duc de Bauffremont.
En conclusion, j’atteste que le reliquaire qui nous a été présenté le 16 juin 1999 à Saint Denis était bien celui que j’ai vu à Rome il y a vingt trois ans.
( Extraits de la note remise à la conférence de presse d’avril 2000 et signée du 29 juin 1999 par M. Georges Albert Salvan )


Les photos de presse prises au moment de la remise de la relique au Mémorial de Saint Denis prouvent à l’évidence les assertions de M. Georges Albert Salvan : l’urne et son contenu remis à la France le 13 avril 1975 sont identiques à ceux qui ont été analysés vingt quatre ans plus tard . Et le coeur de l’an 2000 est bien sans discussion celui de 1975.

Mais celui de 1975 n’était déjà plus celui de 1894 . Que s’était-il passé ? Et s’il y a eu changement comment peut-on l’expliquer ?
CHAPITRE 5
Un coup de théâtre : la lettre du Père Bole
Rien de moins aisé que de pénétrer les arcanes du château de Froshdorf et de sonder les arrière-pensées de la famille royale en exil. Repliée sur elle-même, ouverte à ses seuls partisans fidèles, méfiante depuis toutes les secousses politiques qu’elle avait dû subir, elle évitait par prudence de s’exposer à de nouveaux coups du sort.
Dans cette ambiance surréaliste où s’agitait en vase clos une cour fantôme, et où l’on prit la précaution de soustraire aux importuns après sa mort, les papiers du comte de Chambord, nul document indiscret ne pouvait parvenir à la postérité.

Seul le hasard d’une confidence faite au cours d’une correspondance privée conservée dans les archives d’un ordre religieux leva un coin du voile sur ce qui se passait à Froshdorf.
Et cette confidence, ce fut le confesseur du comte de Chambord lui-même, le père jésuite Bole, qui la fit à un de ses amis, le père Marin de Boylesve.
Le père Bole s’était déjà attiré les foudres de René de Monti de Rezé, un des intimes du comte de Chambord :

Bien qu’il fût médiocre d’intelligence et commun en toutes choses, le père Bole avait su, à force d’intrigues, capter rapidement la confiance absolue de Madame la comtesse de Chambord et devenir le confesseur du couple royal. Chaque jour, il conférait avec Madame, qui n’avait aucun secret pour lui, et dont la maladresse obstinée a toujours égalé la parfaite loyauté d’intentions?
Après la mort du prince, Madame, possédant Froshdorf avec son contenu, laissa les mains libres au père Bole, pour disposer des précieuses archives qui y reposaient. Aussi, quelques années plus tard, Madame et le père Bole disparus, quand M. François Laurentie, autorisé par le prince don Jaime, duc de Madrid, petit neveu et héritier de Madame, vint faire des recherches historiques au château, il ne trouva plus dans les archives que des miettes insignifiantes du passé. (Souvenirs sur le comte de Chambord,. Cte René de Monti de Rezé )

Accusation sans preuves : bien au contraire, l’entourage du comte et de la comtesse de Chambord prit, après leur mort, toutes les précautions nécessaires, ainsi que s’en plaint le père Bole dans une lettre au père de Boylesve du 2 juillet 1886 :

J’étais à Goritz, quand j’ai reçu la nouvelle : la mort de Madame, ses royales funérailles, la visite de cent Français accourus à ses obsèques, les préparatifs de mon départ pour Froshdorf, ma réinstallation provisoire dans ce château devenu par la perte de ses augustes maîtres un vrai tombeau ; l’apposition des scellés par le grand maréchalat, l’impossibilité de remplir les volontés testamentaires du Roi, qui me nommait examinateur de ses archives et de tous ses papiers, afin d’en brûler les pièces compromettantes, ces occupations et cent autres analogues ont absorbé tout mon temps et précipité mon départ.
C’est le 28 mai que j’ai quitté Froshdorf, après y avoir passé 17 ans…

Si les intimes des Bourbons en exil se méfiaient tant du père Bole, c’est qu’il avait partagé sans conteste l’intimité des princes : c’est ce qui donne toute sa valeur à la lettre où il parle de Louis XVII.
Datée du 17 octobre 1885, deux ans après la mort du comte de Chambord, elle est également adressée au père Marin de Boylesve. M. Paul Eric Blanrue l’avait citée en 1995 dans son livre Lumières sur le Comte de Chambord, mais en l’amputant des deux tiers et en changeant la signification de la phrase principale. Nous allons donc devoir citer ce texte dans son intégralité.
Lettre du P. Bole au P. de Boylesve
(Troisième page de la lettre autographe envoyée de Froshdorf le 17 octobre 1885)
Je connais parfaitement tout ce que vous me dites de Louis XVII ; vous croyez à son évasion, moi non, sans entrer dans le fond de la question qui du reste a été traitée parfaitement et jugée plusieurs fois en pleine connaissance de cause, comme on peut le voir dans les considérants du jugement condamnant Naundorf et les plaignants.

Trois choses me donnent une certitude morale de la mort de Louis XVII au Temple.
C’est d’abord la persuasion qu’en ont eu tous les membres de la famille royale. Ni Charles X, ni le duc ni la duchesse d’Angoulême ni H V (Henri V) ni sa soeur n’ont jamais élevé le moindre doute là-dessus et tous les Princes et Princesses sont morts sans l’ombre de remords, que dis-je ? sans même y penser. De plus, ces jours derniers, j’entendais Madame (la comtesse de Chambord) répéter pour la centième fois que la duchesse d’Angoulême avait toujours affirmé de la manière la plus formelle et la plus énergique la mort de son frère au Temple, qu’elle n’en était, hélas ! que trop certaine !

Ensuite les procès-verbaux des 4 médecins désignés pour faire l’autopsie du cadavre et dont deux ont déclaré avoir parfaitement reconnu l’identité du jeune Prince.

Enfin l’enlèvement du coeur (souligné dans le texte) de ce royal enfant par le Dr Pelletan chargé par ses collègues de faire l’autopsie, pieux larcin fait au péril de sa vie.
Se serait-il exposé à un si grand danger s’il n’avait pas été absolument certain que le coeur était bien celui du Prince qu’il avait connu et soigné ?
Ce coeur, Monseigneur (le comte de Chambord) l’a reçu après avoir fait examiner toutes les pièces et documents qui en constatent l'authenticité.
(Archives de la Compagnie de Jésus à Vanves)
Ce texte prouve à l’évidence qu’à la date de cette lettre, le 17 octobre 1885, existait à Froshdorf un coeur supposé être celui de Louis XVII prélevé par le docteur Pelletan en 1795 au cours de l’autopsie de l’enfant mort au Temple.
Le comte de Chambord étant mort le 24 août 1883, le coeur était aux mains des Bourbons au moins depuis cette date.
Or nous savons que le coeur prélevé par Pelletan, conservé par les héritiers de son fils Gabriel et proposé en vain à la famille royale par Maître Barre, était resté à Paris dans le coffre du notaire jusqu’en 1895, date à laquelle il fut remis à Don Carlos de Bourbon Parme au palais Lorédan à Venise.
Il fut donc accepté et reçu par un Bourbon dix ans après la lettre du père Bole.
De quel coeur parle donc le père Bole ?
La comtesse de Chambord étant morte en 1886, et le père Bole lui-même en 1890, aucun d’eux n’a pu intervenir dans l’arrivée d’un nouveau coeur qui s’est ajouté en 1895 à celui qui était déjà détenu par la famille royale.
S’il y a eu à Froshdorf deux coeurs dits tous deux « coeur Pelletan » la première question qui se pose est la suivante : de quel coeur a-t-on prélevé l’A.D.N. en l’an 2000 ?

Pour y répondre, nous allons devoir remonter le temps et revenir en 1830, époque où les coeurs des deux frères, Louis Joseph et Louis Charles, se trouvaient ensemble à l’Archevêché, dans le bureau de Mgr de Quelen.
CHAPITRE 6
Retour en 1830 : la filière de Pierre Pelletan

Les coeurs des deux frères, répétons-le, se trouvaient ensemble chez Mgr de Quelen, avant le pillage de l’Archevêché, ainsi que le révèle Maurice Pascal dans l’article déjà cité du Littoral de la Somme, et dans une lettre à Paul Cottin, que ce dernier ne démentira pas dans les colonnes de la Revue Rétrospective :

Hier, j’ai passé toute ma journée à la bibliothèque de l’Arsenal ; Paul Cottin, bibliothécaire à l’Arsenal, et auteur de brochures sur le coeur de Louis XVII, m’a reçu fort aimablement ?D’une intelligence très cultivée et très vive, il a parfaitement compris l’extension qu’il fallait donner à certains faits, laissés beaucoup trop dans l’ombre, et souvent même insoupçonnés. Ainsi, la lenteur de l’enquête sous la Restauration ; la difficulté et la longueur de temps pour retrouver les témoins du drame ; la prudence exigée pour n’être point trompé après un pareil bouleversement ; l’acceptation très réelle que la famille royale avait faite du coeur en 1828 ; la même filière qu’avait suivie le coeur de son frère aîné, et ce, sur ordre de Charles X... (Arsenal ; ms.14029 /35)
Qu’était donc devenu l’autre coeur, celui du frère aîné de Louis XVII, le premier Dauphin Louis Joseph ? Avait-il disparu pendant le pillage de 1830 ? Personne ne semblait s’être inquiété de son sort, d’autant que sa présence à l’archevêché en même temps que le coeur Pelletan n’avait guère été notée par les historiens.
Dans la chronique scientifique d’un journal local, aujourd’hui bien oublié, l’Aveyron Républicain, daté du 2 décembre 1892, l’auteur d’un article sur le coeur de Louis XVII faisait une révélation stupéfiante : un coeur aurait été retrouvé au cours de l’émeute par Pierre Pelletan, le fils aîné du docteur Philippe Jean Pelletan ! Cet article donnait la référence d’un témoignage de base, publié dans la Gazette Médicale.
Comme le journaliste de Rodez n’en donnait ni la date, ni l’auteur, et que les Gazettes Médicales abondent en France, la recherche ne fut pas des plus aisées.
Mais, en novembre 2002, ce texte capital était débusqué, grâce à l’aide du Service Historique de la Médecine, dans les colonnes de la Gazette Médicale de Paris de l’année 1891.
(Gazette Médicale de Paris , 62ème année, 7ème série. Cote 90182)
Son auteur était le docteur Alexis Antoine Emmanuel DUREAU (1831-1904) -celui-là même à qui Me Barre avait eu affaire- qui fut nommé bibliothécaire en titre de l’Académie de Médecine en 1886 et chevalier de la Légion d’Honneur en 1897. C’est donc quelqu’un qui représentait la plus haute autorité officielle en matière de publications médicales et l’on peut à juste titre estimer qu’il n’a pas apporté son témoignage à la légère. Il le publia d’ailleurs à la demande de confrères non moins éminents, dont le professeur Paul Jules TILLAUX, titulaire de la chaire de Clinique Chirurgicale, à l’occasion de sa leçon d’ouverture de médecine opératoire en 1890.

Le docteur Dureau fit paraître sa réponse à la demande de renseignements du professeur Tillaux sur le coeur de Louis XVII, dans la rubrique qu’il dirigeait et dont le titre est significatif :
Documents pour servir à l’histoire de la Médecine

Voici ce document qui est capital dans la question si controversée des deux coeurs.

M. le professeur Tillaux, sympathique à tous, a inauguré son cours de clinique chirurgicale par une leçon très bien faite dans laquelle il a jeté un coup d’oeil sur l’histoire de cette clinique. Un détail de cette leçon nous a intéressé tout particulièrement : il s’agit du coeur de Louis XVII. L’on sait que Philippe Jean Pelletan, le grand chirurgien, émule et successeur de Desault, avait été chargé de faire l’autopsie du pauvre enfant mort au Temple et qu’il avait conservé le coeur du dauphin.
Pendant la restauration, Pelletan fit toutes les démarches nécessaires pour rendre à la famille royale le coeur conservé, mais d’une part, il n’était pas bien en cour, de l’autre il fallait démontrer l’authenticité de l’organe et Pelletan mourut en 1829, laissant à son fils, professeur comme lui, le soin de continuer les démarches.
M. le professeur Tillaux demande, avec notre confrère Corlieu, ce que le coeur de Louis XVII est devenu, je puis le leur dire.
En juillet 1830, il se trouvait sur le bureau de l’archevêque de Paris, de Quelen, et, l’archevêché ayant été pillé, la nouvelle en parvint à Pierre Pelletan , qui, pendant la bataille même, se rendit à l’archevêché occupé par la Garde Nationale.
Pelletan se fit connaître de l’officier commandant, et, accompagné par lui, se rendit de suite dans le cabinet de l’archevêque où, au milieu des papiers et objets divers qui jonchaient la pièce, il put retrouver la boîte intacte qui contenait le précieux viscère ; il le remporta chez lui, n’ayant pas le temps de chercher le volumineux dossier qui, jadis, avait accompagné la boîte.
Pelletan, pour obéir à la volonté de son père, une fois les événements politiques accomplis, se mit en devoir de reconstituer le dossier perdu, et au bout d’un certain temps, il entama avec le comte de Chambord, des négociations analogues à celles commencées avec Louis XVIII et Charles X, mais il mourut en 1845.
Son frère Gabriel Pelletan, que nous avons tous connu, est mort en 1879, laissant à ses héritiers, avec une belle fortune, le soin de poursuivre les négociations entamées, soin qui était une sorte de condition du legs.
J’ai eu l’occasion, à cette époque, de voir le notaire chargé de régler cette succession (Me Barre) ; devenu notaire honoraire depuis peu, il s’était chargé, comme l’un des exécuteurs testamentaires, de continuer la restitution du dossier réclamé par la famille du comte de Chambord et il a copié , à l’Académie, les divers documents du temps que je lui ai mis sous les yeux ; il paraissait satisfait de ses recherches, mais la mort du comte de Chambord est survenue sur ces entrefaites. Le coeur de l’infortuné Louis XVII est peut-être encore relégué dans quelque vieux carton d’étude de notaire.

La fin de ce texte a déjà été citée dans le chapitre concernant Gabriel Pelletan : là commence la confusion totale entre les deux coeurs. Le docteur Dureau sait en effet qu’un coeur a été découvert sur place par Pierre Pelletan ; il ignore que l’existence d’un autre va être révélée quelques jours après l’émeute par Lescroart. Il pense donc que le coeur plus tard possédé par Gabriel lui vient de son frère aîné : c’est bien ainsi qu’on peut interpréter la fin de son récit.
Mais les deux frères étaient brouillés et n’avaient plus aucun contact depuis la succession de leur père en 1829 : Pïerre ne sut pas que son frère possédait l’urne et le coeur Pelletan, ainsi que le Mémoire du chirurgien, qu’il chercha sans le retrouver - et pour cause - puisque Lescroart s’en était emparé quelques heures plus tôt sans doute dans la journée.
Pierre Pelletan, qui arriva à l’Archevëché vers quatre heures, en même temps que ses confrères de l’Hôtel-Dieu et la Garde Nationale, put en effet pénétrer sans trop de risques dans le bureau de Mgr de Quelen.
Mais qu’y trouva-t-il ? Ni le Mémoire, ni l’urne, mais la boîte en plomb intacte, autrefois contenue dans un reliquaire en vermeil et pourvue d’une étiquette en cuivre déclinant les noms et qualités du premier Dauphin. (L’étiquette, séparée de la boîte se trouve aujourd’hui au musée Crozatier du Puy-en-Velay).
Naturellement, étiquette et reliquaire avaient disparu ; seule restait la boîte en plomb qui n’intéressait nullement les pillards.
Pierre Pelletan, qui ne retrouva pas d’autres reliques, pensa sans doute qu’on avait donné au coeur offert à Mgr de Quelen par son père un contenant plus officiel qu’une urne de cristal. L’enveloppe en plomb et le reliquaire en vermeil étaient en effet utilisés pour les princes et certains grands du royaume. Maurice Pascal nous assure d’ailleurs dans sa lettre à Paul Cottin (op.cit.), que la même filière avait été suivie pour les deux coeurs et ce, sur l’ordre de Charles X, ce qui pouvait impliquer , sans pouvoir être affirmatif, la même présentation en vue d’une cérémonie ultérieure.

La présence immédiate de Pierre Pelletan au cours de l’émeute s’explique parfaitement : en effet, il avait hérité de son père une maison au 10 de la rue Saint Christophe ; C’est actuellement l’emplacement du parvis de Notre-Dame, d’où il était à même d’entendre distinctement le grondement de la foule. Et c’est dans cette maison qu’il abrita la relique récupérée, comme le signale Lafont d’Aussonne dans ses Mémoires secrets et universels des malheurs et de la mort de la reine de France (Paris, 1836) :

Le docteur Pelletan, qui avait présidé à l’autopsie, possédait et m’a montré le cœur du jeune roi Louis XVII et sa jolie chevelure blonde ; M. Pelletan fils possède ces tristes dépouilles , en sa maison, près la cathédrale de Paris.

C’est donc bien de l’adresse de Pierre Pelletan dont il s’agit : son frère Gabriel résidait, quant à lui, rue d’Hauteville, dans le 10ème arrondissement actuel.
A partir de cette double découverte de cœurs différents, les choses s’embrouillèrent très vite : les non-initiés ignorant totalement l’existence d’un deuxième cœur mélangèrent allègrement les témoignages, comme dans cette «causerie» du docteur Cabanès, publiée dans le Journal de Médecine de Paris le 4 juin 1893 (Bibl. Universitaire de Médecine. Réf. 91.161) :

Comment le précieux viscère se trouvait en 1830 entre les mains de l’archevêque de Paris, Mgr de Quelen, c’est ce que nous ne nous chargerons pas d’expliquer. Quoiqu’il en soit, le coeur de Louis XVII, que le docteur Pelletan avait enfermé dans une boîte de plomb, scellée de son sceau et remise à Mgr de Quelen, fut jeté dans la Seine lors du pillage de l’archevêché de Paris le 15 février 1831.
De Beauchesne, au lieu d’une boîte de plomb, décrit un vase de cristal, qui demeura en dépôt à l’archevêché de Paris, d’où il disparut lors du pillage de cet édifice, le 29 juillet 1830.
Le fils de Pelletan, (Pierre) aurait, selon d’autres, retrouvé à terre dans le cabinet de Mgr de Quelen, la boîte renfermant le coeur , qui avait, par un heureux hasard, échappé aux manifestations des insurgés.
Il faut croire que cette dernière version est la bonne, puisque le docteur Jules Pelletan, au dire du Dr Corlieu, fut assez heureux pour le retrouver et nous le fit voir.

Ici intervient donc un quatrième docteur Pelletan, Jules, le fils de Pierre. Nous le retrouverons un peu plus tard.

Le texte de Cabanès reflète l’incertitude la plus totale :
le coeur était-il dans une boîte de plomb ou un vase en cristal ?
le vase avait-il disparu totalement ?
la boîte fut-elle retrouvée par Pierre Pelletan ?
Ou fut-elle jetée dans la Seine ? Ce dernier témoignage proviendrait du comte de Lacépède, qui aurait confié au sieur Gruau, ami de Naundorf que :
Le bocal renfermant le coeur, ayant été trouvé à l’archevêché au moment où le peuple s’y porta avec violence, fut jeté dans la Seine, avec une partie du mobilier de l’archevêque.
Ce qui arrangeait tout le monde, puisque cette soustraction opportune ne laissait plus qu’un coeur. Malheureusement, cette version de seconde main parle d’un bocal, non d’une boîte. L’urne en cristal ayant bel et bien été retrouvée, nous retombons sur le problème précédent, dont les contemporains de Pierre et Gabriel Pelletan n’entrevirent jamais la solution :
Deux coeurs se trouvaient à l’archevêché, l’un dans une boîte, l’autre dans une urne ;
ils furent retrouvés dans des circonstances différentes et arrivèrent chacun chez un membre de la famille Pelletan, lesquels s’ignoraient.
Et cela ne s’arrangea pas par la suite !

Pierre Pelletan, sa personnalité, son histoire

Qui était le découvreur du coeur contenu dans la boîte en plomb ?
Pierre, fils aîné du docteur Philippe Jean Pelletan, naquit de son premier mariage avec Elisabeth Julie Dubus le 6 janvier 1782.
Il entra à l’Ecole Polytechnique à 15 ans, devint préparateur du célèbre physicien Charles, puis ouvrit un cours de chimie générale. Son père le fit recevoir chirurgien militaire en 1799.
Après avoir fait la campagne de Zurich, il fut reçu premier au 2ème concours de l’Internat des hôpitaux de Paris, le 27 avril 1803.
Il exerça alors dans le service de son père, mais ne s’intéressant guère à la chirurgie, il se rendit à Rouen où il fonda une fabrique de soude artificielle. Changeant encore de voie, il revint à Paris, où il soutint sa thèse de doctorat le 18 mars 1813 sur l’Influence des lois physiques et chimiques sur les phénomènes de la vie.

Ce fut un esprit intelligent, extrêmement ingénieux, passionné de l’invention de multiples procédés de chimie et de physique, mais diffluent et dispersé. Toute sa vie, il devait être aussi célèbre, mais non moins malheureux que son père. ( in La Dynastie des Pelletan, op.cit.)


Son mariage va le propulser dans un milieu social et politique radicalement différent : le 10 juillet 1813, il épousait à Paris Sophie Madeleine Antoinette BARTHES de MARMORIERES, née à Montreuil près Versailles et baptisée en l’église St Symphorien de cette ville le 6 avril 1776. Issue d’une célèbre famille de Languedoc, Sophie Barthès avait un oncle Chancelier de l’Université de Montpellier où campe toujours la statue de ce médecin illustre.
Son père, Antoine Barthès, seigneur de Marmorières, était en 1784 premier maréchal des logis des Gardes Suisses, Gouverneur honoraire des pages de Madame et surtout secrétaire particulier de Monseigneur, Comte d’Artois.
Cette dernière charge permet de comprendre les liens qui vont relier à la famille royale Pierre Pelletan, sa femme Sophie et son fils, Jules de Kinkelin.
Sophie Barthès était en effet veuve d’un premier mariage avec Jean Michel, baron de Kinkelin, né à Lindau en Bavière en 1777, secrétaire interprète du duc de Raguse, mort à Placentia en Estrémadure fin septembre 1811, âgé de 34 ans.
Elle avait eu trois enfants de ce premier mariage :
Paul Emile Athanase (1801-1879), qui épousera en 1846 Caroline du Périer du Mouriez (1822-1894) ;
Sophie, sans alliance ;
Jules Pierre Michel (1805-1873) qui sera adopté par son beau-père Pierre Pelletan, dont il sera la seule descendance masculine.
Après la mort de Sophie de Barthès , le 24 avril 1832, Pierre Pelletan épousa en secondes noces Lucile SANTOIR de VARENNE, fille d’un peintre paysagiste, Charles de Varenne.
Lucile, agréablement surnommée « l’ahurie de Chaillot » par ses soeurs Caroline et Dorothée, (toutes deux mortes phtisiques), eut deux filles de Pierre Pelletan :
Lydia, morte à cinq ans ;
Marie Julie, née le 2 juillet 1839 à Bruxelles.
C’est en effet à Bruxelles, le 12 août 1845, que devait mourir Pierre Pelletan. Miné par la tuberculose, ruiné par des spéculations malheureuses, il avait été contraint de résilier ses fonctions à la Faculté de Médecine et de se retirer en Belgique, où il exerça quelque temps au Conservatoire des Arts de Bruxelles. Il recevait de l’Université de France une maigre pension de retraite de 2.800 francs. Sa veuve, Lucile Santoir de Varenne, mourut à Paris pendant la Commune, le 13 avril 1871.

Pierre Pelletan, avant son exil à Bruxelles, eut-il le temps de tenter des démarches auprès des Bourbons pour leur rendre le coeur qu’il avait retrouvé dans le bureau de Mgr de Quelen ? Le docteur Dureau croit savoir qu’il commença des négociations, qui furent interrompues par sa mort prématurée en 1845. Il n’était d’ailleurs pas facile après 1830, d’atteindre la Famille Royale, qui, étant exilée, se trouvait alors, soit en Ecosse, soit en Bavière ; et à ce moment là, il n’y avait ni chemins de fer, ni télégraphes. (Maurice Pascal, op. cit.)
Le quatrième médecin de la dynastie : Jules de Kinkelin Pelletan
Lors du retour des Bourbons en 1814, Pierre Pelletan, sans doute influencé par les idées de la jeune femme qu’il avait épousée l’année précédente, accepta sans réserve les idées de la Restauration ; il en fut récompensé en devenant chirurgien ordinaire du roi, médecin de Louis XVIII, puis de Charles X. Très en faveur à la cour, contrairement à son père, il avait été choisi comme l’un des administrateurs de la Faculté de Médecine ; d’ailleurs cette position politique lui valut de sérieux avatars lors de la Révolution de 1830.
La faveur dont il put jouir sous la Restauration avait moins pour cause ses mérites personnels que ceux de la famille de sa première femme Sophie Barthès, veuve, comme on le sait, du baron de Kinkelin. C’est un de ses descendants qui révèle, dans une lettre manuscrite du 8 octobre 1950 :

C’est sans doute pendant l’émigration qu’ils se sont rencontrés, car, dans un article paru à l’occasion de la mort de mon grand père, il est mentionné, d’une part, que « son père (le baron de Kinkelin) avait accompagné le duc d’Angoulême » et, d’autre part , que Mademoiselle de Barthès avait suivi la Comtesse d’Artois en exil.

Les liens avec la famille de Charles X étaient donc très étroits depuis la Révolution. Leur fils, Jules de Kinkelin, eut dès lors de bonnes raisons d’être connu de la famille royale.
D’autres parents de Sophie de Barthès se distinguèrent par une action vigoureuse, mais toujours plus ou moins clandestine, en faveur des Bourbons exilés.
Une des soeurs de Sophie, Marie Françoise Paule de Barthès (1779-1836) épousa en 1799 Michel Ambroise, comte de Gimel. Sa biographie fut écrite par un Gimel, issu d’une branche cadette de cette famille :
Né à Montpellier le 9 décembre 1772 d’Etienne Michel de Gimel, avocat en Parlement, et d’Anne Marguerite Andrette de Madières, Michel Ambroise de Gimel entra au service en1790 comme cadet gentilhomme au régiment de Cambrésis et y fut fait sous–lieutenant en 1791. A la fin de la même année, il émigrait en Espagne où il fut aide de camp du vice-roi de Catalogne. Il fit la campagne de 1792 à l’armée des princes et fut désigné en 1793 comme capitaine dans les hussards de Contades.
Mais c’est la suite de sa carrière qui attire l’attention ; sa biographie révèle des activités spéciales :

Il fut alors appelé à Venise par le comte d’Antraigues, pour être employé dans la diplomatie (sic) pour les intérêts des princes, et fut présenté à S.M. Louis XVIII à Vérone.
Plus tard, envoyé en Languedoc avec des instructions particulières pour coopérer aux projets de Pichegru, il fut proscrit après le 18 fructidor et émigra de nouveau en Suisse…

Le récit de sa vie comporte encore de nombreuses activités diplomatiques et militaires, que nous ne détaillerons pas ici ; il suffit de souligner l’importance de Gimel comme agent de renseignement, également capable de remplir des missions délicates ou secrètes.

C’est dans cette famille, véritablement enracinée dans la tradition du dévouement à la famille royale, que naquit à Rouen le 22 avril 1806, Jules de Kinkelin, troisième enfant du baron de Kinkelin et de Sophie de Barthès. Après la mort de sa mère en 1832, par arrêt de la Cour Royale de Paris le 29 août 1834,

sur requête à elle présentée par Pierre Pelletan, docteur en médecine, demeurant à Paris rue du Fbg Montmartre n°25 et Jules de Kinkelin, docteur en médecine, demeurant même rue et numéro, ladite requête tendante à ce qu’il plaise à la Cour confirmer la sentence en adoption dont sera ci après parlé, la Cour confirme la sentence du Tribunal de 1ère instance de Paris du 30 juillet dernier ; en conséquence, dit qu’il y a lieu à l’adoption de Jules de Kinkelin par Pierre Pelletan…

Jules de Kinkelin fut donc adopté à 28 ans ; onze ans plus tard, son père adoptif mourait, après, toutefois, s’être remarié ! Ses demi-soeurs étant en bas âge, c’est Jules qui prendra à la suite de Pierre Pelletan la charge du coeur retrouvé à l’Archevêché, comme le révèle le docteur Cabanès qui eut vent de l’affaire, sans toutefois la comprendre.
Un faux espoir : le testament de Jules de Kinkelin
Une fois de plus, le docteur Cabanès, qui pensait n’avoir affaire qu’à un seul coeur, mélangea les protagonistes dans sa «Causerie» du 4 juin 1893 date à laquelle, il est vrai, le coeur offert à Don Carlos n’avait pas encore réapparu officiellement. Que nous dit-il ? :

Le comte de Chambord chargea un de ses conseillers M.P. Damas (sans doute le comte Maxence de Damas) de faire une enquête ; Aboutit-elle jamais ?
Il est à croire que non, puisque l’exécuteur testamentaire du petit-fils de Pelletan (ici, il confond Jules de Kinkelin et Gabriel Pelletan) se présentait vers 1876 dans diverses bibliothèques de Paris, pour composer le rapport qui servirait à établir l’identité de Louis XVII avec l’enfant du Temple !
Il y avait, en effet, cette clause bizarre dans le testament de Jules Pelletan :
que les héritiers ne rentreraient en possession de leurs legs que quand le fameux coeur aurait reçu un abri définitif dans la demeure du prétendant au trône de France.

Euréka ! Il ne restait plus qu’à mettre la main sur le testament de Jules de Kinkelin Pelletan.

Une nouvelle fois, ce fut la déception : Jules Pelletan, dans son testament du 19 mai 1867, après avoir pris des dispositions en faveur de sa femme, Marie Adélaïde Louise ANDRE, ne s’occupait de rien d’autre que de vitupérer contre son fils :

J’ai eu bien souvent besoin de l’avoir auprès de moi (il s’agit de sa femme) pour me consoler des chagrins poignants que m’a donnés depuis longtemps mon fils qui s’est marié malgré mes prières et mes menaces avec la fille d’un misérable escroc et qui a ainsi commencé à déshonorer un nom qu’il devait continuer à flétrir encore. Ma malédiction paternelle lui a été infligée, et je la confirme ici, dans cet écrit destiné à me survivre.

Evidemment, cela ne nous avançait guère, et il fallut se souvenir que c’était Maître Barre qui avait répandu la fable d’un testament - c’était celui de Gabriel - concernant le coeur.
Cette idée romantique avait prospéré et concernait maintenant tous les testaments Pelletan !
Encore une fois, l’affaire Louis XVII se retournait comme une peau de gant.

En relisant attentivement un passage de La Revue Rétrospective, une note attira mon attention : en faisant l’inventaire après décès de Gabriel Pelletan, Maître Barre et le légataire universel M. Prosper Deschamps, s’entendirent sur le coeur trouvé dans l’urne en cristal :
Il fut décidé, d’un commun accord, qu’on ne le comprendrait point dans l’inventaire, mais que M. Barre se mettrait en rapports avec l’administrateur des biens du comte de Chambord, et lui proposerait de le restituer au prince…
Cette décision fut un trait de lumière : il était inutile de chercher le double sort des coeurs dans des dispositions privées : ils furent considérés comme incessibles , appartenant déjà à l’histoire dans l’esprit des hommes qui eurent à en disposer.
De Paris à Froshdorf

Il restait à établir la filière qu’empruntèrent les deux coeurs pour arriver aux mains de la famille royale.
Nous connaissons déjà le chemin emprunté par le coeur appartenant à Gabriel Pelletan et offert en 1895 au duc de Madrid.
Par contre, si nous savions, par le père Bole, que le second coeur était arrivé à Froshdorf avant 1883, il restait à savoir qui l’avait donné au comte de Chambord.
Malade et ruiné, Pierre Pelletan n’avait sans doute pas pu achever ses démarches, comme le souligne le docteur Dureau. Alors, son fils adoptif, Jules de Kinkelin ? Sans doute, mais après le décès de la Duchesse d’Angoulême, qui ne supportait plus les rappels des drames de son existence. Le duc de Doudeauville, qui avait eu l’imprudence d’intervenir auprès de la Duchesse trois mois avant son décès , en faveur d’un prétendant (Richemont) fit les frais de la colère du comte de Chambord :

Après la mort de cette princesse, le duc de Doudeauville regarda comme un devoir d’aller faire une visite de deuil à M. le comte de Chambord. Il était loin de prévoir l’accueil qui l’attendait, après les témoignages d’amitié qu’il était habitué à recevoir du Prince.
Monsieur, lui dit Monseigneur, je n’oublierai jamais que vous avez empoisonné les derniers mois de la vie de ma tante avec votre fable absurde de Louis XVII , vous avez troublé par des remords imaginaires l’âme d’une sainte jusque dans son agonie.

Qu’on se rassure, peu après, les deux hommes se réconcilièrent.
Mais comment ne pas voir que si la Duchesse avait des doutes sur la mort de son frère, son neveu n’en avait pas, à cette époque du moins, et n’aurait pas hésité à accepter le coeur dit « de Pelletan ». La date est difficile à préciser, et devrait se situer entre 1851, décès de Marie Thérèse et 1873, époque où mourut Jules de Kinkelin.
Le secret le plus strict fut gardé.
Méfiance vis-à-vis des Pelletan ? Prudence politique ? Désir de se réserver une « preuve » historique d’un décès toujours controversé ? Il est difficile de trancher.
Après 1895, la question se posa d’une toute autre manière : il y avait abondance de coeurs « Pelletan » à Froshdorf ! Qu’allait-il donc se passer ?


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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Her Ven 8 Avr - 10:25

LES DEUX COEURS DE LOUIS XVII (Suite 1)
Etude historique
par Laure de La Chapelle
Vice Présidente du Cercle d’Etudes Historiques Sur la Question Louis XVII

CHAPITRE 7
Un coeur de trop

Trois générations se succédèrent à Froshdorf entre 1895 et 1975, date du dépôt d’un seul coeur à Saint Denis, totalement différent de sa représentation du siècle précédent.
Qui avait pris l’initiative de vider l’urne des débris de cristal, témoins du premier bocal ?
Qui avait accroché le coeur avec un bout de fil de fer, au lieu d’utiliser l’accrochage en cuivre qui, sans doute, ne convenait plus au nouveau viscère ?
Il est difficile de croire à la responsabilité de Don Carlos, qui avait autour de lui de nombreux témoins de la remise de 1895 par Maurice Pascal au palais Lorédan.
N’oublions pas non plus qu’il n’avait que l’usufruit du château de Froshdorf, où il ne se plaisait guère : c’est son fils Jaime, qui en avait hérité de la comtesse de Chambord.

Quant aux princesses Massimo, mère et filles, il faut bien constater qu’elles étaient dépositaires de traditions contradictoires, au grand étonnement des journalistes en 1975 :

Qu’il soit permis de s’étonner que cette dame (la princesse Marie des Neiges Massimo) descendante du dernier roi Bourbon, ignore ce que tout le monde sait de l’origine douteuse de la « relique » et des circonstances de la venue entre les mains de son grand père en 1895. N’oublions pas qu’à cette date, sa mère avait 21 ans et habitait avec ses parents. Il est difficilement croyable que la fille de Don Carlos n’ait pas été au courant de l’événement et ait transmis à sa fille la ridicule fable selon laquelle la relique serait venue par héritage de la duchesse d’Angoulême et du Comte de Chambord ! (Delorme, op. cit. p.220).

Une haute personnalité autrichienne, (dont on nous demande de ne pas révéler le nom), très proche des descendantes de Don Carlos, nous a également rapporté par écrit qu’un coeur était devenu la propriété de la famille royale ; il parlait d’un reliquaire -et non d’une urne- déposé dans la chapelle du château de Froshdorf, mais ignorait à quel moment ce coeur y était arrivé.

Si les dernières détentrices semblent n’être pour rien dans une manipulation de reliques, il n’en est pas de même pour leur oncle, don Jaime, qui vécut à Froshdorf une grande partie de son existence. Il n’ignorait pas que son père avait eu la main forcée par les légitimistes français et avait dû accepter un viscère issu de la main d’un de ces révolutionnaires dont il avait horreur.
D’autant qu’il y avait un coeur « Pelletan » de trop : « l’oncle Chambord » en ayant déjà accepté un, avec, sans aucun doute, d’excellentes raisons, c’était là l’occasion d’une merveilleuse plaisanterie, que personne n’irait soupçonner.
Un étrange occupant à Froshdorf : don Jaime
En 1913, Maurice Paléologue, ambassadeur de France, se rendit à Froshdof avec son ami Alfred Dumaine, ambassadeur de France à Vienne, qui le prévint avant leur arrivée :

Le domaine de Froshdorf appartient maintenant au duc de Madrid, don Jaime, le fils de don Carlos, qui par le jeu combiné de la loi salique et du traité d’Utrecht, se considère aujourd’hui comme le seul prétendant légitime au trône d’Espagne et le chef véritable de la maison de France. Il a quarante-trois ans ; il est complètement décavé...C’est un sympathique aventurier qui a fait, il y a neuf ans, la guerre de Mandchourie avec un titre de colonel dans l’armée russe...Mais, puisqu’il est décavé, comment a-t-il le moyen d’habiter Froshdorf ?
On ne sait trop. Il s’est ruiné par des spéculations financières, par son opiniâtre déveine au baccara et même par ses libéralités, car il est très généreux de nature. Parfois ses soeurs, l’archiduchesse Salvator et la princesse Massimo le tirent d’embarras. Il jouit de la plus mauvaise réputation à Vienne...
Le château fut acquis en 1839 par le duc de Blacas, qui le rétrocéda à la duchesse d’Angoulême. Il devint en 1851 la propriété de la comtesse de Chambord. Le domaine s’étendait sur 3000 hectares, dont les environs, soit 30000 hectares, étaient loués pour la chasse.

Notre automobile s’arrête devant la grille, qui est ouverte. Le pavillon du concierge a toutes ses portes et fenêtres closes. Tandis que notre mécanicien cherche à qui parler, nous remarquons la dégradation et la malpropreté du jardin : pas une allée qui ne soit envahie par les mauvaises herbes. Et toutes les marches du perron qui borde la façade sont disjointes. Le plus triste aspect d’une maison abandonnée.
Cependant, voici que la porte vitrée qui accède au vestibule s’ouvre. Et nous voyons apparaître un homme qui peut avoir une quarantaine d’années. Il porte un vieux canotier, un veston défraîchi, pas de gilet, pas de cravate, pas de col ; un pantalon de toile jaunâtre, et pour chaussures, des espadrilles. Dumaine lui demande avec politesse et en allemand :
- Savez-vous si son Altesse Royale nous permettrait de visiter le château ? Nous sommes Français .
Alors, élevant à bout de bras son canotier, l’inconnu répond fièrement :
- L’Altesse Royale, c’est moi, don Jaime de Bourbon. Et puisque vous êtes français, seriez-vous des épiciers, je vous dis : Prenez la peine d’entrer. (Après cet exorde, les visiteurs parcourent les salons du rez-de-chaussée)

Au mur, beaucoup de tableaux dont l’intérêt me semble surtout historique ; puis beaucoup d’objets ayant appartenu à Louis XVI, à Marie Antoinette, au jeune Dauphin, à Madame Elisabeth, au duc et à la duchesse de Berry. On dirait un musée de pieuses reliques...
Sur ce, don Jaime allume un cigare. Puis :
- Voici maintenant, Messieurs, la chambre où mon oncle est mort. Vous remarquerez sur les murs la bannière du Sacré Coeur, un fanion des zouaves pontificaux, les prières pour la France brodées par les dames royalistes etc...
Quand il a terminé son boniment, il tire une bouffée de son cigare et nous lance avec un éclat de rire :
Mon pauvre oncle ne supportait pas l’odeur du tabac !

Tandis que nous montons à l’étage supérieur, un homme s’approche de nous, grand, mince, avec une chevelure et une barbe hirsutes, un nez de vautour, des joues creuses, une tête de forban. Il chuchote quelques mots en espagnol à don Jaime, qui se tourne vers nous :
- Messieurs, je vous présente mon aide de camp, le général Lopez . Il m’est tout dévoué, ce qui ne l’empêche pas d’être une canaille. Voici, Messieurs, pourquoi il nous dérange . Vous ne vous scandaliserez pas si je vous confie que j’attends une petite amie de Vienne, une délicieuse ballerine dont j’ai grand besoin, car je ne m’amuse pas tous les jours à Froshdorf. Lopez doit aller au-devant d’elle, mais il voudrait profiter de votre auto. Vous pensez bien que moi, je n’ai pas de voiture. Alors, Monsieur l’Ambassadeur, auriez-vous la gentillesse de me prêter votre auto pour amener ma petite amie ?
Dumaine griffonne sur un papier quelques mots pour son chauffeur et le remet au forban, qui s’éloigne avec dignité.
Arrivés au premier étage, nous pénétrons dans une chambre obscure, convertie en chapelle. Sur un panneau de marbre noir, je lis cette épitaphe :

Ici,
Après une longue vie de souffrances et d’épreuves,
Marie Thérèse Charlotte
Dauphine de France, duchesse d’Angoulême,
A rendu son âme à Dieu, le 19 octobre 1851

Profitant de notre silence méditatif, don Jaime s’esquive pour voir si sa petite amie est bien arrivée. Les mânes de la duchesse d’Angoulême doivent être soulagés de le voir partir. Nous évoquons alors la figure de celle que Chateaubriand a surnommée « la princesse des trônes et des échafauds ».
Comme nous achevons la récapitulation funèbre, don Jaime revient, la figure épanouie. Mais, par décence, il se met à l’unisson de nos pensées qu’il devine ; Et d’un air lugubre, il laisse tomber cette parole sur la fille de Louis XVI :
- Ah, celle-là, on peut dire qu’elle avait la guigne !
Plus rien à voir dans le château. Notre hôte s’écrie :
-Je ne veux pas vous laisser partir sans avoir bu à votre santé.
Et de l’antichambre, il nous pousse dans une petite salle à manger, dont l’ameublement se réduit à une table poussiéreuse, quelques chaises dégarnies et une étagère vide ; pas une seule pièce d’argenterie.
Nous revenons écoeurés de notre visite à Froshdorf ; il nous est pénible de penser que des reliques aussi touchantes et respectables sont devenues la propriété d’une arsouille.

Maurice Paléologue, dans cet étonnant récit intitulé « Un Carliste à Froshdorf » dépeint sur le vif un curieux personnage, qui ne rêve que de s’affranchir des pesantes traditions qu’il représente désormais seul dans ce château hanté par les souvenirs. S’amuser , c’est tout ce qui lui reste.
Et quoi de plus amusant, après tout, que de remplacer un coeur par un autre, surtout quand on ne fait pas confiance à ce qui vient de ces Français, épiciers ou sans-culottes, qui veulent vous imposer des reliques douteuses ?
Mais ne nous y trompons pas : l’hypothèse d’une intervention de don Jaime, si tentante qu’elle soit, reste une hypothèse : les preuves nous manquent encore pour retrouver, au cours d’un laps de temps aussi long, l’auteur de l’interversion des coeurs entre 1895 et 1975 ; la recherche reste très ouverte sur ce point, que seuls de nouveaux documents, ou une enquête sur le terrain, peuvent contribuer à éclaircir.
Louis Joseph et Louis Charles
Et c’est ainsi, par le bon vouloir de don Jaime - peut-être - qu’à Froshdorf - plus sûrement - le coeur de Louis Joseph, premier Dauphin de France remplaça le coeur de Louis Charles, qui n’était à coup sûr pas celui de Louis XVII.
Rien n’est jamais simple pour qui étudie depuis longtemps l’étrange énigme du sort du petit Capet. Croyait-on vraiment s’en tirer à si bon compte avec une simple analyse génétique ?
D’autres avaient déjà mordu la poussière avec la « trichoscopie », et sur la foi d’analyses de cheveux, avaient bouleversé l’ordre des candidats à la succession de Louis XVI.
Mais songez-y : Le sang de France ne se présume pas. Si l’on va trop vite en besogne, cet adage s’imposera aux apprentis sorciers. C’est à l’histoire de contrôler la science et de lui dire : Quel est ton objet ?
_______________________________________________________________________________

llustrations :
Fac simile de l’urne en 1894 et Vue de l’urne en l'an 2000

sur le site http://www.museelouisxvii.com/preuve.htm
Tous droits réservés pour tous pays

///////////////////////////////////////////////////////////////////////////////

Commentaire d'Hercule : Voilà un travail des plus sérieux. Un grand Bravo à Madame Laure de La Chapelle.
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Message par Her Ven 8 Avr - 11:15

http://www.museelouisxvii.com/reponses.htm

La différence de deux centimètres entre les dimensions des cœurs de 1894 et de l’an 2000 peut-elle s'expliquer par une différence de méthode ?
Le cœur du premier Dauphin, Louis Joseph, a-t-il été embaumé ?
Laure de La Chapelle répond à ces deux objections majeures :


l° ) Le cœur « Pelletan » expertisé en 1894 et celui qui a été analysé par le Dr Pfeiffer en 1999 présentaient une longueur d'aorte pendante de 2 cm. Le problème que pose cette caractéristique est double :

- La longueur d'aorte peut-elle être prise en compte pour calculer la dimension d'un cœur? (Certains voulant en effet rajouter les 2 cm d'aorte aux 6 cm du cœur de l'an 2000 pour atteindre les 8 cm du coeur de 1894. )
- Le cœur du premier dauphin possédait-il ce bout d'aorte ?
Voici l'avis autorisé du Dr Geoffroy Lorin de la Grandmaison, du service d’Anatomie pathologique et de Médecine légale de l'hôpital Raymond Poincaré à Garches (Hauts de Seine) donné le 2 juillet 2001 en réponse à l'affirmation que la mensuration faite par le Dr Martellière pourrait avoir intégré un segment d'aorte ascendante de 2 cm :

Cette explication est peu vraisemblable, la hauteur du cœur étant normalement toujours mesurée de la pointe à la base du cœur, sans inclure l'aorte et l'artère pulmonaire.


Quant à la seconde partie de la question, concernant cette fois la présence et la dimension d'un bout d'aorte dans le cœur du premier dauphin, voici la suite de la réponse du Dr Lorin de la Grandmaison :
L'isolement du cœur est classiquement réalisé lors d'une autopsie de la façon suivante :
Après ouverture du péricarde, une section de l'artère pulmonaire et de l'aorte ascendante est pratiquée par le sinus de Theile, suivie d'une section des veines caves et pulmonaires. Le cœur isolé présente donc toujours à sa base un segment d'aorte ascendante et d'artère pulmonaire de longueur variable, faisant souvent de 1 à 3 cm. La présence d'une longueur identique d'aorte ascendante dans la description des deux cœurs ne peut donc servir comme argument d'identification.

Cette conclusion très ferme clôt, à mon avis, le débat sur les deux points de cette question.

2° ) Le second problème abordé par certains correspondants est de savoir si le cœur du premier dauphin, Louis Joseph, a été embaumé.
L'embaumement des cœurs a été pratiqué au 17ème siècle pour les personnes royales, souvent sans résultats satisfaisants.
Les progrès de la médecine au siècle suivant ont permis de changer de procédé et d'employer un mélange hydro-alcoolique, dont le résultat était de dessécher complètement le viscère, en en réduisant considérablement les dimensions, comme le souligne un célèbre anatomiste du 19ème siècle, cité par la Chronique Médicale du 1er novembre 1895 :
Au début de ma carrière, on se servait encore d'un mélange à parties égales d'alcool et d'eau, qui rétractait considérablement les tissus. Vraisemblablement, c'est le liquide qu'aura employé Pelletan. Frappé de cet inconvénient, j'ai substitué au mélange hydro-alcoolique une solution saturée d'acide arsénieux, additionnée de 1/10 d'alcool. Cette solution est avantageuse, parce qu'elle rétracte à peine les tissus, pour ainsi dire pas du tout.

La simple logique donne en effet à penser que le Dr Pelletan ne fit pas subir au cœur prélevé sur l'enfant du Temple un traitement de conservation différent de celui que l'on pratiquait de son temps et qui dut être sensiblement identique à celui qui fut employé six ans auparavant, pour le cœur de Louis Joseph premier Dauphin.
D'autre part, lors du transfert du cœur de Louis Joseph au Val de Grâce le 12 juin 1789 (une semaine après l'autopsie, pendant laquelle les médecins prélevèrent le viscère qu'ils déclarèrent sain) le cœur fut transporté dans une urne (in : Un prince méconnu, le Dauphin Louis Joseph, fils aîné de Louis XVI par Reynald SECHER et Yves MURAT, Ed. R.S.E. 1998, pp 202 et 203) Ce conditionnement était provisoire puisqu'en 1817, il était contenu dans une double enveloppe de plomb et de vermeil (Rapport au Roi de septembre 1817).
La présence d'une urne implique le même traitement de conservation à base d'esprit de vin (ou d'alcool) et d'eau, que celui utilisé par Pelletan six ans plus tard pour le cœur de l'enfant du Temple.
Les deux cœurs furent donc traités selon le même procédé et subirent tous les deux une dessication complète, intense et fortement réductrice. Pour les deux viscères, la dessication est absolue et la consistance pétrifiée. Le résultat est très différent d'un embaumement, qui avait permis aux profanateurs du Val de Grâce de se servir de cœurs plus anciens pour fabriquer de la mummie, mélange de matières organiques broyées et incorporées à de la peinture ! Horresco referens...
Voilà ce qu'on peut répondre aux questions soulevées par la présence de “deux cœurs de Louis XVII“.
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Message par Her Ven 8 Avr - 11:16

http://www.museelouisxvii.com/chambord.htm

DOCUMENT HISTORIQUE DÉCOUVERT AUX ARCHIVES DE LUCQUES (ITALIE) EN OCTOBRE 2003
UNE LETTRE DU COMTE DE CHAMBORD

La première surprise avait été de lire un entrefilet dans l’I.C.C. citant l’article d’un certain Juan Balanso, article paru en 1986 et annonçant que des archives de Frohsdorf se trouvaient en Italie, plus précisément dans la petite ville de Lucques (Lucca) en Toscane.

Pourquoi Lucca et non Vienne, Rome ou Milan ?

Juan Balanso étant mort il y a quelque temps, il fallait aller chercher l’explication sur place. Et c’est grâce à l’amabilité du Dottore Giorgio Tori, conservateur des archives, que j’appris que donna Margherita Beatrice Massimo, née à la Tenuta Reale del Pianore (Viareggio) -et dont le mari, le comte Pagliano était mort à Lucques en 1953-, avait légué les papiers de Frohsdorf aux archives de la ville.

Rappelons que donna Margherita Beatrice princesse Massimo était la petite fille de don Carlos, duc de Madrid et de donna Margherita de Bourbon, princesse de Parme. Don Jaime, fils de don Carlos, n’ayant pas eu de postérité, c’est sa soeur Massimo, puis la fille aînée de celle-ci qui se trouvèrent en possession de ce qui restait des papiers du comte de Chambord (rescapés de la mise sous scellés par le Grand-Maréchalat de la Cour de Vienne, après la mort de la comtesse de Chambord en 1886). Ils sont répertoriés aux archives de Lucques sous la référence :
Archivio dei Borboni legittimisti di Francia
et l’inventaire qui en a été dressé est daté de janvier 2001.

Ces archives, très variées, comportent surtout des analyses politiques envoyées de France au comte de Chambord, quelques papiers de famille -et, en premier lieu, la succession d’Este Modène-, un recueil des Chasses royales sous Louis XV, des cartes et plans, et surtout une nombreuse correspondance de provenances diverses, le tout contenu dans vingt trois classeurs en carton.

Dans un fatras de lettres souvent insipides, se détachèrent très vite quelques textes pris sur le vif : des lettres ou billets, souvent écrits au crayon, de la main du comte de Chambord et adressés de Suisse à son fidèle secrétaire Moricet, resté à Frohsdorf.

C’est parmi ces lettres que je retrouvai la trace de l’arrivée d’une relique historique aux mains des Bourbons. Mais ce billet doit être décrypté comme vous allez le voir et il est souhaitable d’avoir présents à l’esprit mes précédents articles sur ce site. Je le citerai en entier, afin de ne pas sortir les phrases de leur contexte.

LETTRE AUTOGRAPHE DU COMTE DE CHAMBORD

envoyée de Suisse à Frohsdorf le 21 janvier 1871

(voir l'original ICI)

Reçu, mon cher Moricet, vos notes du 17 et du 18. Je suis charmé que Frémont ait de meilleures nouvelles de son père ; faites lui en nos compliments bien sincères. Je suis fâché de savoir le curé de Lanzenkirchen si malade, et je désire qu’on lui fasse dire l’intérêt que ma femme et moi nous prenons à sa santé. Vous avez de la neige et nous un temps constamment magnifique.

Je vous envoie :
1) une note pour Huet, avec lettres de Lontarra et de la chasse.
2) une avance de 100 f faite par le Mis de Brézé, à lui faire rembourser.
3) tout le paquet de Barrande : j’ai lu avec attention tous ces documents ; qu’on se débarrasse le plus tôt possible de ces pestes de Bourdon ; je regrette qu’on ne l’ait pas fait auparavant. Si la femme vient à Frohsdorf, qu’on la mette à la porte et qu’on ne la laisse pas faire du mauvais esprit avec les gens.

que Barrande remercie le Pce de Rohan de ce qu’il nous fait dire par lui, et qu’il donne encore un secours à Nettement.

D’après votre note du 19, reçue à l’instant, je crois comprendre que Frémont a perdu son père. Je charge Huet de lui parler de notre douloureuse sympathie. Reportez le lui en notre nom. Remerciez Lamarthe de Gratz et H. Billot de leurs voeux.

Je joins :

1) une lettre Maurice, envoyer à Barrande, dire que le reliquaire de M. Martin n’est pas arrivé, donne secours s’il le croit.
2) reçu de M. Lange à Brézé pour votre collection.
Je vous embrasse
H

Faisons connaissance avec les principaux personnages de cette lettre. Et d’abord avec l’entourage du comte de Chambord :
Armand Félix Moricet était secrétaire et homme de confiance. Agé de 80 ans en 1871, il était entouré de deux sous-secrétaires, Alfred Huet du Pavillon, qui lui succédera en 1881 et Edouard Frémont.

Quant à Joachim Barrande, il était administrateur général des biens du prince en France. N’oublions pas “Maurice” (Aubry), légitimiste français, fondateur avec Blacas et Bontoux de la caisse royaliste qui recueillait les contributions des comités régionaux qui soutenaient la cause du prétendant.
Que se passa-t-il en janvier 1871 ?

CONFIRMATION DE LA LETTRE DU PÈRE BOLE

La lettre du comte de Chambord signale l’arrivée d’un paquet de documents transmis par Barrande.
Malgré le désagrément que lui cause l’intervention visiblement intempestive des Bourdon, il va les lire avec attention : c’est d’ailleurs la mention qu’en fera plus tard le père Bole.
Car il s’agit bien des documents constatant l’authenticité du coeur Pelletan. Comment peut-on le savoir ? tout simplement parce que Bourdon, qui avait envoyé le paquet à Barrande, était le médecin de la famille Pelletan... Son cabinet médical était situé au 34 de la rue du Bac ; or, la veuve de Pierre Pelletan, née Lucile Santoir de Varenne, habitait 104 rue du Bac : elle était malade, sans ressources, et mourra trois mois plus tard, le 13 avril 1871.

Elle était dans l’incapacité de régler ses frais médicaux : la note impayée du docteur Bourdon apparaît donc en 1873 dans le passif de l’inventaire après décès de son beau-fils Jules de Kinkelin Pelletan dressé le 17 novembre 1873 par Maître Persil (ET/LXIV/869).

Le médecin prit en main l’affaire et dut exercer une forte pression pour que le comte de Chambord accepte le coeur “Pelletan” qui, à cette époque, était encore détenu par la veuve de Pierre Pelletan. Or, s’il y avait une chose que Chambord ne supportait pas, c’est qu’on lui dicte sa conduite... sans compter l’arrivée redoutée à Frohsdorf de Madame Bourdon, la femme du médecin, qui menaçait bel et bien de faire un scandale !

Au reste, le prince, sans en avertir ces fâcheux, avait déjà demandé qu’on lui envoyât le reliquaire de M. Martin, formule ambiguë et méprisante bien dans la manière de Chambord pour signifier que l’enveloppe de la boîte en plomb trouvée par Pierre Pelletan dans le bureau de Mgr de Quelen lors du sac de l’évêché en 1830, pouvait contenir le coeur de n’importe qui, sauf celui d’un membre de sa famille. Sa colère calmée, le prince proposait même de secourir la veuve, qui était dans la plus extrême misère depuis la ruine et la mort prématurée de son mari, en 1845, à Bruxelles.

C’est ainsi que le coeur trouvé par Pierre Pelletan arriva en 1871 à Frohsdorf, avec un certain retard bien explicable puisque Paris était assiégé par les Prussiens.

Le père Bole, qui prit sa charge à Frohsdorf en 1868, fut témoin de l’arrivée de ce premier coeur et en fit la confidence en 1885 au père de Boylesve.

Vingt quatre ans plus tard, le second coeur trouvé par Gabriel Pelletan était reçu par don Carlos, duc de Madrid.

Si le comte et la comtesse de Chambord étaient morts à l’époque, ainsi que Barrande, il restait à Frohsdorf, après la dispersion des fidèles, au moins une personne qui pouvait révéler l’arrivée successive de deux “coeurs Pelletan”, Mgr Alexandre Amédée Curé, chapelain de la chapelle royale de Frohsdorf, aumônier des princes de Parme, et qui mourut à Frohsdorf le 8 octobre 1905.

On prit ensuite la décision de choisir de conserver l’un des deux viscères, sans doute celui qui avait été aux mains du comte de Chambord et dont le parcours apparaissait plus crédible. Mais il est impossible de nier maintenant l’existence parallèle de deux coeurs, et d’affirmer péremptoirement que celui qui a été analysé était celui de Louis XVII, si tant est qu’il soit mort au Temple. Il est beaucoup plus vraisemblable de penser qu’on a pratiqué l’analyse A.D.N sur celui de Louis Joseph.

Laure de La Chapelle
Vice présidente du Cercle E.H.Q. Louis XVII
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Message par Her Ven 8 Avr - 11:17

http://www.museelouisxvii.com/recherchaVanves.htm

LAURE DE LA CHAPELLE DÉCOUVRE AUX ARCHIVES DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS À VANVES LA PREUVE QU'UN PREMIER CŒUR DIT "DE PELLETAN" SE TROUVAIT ENTRE LES MAINS DE LA FAMILLE ROYALE À FROSHDORF PLUS DE DOUZE ANS AVANT LA LIVRAISON ROCAMBOLESQUE D'UN DEUXIÈME CŒUR DIT AUSSI "DE PELLETAN" EN 1895.

CELA SIGNIFIE QUE LES HÉRITIERS DU COMTE DE CHAMBORD ÉTAIENT EN POSSESSION DES DEUX CŒURS DÈS 1895 ET QUE LES CONDITIONS D'UNE MANIPULATION ÉTAIENT RÉUNIES AVANT QUE L'UN D'EUX TROUVE ENFIN PRENEUR EN FRANCE.

SI ON ADMET LES RÉSULTATS DE L'ANALYSE ADN DE L'AN 2000 ATTRIBUANT LE CŒUR ANALYSÉ À UN MEMBRE DE LA FAMILLE DE HABSBOURG, ON PEUT LOGIQUEMENT PENSER QU'IL S'AGIT DU CŒUR DE LOUIS-JOSEPH, PREMIER DAUPHIN, MORT EN 1789.


http://www.museelouisxvii.com/bole.htm

LETTRES DU P. BOLE AU P. DE BOYLESVE
Recueil du 14 août 1869 au 20 décembre 1889
(voir l'original ici) : http://jjric.free.fr/lettrePereBole.htm

Lettre du 17 octobre 1885 ( n°136) : voir ci-dessus la 1ère page et la 3ème page de la lettre autographe du Père Bole déposée aux archives de la Compagnie de Jésus à Vanves et transcrite ci-dessous par Laure de La Chapelle, vice-présidente du Cercle d'Etudes Historiques sur la Question Louis XVII.

-Je connais parfaitement tout ce que vous me dites de Louis XVII ; vous croyez à son évasion, moi non, sans entrer dans le fond de la question qui du reste a été traitée parfaitement et jugée plusieurs fois en pleine connaissance de cause, comme on peut le voir dans les considérants du jugement condamnant Naundorf et les plaignants.

Trois choses me donnent une certitude morale de la mort de Louis XVII au Temple. C'est d'abord la persuasion qu'en ont eu tous les membres de la famille royale. Ni Charles X, ni le duc, ni la duchesse d'Angoulême, ni HV (Henri V) ni sa soeur n'ont jamais élevé le moindre doute là-dessus et tous les Princes et Princesses sont morts sans l'ombre de remords , que dis-je ? sans même y penser. De plus, ces jours derniers, j'entendais Madame (la Comtesse de Chambord) répéter pour la centième fois que la Duchesse d'Angoulême avait toujours affirmé de la manière la plus formelle et la plus énergique la mort de son frère au Temple , qu'elle n'en était, hélas ! que trop certaine !

-Ensuite les procès-verbaux des 4 médecins désignés pour faire l'autopsie du cadavre et dont deux ont déclaré avoir parfaitement reconnu l'identité du jeune Prince.

-Enfin l'enlèvement du coeur (souligné dans le texte) de ce royal enfant par le Dr Pelletan chargé par ses collègues de faire l'autopsie, pieux larcin fait au péril de sa vie. Se serait-il exposé à un si grand danger s'il n'avait pas été absolument certain que le coeur était bien celui du Prince qu'il avait connu et soigné ?
Ce coeur, Monseigneur (le comte de Chambord) l'a reçu après avoir fait examiner toutes les pièces et documents qui en constatent l'authenticité.

N.B. Les annotations par parenthèses ont été insérées dans le texte pour en faciliter la compréhension.


Dernière édition par Hercule le Ven 8 Avr - 11:19, édité 1 fois
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Message par Her Ven 8 Avr - 11:18

http://www.museelouisxvii.com/enterrement.htm

Dernière minute

ENTERREMENT DE 1ère CLASSE CE 19 AVRIL 2000 AU MUSEE DE L'HISTOIRE DE LA MEDECINE

Ambiance lambrissée, instruments de chirurgie, présidence assurée par le prétendant de la branche ibérique, convocation du ban et de l’arrière- ban de ses partisans...
Tous les éléments de l’objectivité étaient réunis pour enfermer le récalcitrant dans sa tombe.
Car c’était bien l’objet de la cérémonie : l’enterrement définitif de ce sacré Louis-Charles qui refuse, depuis deux siècles, de sortir de l’Histoire et d’occuper sa dernière demeure.
Cette fois-ci, son compte est bon. Son "muscle cardiaque", ou ce qu'il en reste, sera inhumé dans une tombe, près de celles de ses royaux parents à Saint-Denis.

Avant d'arriver à ce dénouement grandiose, il fallait obtenir le verdict des scientifiques que le cœur analysé appartenait bien à un enfant de Marie-Antoinette. C'est fait. Le résultat de l'analyse était connu depuis plusieurs mois. Comment peut-on croire que le choix de laboratoires payant de préférence à certains laboratoires indépendants s'offrant à effectuer le travail gratuitement n'a pas eu un puissant mobile ? Comment peut-on croire que le descendant des Blancs d'Espagne se soit déplacé avec toute sa cour sans être assuré du résultat de l'analyse ? Et comment pouvait-on mieux assurer ce résultat qu'en donnant à analyser le cœur authentique d'un enfant de Marie-Antoinette ?

J'entends les protestations : Marie-Antoinette n'a pas eu tant d'enfants qu'il soit si facile de trouver un cœur authentique ?

Non certes, mais il en est un qui était disponible, c'est celui du petit Louis-Joseph, premier Dauphin, mort à Meudon le 4 juin 1789 à l'âge de huit ans.

Sans doute, mais si ce cœur a réellement servi à l'analyse, il ne doit plus se trouver dans son lieu de sépulture ?

Vous avez gagné. Effectivement, il a disparu de Saint-Denis. Bizarre, n'est-ce pas ?

Vous conclurez vraisemblablement avec nous que cette comédie génétique est aussi fiable que l'analyse du Saint Suaire au C14 en 1988 et n'aura pas une longévité supérieure.La seule différence est qu'en 1988 les médiats hurlaient C14, C14, C14 et qu'aujourdhui ils hurlent ADN,ADN,ADN mais avec les mêmes facultés de discernement...

Louis XVII continue de régner dans les esprits.
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Message par Her Ven 8 Avr - 11:21

http://www.museelouisxvii.com/fausseVerite.htm

LA FAUSSE “VÉRITÉ “
ou comment le matraquage médiatique tient lieu de vérité
Analyse critique du livre : Louis XVII, la vérité

On ne présente plus l’auteur M. Delorme, journaliste vedette de la Presse couronnée. Dans son livre modestement intitulé Louis XVII, la vérité (Éditions Pygmalion, Paris, 2000), il retrace ses efforts pour imposer sa thèse de soutien à l’Histoire officielle. A-t-il réussi ? A vous d’en juger.
Au rebours d’une certaine méthode qui construit sur le sable en parlant d’odyssée confuse et de fouille miraculeuse nous allons nous appuyer sur le roc de la certitude objective.

Remarque préalable
Toute étude sur l’affaire Louis XVII doit prendre en compte deux faits incontestables

Le 3 juillet 1793 à 23h00, l’enfant âgé de huit ans est arraché à sa famille : il est hors de doute qu’il s’agit bien de Louis XVII mais c’est la dernière fois qu’on pourra l’affirmer. En toute rigueur, il faudra parler ensuite de l’enfant du Temple, expression qui ne présume en rien de l’identité réelle de l’enfant.
Le squelette trouvé au cimetière Sainte Marguerite est celui de l’enfant mort au Temple le 8 juin 1795 et autopsié le lendemain. Les examens ostéologiques en 1894 par un groupe d’éminents médecins -que le docteur Petrie qualifie de fine fleur de la médecine parisienne à l’époque (J.H.Petrie, Lodewijk XVII-Naundorf, een mysterie ontrafeld, De Bataafsche Leeuw, Amsterdam, 1995, p. 91)- qui ont retrouvé les traces d’une part des atteintes scrofuleuses aux endroits indiqués par le rapport d’autopsie et d’autre part, les coups de scie du docteur Pelletan conformes à la description qu’il en a faite lui-même.
C’est là une preuve scientifique sans appel de cette identité (Philippe A. Boiry, On tue encore Louis XVII, Presses de Valmy, Paris, 2000, chap. V à VII, pp. 54 à 84). Les commentaires de M. Fleury n’y ont rien changé (Maurice Étienne, Les dernières fouilles au cimetière Sainte-Marguerite, in La Presse et Louis XVII, Jacques Hamann, Tome X, 1998, p.171). D’ailleurs, le docteur Petrie en fait tant de cas qu’il ne les reprend même pas dans sa thèse.
Continuer de prétendre donc que Louis XVII est mort au Temple et que sa dépouille a été jetée dans une fosse commune où on ne peut la retrouver consiste à nier une vérité scientifiquement démontrée.

Il découle de ces deux constatations que tout chercheur qui prétendrait d’une part, que l’enfant du Temple après le 3 juillet 1793 est toujours Louis XVII doit en apporter la preuve et d’autre part son raisonnement, s’il admettait que Louis XVII est mort au Temple le 8 juin 1795 et y a été autopsié le lendemain, reposerait sur des bases scientifiquement fausses et serait sans valeur.

Toute étude sur Louis XVII qui ne tient pas compte de ces deux conditions préalables est faussée au départ et ses conclusions nulles et non avenues.
De plus, une remarque d’ordre général s’impose, à savoir, qu’il ne faut jamais prendre les témoignages de l’ére révolutionnaire au pied de la lettre. L’époque ne prêtait pas à la sincèrité : trop de gens mentaient par instinct de conservation. On ne peut donc les considérer qu’avec une pincette dans une main et une grosse loupe dans l’autre.

Pelletan : un faux témoin
Parlant de son geste lors de l’autopsie, Pelletan déclare :
page 30 : Je ne courais pas de grands risques (sa déposition de 1817) ;
page 48 : Je n’avais pas couru le moindre risque…. je ne craignais pas d’être fouillé en sortant (à la duchesse d’Angoulême) ;
page 103 : J’espérais bien qu’on ne s’aviserait pas de me fouiller en sortant de la maison…. Il me félicita de ma témérité (le 13 juin 1816, en parlant du docteur Lassus, décédé en 1807) ;
page 119 : Vous savez qu’il pouvait y aller de ma vie (mai 1817, dans une letttre au docteur Dumangin, toujours vivant à l’époque).
Il ressort clairement de ces déclarations que Pelletan varie sans vergogne ses dires selon les circonstances et suivant ses interlocuteurs :

Pelletan n’est pas un témoin crédible.

Mais il y a pire. Tout d’abord en ce qui concerne les visites de Pelletan à l’enfant du Temple, le médecin déclare :
page 124 : Dès la maladie de Desault, je fus nommé pour continuer les secours… (dans Préliminaire du Mémoire de 1814)
page 102 : J’ai été appelé pour donner les secours de l’art….pendant la maladie et après la mort de M.Desault….Il y avait douze à quatorze jours que je visitais l’enfant lorsqu’il succomba le 8 juin 1795 (dans son Exposé du 13 juin 1816)
Pelletan ment effrontément. Le docteur Desault est décédé le 13 prairial an III (1er juin 1795). Il a été nommé par un arrêté du Comité de Sûreté Générale en date du 17 prairial an III (5 juin 1795). Beauchesne cite l’arrêté du Comité de Sûreté Générale en date du 17 prairial comme nommant Pelletan en charge de continuer les soins (Beauchesne, Louis XVII, Plon, Paris, 1872, Tome II, Livre XVIII, pp. 316 à 326)..
En outre, Beauchesne (op. cit.) retrace les visites du docteur Desault en date des 10 prairial (29 mai) et 11 prairial (30 mai), durant lesquels ce médecin a agi et parlé tout à fait normalement. Ceci exclut totalement d’une part que Desault ait été malade avant son décès et d’autre part qu’un autre médecin, Pelletan ou autre, ait été appelé au Temple pour visiter l’enfant.
Qui plus est, Beauchesne (op. cit.) cite la proposition du Comité des Secours au Comité de Sûreté Générale afin de pourvoir au remplacement de Desault, texte qui cite Pelletan mais ne fait aucune allusion à des soins qu’il aurait donnés à l’enfant.
Ajoutons d’ailleurs que le docteur Pelletan, ne pouvant entrer au Temple par la fameuse porte des écuries pour aller donner des soins à l’enfant, devait bien se présenter à la porte principale de la prison. On ne la franchissait que muni d’une autorisation. Or il découle de ce qui précède que Pelletan n’a eu cette autorisation que le 17 prairial (5 juin).
Il lui a donc été impossible de se rendre auprès de l’enfant avant cette date.

Dans sa déposition de 1817, Pelletan ne craint pas de déclarer : Je visitais le roi trois fois par jour (page 30). En 1795, il n’appelait certainement pas l’enfant le roi !
Là encore, il ment. Beauchesne a retracé les visites de Pelletan (op. cit.) : il s’est rendu auprès de l’enfant le 5 juin dans l’après-midi, et les 6, 7 et 8 juin, une fois par jour entre 8h00 et 9h00 le matin.

La conclusion est claire : Pelletan ne dit pas la vérité, du moins pas toujours, et pas rien que la vérité.

Pelletan est un faux témoin.

Le pieux larcin


Affirmation sans preuve


C’est Pelletan qui a prétendu s’être saisi du cœur de l’enfant autopsié le 9 juin 1795. C’est lui qui opéra, ainsi qu’il est précisé en page 102 : Étant particulièrement chargé de l’opération de l’ouverture et de la dissection… (dans son Exposé de 1816). Il déclare :

page 102 : ...Je me hasardai à m’emparer du cœur de l’enfant… (dans son Mémoire de 1816) ;
page 30 : ….J’osai m’emparer du cœur…. (dans sa déposition de 1817).

Mais Pelletan n’était pas seul dans la pièce où s’est pratiquée l’autopsie. Y assistaient aussi trois autres docteurs (Dumangin, Lassus, Jeanroy), le commissaire Damont, le gardien Lasne, et peut-être encore d’autres personnes (Les commissaires Darlot, Bigot et Bouquet sont aussi mentionnés par Beauchesne (Louis XVII, Plon, Paris, 1872, Tome II, p. 328).. Ces témoins corroborent-ils les dires de Pelletan ?
Docteur Jeanroy : nous n’avons connaissance d’aucune déclaration du docteur Jeanroy à ce sujet. M. Delorme dit à son sujet qu’il disparut sans doute avant l’Empire (page 36).
Le gardien Lasne : c’est sans doute lui que Pelletan dénomme le concierge dans sa déposition de 1817 (page 30). Interrogé par Beauchesne, Lasne sera formel : il a toujours refusé de croire à l’authenticité du cœur de Pelletan. Beauchesne précise : (Il) avait assisté à l’autopsie, et (….) n’avait pas, disait-il, quitté un seul instant l’opérateur (page 30). Il faut cependant préciser à notre tour que Lasne est lui-même un faux témoin : Me Jules Favre en apportera les preuves irréfutables, tirées des propres paroles du personnage, dans sa plaidoirie (Louis XVII, plaidoirie de Maître Jules Favre, Librairie Internationale, Paris, 1891, pp. 191 à 208).
Docteur Lassus. En page 36, Pelletan dit : J’osai soustraire le cœur et je n’en fis part qu’à M.Lassus… (dans son Mémoire de 1816). Mais Lassus est décédé le 7 mars 1807, à Paris (Cercle d’Études Historiques sur la Question de Louis XVII, Cahiers Louis XVII, N° 10 Spécial, janvier 1997, p. 34) et ne s’est jamais exprimé à ce sujet.
Docteur Dumangin. Dans une note datée de 1817, annexée à ses Preuves authentiques de la mort du jeune Louis XVII, l’historien A. Antoine de Saint-Gervais (page 39) écrit : M.Dumangin atteste qu’à la fin de l’opération il a vu M.Pelletan envelopper soigneusement quelque chose qu’il mit dans sa poche. Il n’a nullement songé à ce que ça pouvait être, et il présume que ce chirurgien a pu juger convenable de faire alors un mystère de ce pieux larcin, non seulement de peur de se compromettre, mais encore de compromettre celui qu’il en eût rendu confident. Aujourd’hui, quoique rien ne puisse prouver physiquement que ce soit réellement le cœur de Louis XVII que M.Pelletan ait en sa possession, qu’il ne peut en donner d’autre garantie que sa parole, M.Dumangin, se rappelant ce qui s’est passé lors de l’ouverture du corps, dit que dans son âme et conscience, il est moralement convaincu de la vérité du fait. Nous examinerons ci-après la qualité du témoignage de Dumangin, mais nous pouvons remarquer dès à présent qu’avec ses réticences il sonne comme un témoignage de complaisance.
Cette impression se renforce dans la lettre que Dumangin écrit le 1er mai 1817 à Pelletan, dans laquelle il s’exprime ainsi sur cette affaire : ….dans l’instant où vous dites avoir soustrait une partie précieuse du jeune roi. Dans ce courrier, il n’y a plus la moindre complaisance : Dumangin nie avoir été témoin du geste et doute même de sa réalité.
La différence réside dans le fait que la lettre avait un caractère privé alors que l’attestation de complaisance avait été prononcée devant un tiers.
On peut observer que dans son attestation, Dumangin laisse entendre qu’il est possible que Pelletan ait soustrait quelque chose - dont il se garde bien de préciser la nature -, ce que l’on peut attribuer à un geste de piété envers la monarchie (geste d’autant plus douteux que Pelletan était un révolutionnaire affirmé), et donc excusable. En niant son geste devant un tiers, alors que l’on était sous la Restauration et qu’il était de notoriété publique que Pelletan voulait faire accepter ce cœur par la famille royale et qu’il n’y parvenait pas, il l’aurait tout simplement accusé de crime de lèse-majesté. Les deux médecins ne s’aimaient pas, mais pas au point que l’un envoie l’autre à l’échafaud.

Notons en outre que Dumangin est lui aussi un menteur. Dans sa lettre à Pelletan en date du 1er mai 1817, il affirme : …. Des devoirs communs nous ont appelés constamment ensemble au Temple (page 117). Or, Dumangien a été nommé comme adjoint de Pelletan le 9 prairial (7 juin 1795), la veille de la mort de l’enfant, et ce matin-là les deux médecins allèrent ensemble au Temple ; ils convinrent d’y aller le 10 prairial (8 juin), Pelletan à 8h00 et Dumangin à 11h00. Dumangin fit donc en tout et pour tout deux visites au Temple, dont une seulement avec Pelletan : voici comment se réduisent les prétentions de Dumangin (Beauchesne, op. cit., pp. 320-321).
Le commissaire Damont. Dans sa déposition du 6 août 1817, Damont déclare : …Je priai M.Pelletan de me donner des cheveux… (page 37). Dans sa déposition du 16 août 1817, il est plus précis : … Il le pria de lui donner quelques-uns de ses cheveux ; ce qu’il fit, en prenant des précautions pour que son action ne fût pas remarquée de M. Dumangin … (page 38).
Cette dernière déposition prouve d’ailleurs que le docteur Dumangin n’a rien vu et que son attestation était de pure complaisance.
C’est, dit l’auteur, à la suite de ces dépositions que Damont est venu trouver Pelletan pour lui demander une authentification de ses reliques capillaires (page 38). Nous sommes alors en pleine histoire du cœur et l’auteur prend la démarche de Damont pour une reconnaissance au moins implicite des prétentions du docteur (page 38), alors que deux lignes plus loin il constate que ni Lasne, ni Damont n’ont vu Pelletan s’emparer du précieux viscère. Comment Damont pourrait-il donc donner une reconnaissance, même implicite, d’un geste de Pelletan dont il n’a pas été témoin ? Ce raisonnement tient du délire !
En un mot comme en cent, la démarche de Damont n’a aucune signification en ce qui concerne le cœur.

Aucun témoignage ne vient donc corroborer la prétention de Pelletan de s’être emparé du cœur de l’enfant. Pelletan étant, en soi, un faux témoin, il est hautement douteux que Pelletan ait pris le cœur.

Ceux qui ont vu le cœur

Le docteur Lassus : Pelletan dit dans son exposé de 1816 qu’il lui fit confidence de son larcin (page 103). Il ne précise pas s’il lui a montré l’organe en question.
Tillos : En page 42, Pelletan s’exprime ainsi à son sujet : Les grands orages de la révolution étant calmés, j’eus l’imprudence, un jour, de montrer ce cœur, en même temps que d’autres pièces que mon tiroir renfermait, à un M.Tillos, mon élève particulier…
Abbé Lafont d’Aussone : Dans une note datée du 15 juillet 1836, cet ecclésiastique déclare : … le docteur Pelletan, bien avant la chute de Bonaparte, m’avait montré le cœur de Louis XVII… (page 135).
Comtesse de Clermont-Tonnerre : En page 127, il est dit, d’après un écrit de Pelletan : Madame la comtesse de Clermont-Tonnerre… a vu ce cœur.
De ces quatre personnages, seul Lassus aurait pu authentifier la relique, le cas échéant. Mais il est décédé en 1807, sans avoir rien dit. Quant aux trois autres, ils ne tirent leur connaissance que des propres paroles de Pelletan et ils étaient tous dans l’impossibilité absolue, avec la plus parfaite bonne foi, de vérifier ses dires.
Ces témoignages ne prouvent en rien que le cœur montré ait été celui de l’enfant autopsié.

La comédie Tillos
Le docteur Pelletan dit avoir proposé à la veuve de Tillos un reçu pour disculper la mémoire de son mari du vol du cœur (page 43). Mais cette restitution se déroulait en cercle privé, et la veuve Tillos ne lui demandait rien ! Le geste charitable de Pelletan vise en réalité un tout autre but : c’est la première fois que ce cœur apparaît par écrit et il est déclaré comme étant le cœur de Louis XVII.
Or sur quoi repose cette identification ? Une fois de plus sur la seule parole de Pelletan, lequel, nous l’avons démontré, est un faux témoin.
À la fin de ce reçu, Pelletan ajoute : Le procès-verbal de l’ouverture et autres pièces qui y sont relatives fourniront la preuve de ces faits. Ce sont là les paroles d’un escroc : il veut faire prendre les vessies pour des lanternes. Les pièces dont il parle prouvent seulement qu’il a participé à l’ouverture du corps. Mais cela, personne ne l’a jamais nié ! Par contre, elles n’apportent aucune preuve que Pelletan se soit emparé du cœur, ni que le garçon autopsié ait été Louis XVII.
Il est d’ailleurs remarquable que ce reçu soit daté du 23 avril 1814 (page 128). À ce sujet, nous prenons de nouveau Pelletan en flagrant délit de mensonge puisque dans sa Narration à Mgr de Quelen, datée de 1828 (page 135), il écrit : Madame la duchesse d’Angoulême devait paraître la première… Or ceci est faux. Voici la chronologie des événements : Le 6 avril 1814, le Sénat appelle Louis Stanislas Xavier de Bourbon sur le trône de France ( Pelletan a donc attendu plus de quinze jours encore pour écrire ce reçu !). Louis Stanislas ne quitta sa résidence d’Hartwell, en Grande-Bretagne, que le 20 et s’installa à Compiègne le 29 avril : la duchesse d’Angoulême ne l’avait pas quitté depuis Mitau en 1799 et elle entra à ses côtés à Paris le 3 mai 1814 (G.Bordonove, Louis XVIII, Pygmalyon, Paris, 1989, pp. 131 à 141). Le comte d’Artois, nommé Lieutenant Général du Royaume par son frère, était pour sa part arrivé à Paris dès le 12 avril (J.Orieux, Talleyrand, Flammarion, Paris, 1970, p. 582).

D’autre part, dans son Mémoire de 1816, Pelletan dit : Je n’osai pas réclamer le cœur (page 43). Cette affirmation du médecin est dénuée de toute crédibilité : Comment, ayant constaté le vol et sachant que seul son élève avait pu le commettre, n’est-il pas allé le trouver pour le lui réclamer entre quatre yeux ? Tillos aurait alors bien dû le lui restituer, sans avoir le temps de le détruire, ce qui réduit à néant l’argumentation de Pelletan. Là encore, Pelletan ment : il avait d’autres cœurs à sa disposition mais les Bourbons sont de retour depuis quelques jours. D’où son idée d’offrir à la veuve Tillos un reçu qui authentifie (sic) le cœur.

Odyssée rocambolesque d’un cœur

Le sac de l’Archevêché
Ce cœur ne sera jamais accepté par la famille royale. La fable selon laquelle c’est la révolution de 1830 qui l’empêcha de donner suite à l’offre de Pelletan n’est tout simplement pas crédible. Il y avait alors 16 ans que ce cœur lui était offert ! La vérité est donc que la famille royale n’a jamais ajouté foi aux prétentions de Pelletan.

Le viscère est donc déposé à l’Archevêché de Paris, sous la sauvegarde de Mgr de Quelen, le 23 mai 1828 (page 58). Las ! L’Archevêché est pillé par des émeutiers le 29 juillet 1830 et l’organe disparaît. Mais il est miraculeusement retrouvé par Pelletan fils, lui aussi médecin, quelques jours plus tard (page 66). Il le reconnaît : Il avait encore conservé son odeur d’esprit-de-vin. Cette dernière particularité n’a rien de vraiment caractéristique : toutes les pièces anatomiques à l’époque étaient préparées de la sorte et nous savons que Pelletan père, professeur d’anatomie (page 31), possédait ses propres collections de pièces anatomiques, et notamment dans son tiroir (page 42).
S’agit-il toujours du cœur de 1814 ? Nous n’en avons aucune preuve.

Un cœur qui bouge et se déforme tout seul
Le cœur remis à don Carlos, à Frohsdorf, fit de la part de ce dernier l’objet d’une décharge, accompagnée d’une note décrivant minutieusement l’urne, datée du 22 juin 1895.
Sur les photographies publiées à l’époque (Revue rétrospective, 1894), on voit très bien en effet l’organe très haut dans le vase, tout contre le couvercle. Les morceaux de cristal sont parfaitement visibles, reposant sur le fond du vase.

Sur les photos publiées en avril 2000 (Ph. Delorme, op. cit., p. 136), les morceaux de cristal ont disparu. Le cœur est situé beaucoup plus bas dans l’urne et l’on voit nettement un petit cylindre attenant au couvercle. L’organe est suspendu par un fil ténu. Qui plus est, la forme du cœur lui-même n’est plus la même : il est plus oblong qu’en 1894. Or, il est impossible qu’un organe devenu aussi dur que le bois se soit pareillement déformé sous l’effet de son poids.
Ces constatations résultent du travail minutieux effectué par Laure de La Chapelle, vice-présidente du Cercle d’Études Historiques sur la Question de Louis XVII.

Il est curieux de constater que M. Delorme s’abstient de reprendre dans son livre la photo de l’urne de 1894. Pourquoi ?

D’autre part, en page 90, l’auteur parle de la tâche délicate de disjoindre les deux hémisphères du vase de cristal, qui ont été hermétiquement scellés - sans doute vers 1975, époque du retour du reliquaire en France. Il en découle qu’entre 1895 (transport vers l’Italie du cœur caché derrière la cravate du convoyeur et 1975 soit pendant quatre-vingts ans, rien ne prouve que l’urne ait été scellée, ouvrant la porte à tous les abus. On croit faire un cauchemar ! Dans ces conditions, la conclusion surgit d’elle-même :
Aucune garantie ne subsiste que l’organe contenu dans l’urne soit le cœur qui y avait été replacé en 1830.

DES ÉTUDES FAITES SUR UN MATÉRIAU AUSSI DOUTEUX NE PEUVENT PAS PLUS SE QUALIFIER DE SCIENTIFIQUES QUE D’HISTORIQUES.

Un deuxième cœur à Frohsdorf
M.Delorme nous raconte en page 69 que les héritiers de Pelletan firent contacter M.Barrande, ancien précepteur du comte de Chambord, à qui ils font remettre une notice à ce sujet, en date du 5 juin 1883. Mais le comte décède le 24 août 1883, sans avoir pris de décision.
Le comte de Chambord n’a jamais reçu le cœur dit de Pelletan.

Laure de La Chapelle rappelle une lettre du Père Bole, confesseur du comte de Chambord, à son collègue le Père de Boylesve, en date du 17 octobre 1885. Ce prêtre écrit : Ce cœur, Monseigneur l’a reçu après avoir fait examiner toutes les pièces et documents qui en constatent l’authenticité.
M. Delorme prétend que le verbe recevoir peut avoir aussi le sens d’accepter, et que d’autre part le Père Bole a pu se tromper et penser que les tractations de 1883 avaient abouti, ce qui, nous venons de le voir, n’est pas le cas (Site Internet Forum de l’Histoire/Révolution française, en date du 20 mai 2001).
Le comte de Chambord n’aurait jamais conduit de telles négociations du vivant de la duchesse d’Angoulême sans son accord. On peut donc situer l’événement entre 1851 et 1883.
En français les mots ont un sens. Le dictionnaire Robert donne pour le verbe recevoir les définitions suivantes : I. (Sens passif). Se voir adresser (quelque chose). II. (Sens actif). Laisser entrer ou venir à soi, donner accès. Il s’agit là de personnes ou d’objets matériels. Le sens d’accepter ou d’agréer ne s’emploie qu’au niveau des idées ou, dans le judiciaire, pour une requête à un tribunal.
Le cas qui nous occupe concerne un cœur, donc un objet matériel. Le texte du Père Bole est donc sans ambiguïté : le comte de Chambord a bien reçu matériellement un cœur, présenté comme celui de Louis XVII, et qui n’est pas celui dit de Pelletan. Il est même vraisemblable que le prêtre, confesseur du prince, a lui-même vu ce cœur. Il n’a donc pas pu se tromper, d’autant que ses souvenirs sont encore frais deux ans seulement après la mort du prince.
Il y a eu un cœur, dit de Louis XVII, à Frohsdorf avant 1895.

Le cœur du Premier Dauphin
Louis Joseph François Xavier, le Premier Dauphin, est décédé à Meudon le 4 juin 1789. Son corps a été autopsié et, selon la coutume, son cœur a été mis à part pour être conservé.
Ce cœur a-t-il été embaumé ? M. Delorme l’affirme en page 174 : Les cœurs princiers, avant d’être déposés au Val-de-Grâce, subissaient un traitement de thanatopraxie. À l’appui de ses dires, il cite deux procès-verbaux d’embaumement, le premier pour le cœur de la Dauphine Marie-Anne-Victoire de Bavière, décédée en 1690, le second pour celui du comte de Provence, en date du 17 septembre 1824. Ces deux documents prouvent qu’à chaque embaumement, un procès-verbal de l’opération était dressé.
Or il n’existe pas de procès-verbal d’embaumement du cœur du Premier Dauphin.
Cette absence à elle seule ôte toute crédibilité à l’affirmation que cet organe aurait bien subi ce traitement. D’autant que le texte de 1690 est explicite : Le cœur, après avoir été vidé, lavé avec de l’esprit-de-vin et desséché... Ce début de traitement correspopnd exactement au processus que nous décrit Pelletan pour la conservation de son cœur en page 42. Rien donc n’interdit de penser que pour nombre de cœurs princiers les opérations se soient arrêtées là, et notamment pour celui du Premier Dauphin, en plein début de période révolutionnaire.
Il est intéressant de noter que, dans cette hypothèse, le cœur du Premier Dauphin présenterait les mêmes apparences que le cœur dit de Pelletan.

Le cœur du Premier Dauphin a bien été déposé au Val-de-Grâce, mais cet édifice a été pillé par la lie révolutionnaire en octobre 1793. Un avocat le recueillit alors et il était déposé en 1817 à la mairie du 5ème arrt (actuel). Depuis, la trace en a été perdue.

Supposer par conséquent que les analyses ont été pratiquées en réalité sur le cœur du Premier Dauphin est une hypothèse parfaitement plausible. Il faudrait pour l’écarter retrouver le cœur de Louis Joseph et pouvoir l’identifier de façon irrécusable.

Une curieuse histoire de cheveux
Dans sa relation des événements, Damont déclare (page 37) : C’est là, présent à l’opération, que je priai M.Pelletan de me donner des cheveux,… , ce qu’il m’accorda. Dans sa deuxième déposition, il précise (page 38) : qu’il reçut de M.Pelletan une touffe de cheveux qu’il a enveloppée dans un journal de ce temps-là. Après la restauration, Damont est venu trouver Pelletan afin d’obtenir de lui une authentification de ses reliques capillaires (page 38).
Or Damont a voulu offrir ces cheveux à la famille royale. Il raconte en détail sa démarche dans sa déposition du 16 août 1817 au ministère de la Police générale (R.Chantelauze, Louis XVII, Firmin-Didot, Paris, 1884, Appendice, pp. 462 à 466). Il fut donc convoqué chez le duc de Grammont, capitaine des gardes du corps de S.M.. Celui-ci à l’examen des cheveux, prétendit que ce n’était point les cheveux du Dauphin ; qu’ils étaient d’un blond plus clair ; qu’il avait eu l’occasion de le bien connaître, sa belle-mère ayant été gouvernante des enfants de France.
Chantelauze ajoute en note : le duc de Grammont aurait dû savoir, ce qui n’est ignoré de personne, que les cheveux blonds d’un enfant peuvent passer au brun le plus foncé, à mesure qu’il avance en âge, et que ce changement se produit très fréquemment.
Il est exact que beaucoup d’enfants naissent blonds et que leur chevelure devient châtain, voire châtain foncé, lorsqu’ils grandissent. Mais cela n’est pas le cas pour les vrais blonds, tels que l’étaient Madame Royale et Louis Charles, qui tenaient leur chevelure blond cendré de leur mère. Et cela, Chantelauze ne pouvait pas l’ignorer. Sa remarque n’a donc aucune valeur en ce qui concerne Louis XVII.
Il en résulte que les cheveux conservés par Damont depuis l’autopsie ne provenaient pas de la tête de Louis Charles et cet élément à lui seul est une preuve que l’enfant autopsié le 9 juin 1795 n’était pas Louis XVII.
Ce qui réduit à néant les arguments (sic) de M. Delorme.
En page 20 du Mémoire écrit par Marie Thérèse Charlotte de France (Plon, Paris, 1756), la princesse écrit : Il était extrêmement engraissé, mais pas très grandi. Il ne lui aurait pas échappé que les cheveux de Louis Charles avaient foncé.

Mais l’affaire des cheveux ne s’arrête pas là !
Sur le Mémoire de la main de Pelletan en date du 4 décembre 1818 (page 135), se trouve en dernière page une note écrite par l’abbé Lafont d’Aussone, historien de la Reine, en date du 15 juillet 1836. Cet ecclésiastique était le neveu de la marquise de Talaru auquel Pelletan avait confié son Mémoire pour le communiquer à la duchesse d’Angoulême. L’abbé écrit : Je déclare, en outre, que le docteur Pelletan, longtemps avant la chute de Bonaparte, m’avait montré le cœur de Louis XVII, et sa jolie chevelure blond cendré, toute bouclée.
D’où proviennent ces cheveux de Louis XVII ?
M. Delorme pose bien cette question (page 136), mais se révèle incapable d’y répondre autrement que par des hypothèses, contredites par les dires de Pelletan lui-même.
En page 116 en effet, nous lisons : Le sieur Damont… me pria de lui donner une poignée de cheveux ; ce que je fis…. à la condition de m’en rendre la moitié : je ne réclamai pas cette moitié, ayant le cœur en ma possession. Le sieur Damont est venu réclamer mon certificat pour… appuyer la vérité, en déposant entre les mains de S.A.R. Madame la poignée de cheveux que je lui avais donnée et que j’ai fort bien reconnue.
Cette déposition de Pelletan est très claire :
1) Pelletan n’a pas pris de cheveux lors de l’autopsie ;
2) Il n’a pas réclamé à Damont la moitié des cheveux de l’enfant autopsié que celui-ci était censé devoir lui rendre ;
3) La poignée de cheveux présentée par Damont au duc de Gramont est complète et Pelletan l’a reconnue.
Or, la poignée de cheveux présentée par Damont a été refusée parce qu’elle n’était pas de la teinte de cheveux blond cendré du Dauphin.
La conclusion est claire : Pelletan est un traficant de pseudo-reliques royales.

En page 68, parlant du fils Pelletan, M. Delorme écrit : Quelle récompense chimérique peut donc espérer le détenteur des pauvres restes de Louis XVII ? Cette fausse naïveté ne peut tromper personne. Du temps même de la révolution, les reliques de la famille royale ou les objets divers provenant du pillage des châteaux royaux se monnayaient à prix d’or à Paris. Leur cote n’a pas baissé depuis, ainsi qu’en témoignent les sommets atteints lors d’enchères publiques. Ce n’est sans doute pas une récompense honorifique, mais elle est sonnante et trébuchante !

La prétendue maladie de Louis XVII
En page 12, l’auteur écrit : À Versailles, puis aux Tuileries, Louis Charles rayonnait de vitalité. C’est exact, mais cette vitalité n’a pas pris fin le 10 août 1792. Au Temple encore, il était parfaitement sain et vif : durant le préceptorat de Simon (et en supposant que l’enfant confié à Simon était bien encore Louis XVII), il courait en tous sens, riant, chantant, jouant au vu et au su de tous. Le 19 janvier 1794 ; les commisaires de la Commune de service au Temple, dont Lorinet, officier de santé, délivrèrent au couple Simon une décharge où l’enfant était déclaré en bonne santé.
On ne peut donc parler d’une éventuelle maladie de Louis XVII qu’après le 19 janvier 1794. Et là encore faudrait-il prouver au préalable qu’il s’agissait bien encore de Louis XVII !
Ce qui nous laisse un délai maximum de seize mois pour l’apparition et le dénouement fatal de la maladie en question.
Or le procès verbal d’autopsie (Beauchesne, op. cit., Livre XVIII, page 330, note 1) termine par cette conclusion : Tous les désordres dont nous venons de donner les détails sont évidemment l’effet d’un vice scrofuleux existant depuis longtemps, et auquel on doit attribuer la mort de l’enfant. La scrofule, forme de tuberculose, est une maladie à évolution lente. Un délai de seize mois est absolument incompatible avec la conclusion des médecins.
Cette constation est encore une preuve que l’enfant autopsié le 9 juin 1795 n’était pas Louis XVII. Il est donc parfaitement abusif de parler de la maladie de Louis XVII.

En page 12, l’auteur écrit : Le 9 mai (1793), le docteur Thierry prescrit aussitôt un traitement antiscrofuleux. L’historien Beauchesne nous donne pour les mois de mai, juin et juillet 1793 les ordonnances du docteur Thierry pour le fils de Marie-Antoinette (Beauchesne, op. cit., Documents et pièces justificatives, VII, pp. 492 à 495) : on y relève force petit lait clarifié, du miel de Narbonne, une médecine composée de follicules mannes choisis, coriandre, et sel de Glauber, des baies de genièvre, un bouillon avec cuisses et reins de grenouille, avec addition de sucs de plantes, et terre foliée minérale , un lavement «avec carraline de Corse, suc de citron et huile d’olive, et du sirop vermifuge.
Tout ceci n’a rien à voir avec la scrofule, mais relève exclusivement de la diététique.

Un de mes ancêtres, l’abbé François Rozier, né en 1734, (nous descendons en ligne maternelle directe de son frère aîné, Jacques Mathieu Rozier) fut un agronome très connu et estimé au XVIII° siècle : on l’appelait le Columelle français. Il contribua avec Bourgelat à la création de l’École vétérinaire de Lyon, dont il fut un temps directeur ; il créa le jardin botanique aujourd’hui englobé dans le Parc de la Tête d’Or, où se trouve son buste ; il créa aussi l’École d’Horticulture d’Ecully, dans la banlieue Ouest de Lyon, qui existe et fonctionne toujours. Il fut membre, ou associé, ou correspondant d’un grand nombre d’académies en France et à l’étranger. Devenu curé de Saint-Polycarpe, sur les flancs de la Croix-Rousse, à Lyon, il mourut dans son sommeil, tué en 1793, pendant le siège, par un boulet qui tomba sur son lit.
Entre autres œuvres, il a laissé un Cours complet d’agriculture, qui avait de nombreux souscripteurs. Il s’agit d’une compilation sur nombre de sujets non seulement agricoles, mais aussi scientifiques, et notamment médicaux.
Dans le Tome IV, édité en 1786, en page 137, il traite de la scrofule et des écrouelles. Il dit notamment : Je dirai que le lait, dont on abuse dans certains pays froids et humides, surtout s’il est grossier, contribue beaucoup au développement de cette maladie. Citant des médecins qui ont été ses correspondants, il conseille comme remèdes : l’onguent de tabac, l’emplâtre de savon camphré, le cataplasme à la mie de pain, avec de la racine de bryone, , les feuilles de ciguë, les frictions mercurielles, l’usage des eaux de Barèges, les gommes résolutives, la scille, la rue, l’alcali fixe végétal, et comme remontant le quinquina tonique.
Il est clair que les prescriptions du docteur Thierry ne concernent en rien la scrofule.
Dans le Tome III, édité en 1783, il traite de la constipation. Il constate que cette affection peut occasionner de violents maux de tête, et même des coups de sang. Il préconise pour cette affection les lavements émollients, avec les décoctions de son, de graine de lin, de poirée, de pariétaire et de miel. Il y ajoute le petit lait, l’eau de poirée, de laitue, l’eau de veau légère, et la dissolution de 2 ou 3 onces de manne, avec un gros de crème de tartre, dans une pinte des boissons susdites.
Le docteur Thierry, de mai à juillet 1793, a tout simplement soigné un jeune garçon sujet à la constipation.
Il n’y a pas eu de maladie de Louis XVII. Cette affirmation erronée sort tout droit du livre du docteur Petrie (J.H.Petrie, op. cit., chap.6, pp. 59 à 69).

Erreurs dans le procès-verbal d’autopsie
Le procès-verbal d’autopsie dit : ... un enfant qui nous a paru âgé d’environ dix ans, que les commissaires nous ont dit être celui du fils de défunt Louis Capet… (Beauchesne, op. cit.). Cette procédure est tout simplement légale : le médecin légiste n’a pas à se prononcer sur l’identité du cadavre qu’il autopsie. Il reprend simplement ce qui lui a été dit. Cette déclaration ne prouve donc strictement rien quant à l’identité du cadavre.
Par ailleurs, nombre d’historiens se sont accrochés à l’âge d’environ dix ans attribué par les médecins à l’enfant. C’est ne pas tenir compte des faits. Tout un chacun en France savait que le petit duc de Normandie était né en 1785. Lui donner un autre âge après l’avoir désigné comme le fils de défunt Louis Capet, c’était signer la supercherie et, par conséquent, prendre un billet direct pour l’échafaud. Et ceci d’autant plus que les médecins avaient tout lieu de penser que personne ne serait jamais en mesure de vérifier leurs dires. Ce qui, malheureusement pour eux, s’est produit et a révélé le mensonge. Faite dans ces conditions, l’indication de l’âge ne prouve rien.
Toute autopsie commence par un examen minutieux externe du cadavre. Les médecins ont réalisé cet examen avec soin. Notons d’ailleurs que parmi eux se trouvait le docteur Lassus, qui était professeur de médecine légale (Beauchesne, op. cit., p. 329). Ils ne notèrent aucun signe corporel significatif sur le cadavre de l’enfant. Or Louis Charles possédait des marques corporelles qui étaient de notoriété publique et que les médecins ne pouvaient pas ne pas chercher les marques d’inoculation aux deux bras (connues de tout le corps médical) et le nævus maternus à la face interne de la cuisse gauche (connu du docteur Jeanroy, et vraisemblablement du docteur Lassus). S’ils ne les ont pas notées, c’est qu’elles n’existaient pas sur le cadavre.
Nous avons là une preuve supplémentaire que l’enfant autopsié le 9 juin 1794 n’était pas Louis XVII.
Remarquons en outre que les docteurs, connaissant leur existence sur le vrai Louis Charles, auraient fort bien pu les imaginer : ayant relevé déjà des marques de putréfaction au ventre, au scrotum et au-dedans des cuisses (cette dernière indication prouve qu’ils ont regardé l’intérieur des cuisses, donc de la cuisse gauche), ils ne couraient aucun risque. Ces marques se trouvant dans les chairs et non dans les os auraient disparu en quelques jours. Ils ont eu l’honnêteté de ne pas le faire, alors que personne ne leur aurait reproché ce mensonge.
Le but d’une autopsie consiste certes essentiellement à définir les causes du décès, mais elle doit aussi enregistrer toutes les caractéristiques qui pourraient servir, le cas échéant, à vérifier l’identité du défunt. Et il s’agissait quand même du fils de Louis XVI !

Un ADN de référence douteux
Lors des analyses d’ADN ayant porté sur l’os prétendu de Naundorf, le professeur Cassiman a déclaré avoir isolé l’ADN de Marie-Thérèse (il s’agit bien de celui de l’impératrice d’Autriche et non de celui de sa fille Marie-Antoinette). En réalité, d’après le rapport même du professeur Cassiman, de forts éléments de doute subsistaient dans les résultats des recherches sur cet ADN (Philippe A. Boiry, Louis XVII-Naundorf devant l’ADN, Presses ed Valmy, Paris, 1998, pp. 296 à 298).
Le Docteur Olivier Pascal, qui menait une recherche parallèle en France, a formulé par écrit ses doutes formels sur la validité de cet ADN (Philippe A. Boiry, On tue encore Louis XVII, Presses de Valmy, Paris, 2000, pp. 186-187)..


Résumé

En définitive, nous avons constaté :
l’absence de preuve que Pelletan ait pris le cœur de l’enfant autopsié le 9 juin 1795 ;
l’attestation matérielle tardive du cœur dit de Pelletan depuis le 23 avril 1814, après le retour des Bourbons ;
l’absence de preuve que le cœur de l’enfant du Temple déposé à Saint-Denis soit le cœur dit de Pelletan ;
que l’ADN analysé provient d’un cœur d’enfant d’origine inconnue ;
que cet ADN a été comparé à un ADN de référence de qualité scientifique douteuse.

Et on nous annonce à grand son de trompes médiatiques que c’est bien le cœur de Louis XVII et que celui-ci est donc bien mort au Temple le 8 juin 1795.
Cette annonce, qualifiée par ses auteurs d’historique et de scientifique n’a strictement aucune valeur. Elle ne prouve qu’une chose : malgré leurs rodomontades, ses auteurs sont incapables d’apporter la moindre preuve convaincante de leur prétention.

On peut remarquer pour terminer que même si ce cœur comportait un ADN semblable à celui de l’impératrice Marie-Thérèse, cela ne prouverait qu’une chose : c’est qu’il s’agit d’un Habsbourg. Pour conclure à l’identité de Louis XVII, encore faudrait-il apporter la preuve qu’il s’agit aussi d’un Bourbon !

Conclusion

Contrairement aux prétentions de l’auteur, cet ouvrage ne peut en aucun cas se qualifier d'historique, et encore beaucoup moins de scientifique.
Il est curieux de noter que la méthode suivie par M. Delorme est la copie conforme de celle adoptée depuis 1990 par le docteur J.H.Petrie, qui a lui aussi prétendu que son livre était un ouvrage historique et scientifique (J.H.Petrie, op. cit.) L’affirmation - erronée - de la mort de Louis XVII au Temple le 8 juin 1795, ainsi que les affabulations sur la prétendue maladie de Louis XVII, sont reprises directement du livre du docteur Petrie.
Ainsi M. Delorme déclare-t-il en page 79 que le docteur Petrie a réuni des preuves convaincantes selon lesquelles Louis XVII est bien mort au Temple. Le livre du docteur Petrie n’ayant été publié qu’en langue néerlandaise. Comment M. Delorme peut-il en juger ? Lit-il le néerlandais ? Moi qui ait fait l’effort d’apprendre cette langue et qui ait disséquer, phrase à phrase, l’ouvrage du docteur Petrie, je peux affirmer que, malgré certaines recherches, son ouvrage est un florilège d’a-priori, d’erreurs, de mensonges avérés, d’affirmations sans fondement, de choix arbitraires de faits et de témoignages, de fausses naîvetés, ce qui lui ôte toute crédibilité. Cest pourtant la thèse qui a valu à M.J.H. Petrie son titre de docteur et, en dépit de la sympathie que j’éprouve pour ce pays, il faut dire que les autorités académiques néerlandaises n’en sortent pas grandies !
C’est le docteur Petrie qui fut l’initiateur de l’analyse ADN de 1998 sur un os d’origine douteuse à comparer avec un ADN tout aussi incertain, avant de passer le relais en 2000 à M. Delorme pour l’analyse du cœur d’origine douteuse de Saint-Denis, objet de cette critique. La collusion entre les deux hommes est flagrante.
Quand on a raison, on n’a pas besoin de recourir à de tels procédés !

Michel Jaboulay

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Message par Her Ven 8 Avr - 11:22

Nous remercions les personnes suivantes qui ont participé à la constitution de cette base de données et nous présentons nos excuses à celle que nous aurions pu oublier :
Mmes de la Chapelle, Mercier, Pierrard, Védrine, Mlles Bérasatégui, Coutin.

MM. Albert, Bancel, Desjeux, Hamann, Jaboulay, Loison, Mac'Rel, Mésognon, Parois.

La thèse historique exposée ici, sauf articles dûment signés par l'auteur, est extraite des travaux de M.Michel Jaboulay en voie de publication.

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Commentaire d'Hercule : Je m'associe aussi à ces remercfiements
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Message par Castel Mer 8 Juin - 12:58

Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Louisx10
Que la pensée du petit prince disparu, voilà 216 ans, nous arme de courage, d'espérance et de foi. Que le sang de son père ne retombe sur les bourreaux que pour purifier leurs âmes et ouvrir les yeux de leur engeance. Que la volonté de Dieu soit faite, que son règne arrive en la personne du digne successeur de cet enfant, roi et martyr.
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Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin Empty Re: Louis XVII (1785-18XX), Roi et Orphelin

Message par Castel Sam 9 Juin - 11:36

Un an de plus, 217 ans après, et toujours autant de discorde et si peu de recueillement à la mémoire du petit roi, martyr de la foi, dont l'âme veille sur nous, pauvres Français ! Que Dieu bénisse ceux qui liront ces lignes et prieront pour lui et ses bourreaux.
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